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Augustin, que saint Fulgence établit par un sermon de ce Père, qu'il récite entier, et que tout le monde a reconnu après lui; c'est la doctrine constante de saint Augustin dans tous ses ouvrages. Il y a encore un sermon (1) où il établit expressément que le chrétien est fait membre de Jésus-Christ, premièrement par le baptême et avant la communion actuelle, qui est la même vérité que saint Fulgence avoit établie par le sermon qu'il a rapporté. Le même saint Augustin enseigne la même chose dans le livre du Mérite et de la Rémission des péchés. On ne fait, dit-il (2), autre chose dans le baptême des petits enfans, que de les incorporer à l'Eglise, c'est-à-dire, de les unir au corps et aux membres de Jésus-Christ. Cent passages du même Père justifieroient cette vérité, si elle pouvoit être contestée. On a vu la conséquence que saint Fulgence a tirée de ce beau principe. Il paroît même que saint Augustin l'a tirée lui - même, puisqu'il présuppose qu'un enfant malade qu'on se presseroit de porter aux eaux baptismales, si on lui prolongeoit tant soit peu la vie, en sorte qu'il mourút incontinent après son baptême, seroit de ceux dont il est écrit, qu'ils ont été enlevés, de peur que la malice ne les changedt (3); c'est-à-dire, qu'il seroit sauvé, bien qu'il paroisse par tous les termes de ce Père, qu'il présupposoit la mort de cet enfant si proche, qu'on n'auroit pas eu le loisir de le communier.

On voit donc la mauvaise foi de M. Simon, qui

(1) Serm. Pasc. Serm. 224. — (2) De pecc. mer. et remiss. l. 11. c. v.3) De anim. et ejus origin. lib. 111. c. x.

dissimule les décisions de Bâle et de Trente, et qui passe si hardiment comme un fait constant, que saint Augustin avec toute l'antiquité étoit dans l'erreur; commé si saint Fulgence, qui florissoit dans le siècle où saint Augustin est mort, ne faisoit pas partie de l'antiquité; ou qu'il eût pu mépriser la doctrine de saint Augustin, dont il faisoit une si haute profession d'être le disciple; ou qu'il n'eût pas résolu la difficulté dont il s'agit, par les principes de ce Père; ou que la solution que nous y donnons ne fût pas la même que celle de saint Augustin; ou enfin que saint Augustin n'eût pas lui-même parlé en conformité de ce principe dans le passage qu'on vient de rapporter. Mais sans nous arrêter à un seul passage, toute la théologie de saint Augustin concourt avec celle de saint Fulgence, à nier dans l'eucharistie une nécessité égale à celle du baptême.

CHAPITRE XV.

Toute la théologie de saint Augustin tend à établir la solution de saint Fulgence, qui est celle de toute l'Eglise.

Le même saint Augustin enseigne partout que les enfans baptisés sont mis au nombre des croyans, lorsque ceux qui les portent au baptême répondent pour eux, et que dès-lors ils sont du nombre de ceux dont il est écrit: Qui croira et qui sera baptisé sera sauvé; mais maintenant il faudra dire qu'il sera damné sans avoir reçu la communion.

Le même Père enseigne encore que Jésus-Christ est mort une seule fois; mais qu'il meurt pour chacun de nous, lorsqu'en quelqu'âge que ce soit nous sommes baptisés en sa mort, et que c'est alors que sa mort nous profite (1); «c'est-à-dire, qu'elle nous est appliquée : en quoi il ne fait que répéter ce que saint Paul avoit dit deux fois en mêmes paroles, de peur qu'on ne l'oubliât: Que nous sommes ensevelis avec Jésus-Christ dans le baptéme, etc. (2), et on veut que ce Père, qui a si bien entendu cette doctrine, damne ceux qui ont été baptisés, et à qui la mort de Jésus-Christ est appliquée, s'ils ne com

munient aussitôt.

Le même saint Augustin enseigne après le prophète, que rien ne peut mettre de séparation entre Dieu et nous que le péché (3). Sur ce principe incontestable, il décide qu'une innocente image de Dieu ne peut être privée de son royaume, selon les règles de justice qu'il a établies. On trouvera dans saint Augustin, sans exagérer, cinq cents passages de cette nature, et cinq cents autres pour dire que la rémission des péchés s'accomplit par le baptême. On demande donc à M. Simon et à ses semblables: veut-il présupposer qu'après le baptême on demeure encore pécheur, et qu'un si grand sacrement n'ait aucun effet? Ce seroit en rejeter la vertu; ou bien est-ce qu'après avoir reçu la grâce, un enfant la perd, s'il n'est communié? Mais quand, et dans quel moment, et par quel crime? La grâce se retire-t-elle toute seule sans aucune in

(1) Cont. Jul. lib. VI. c. v. - (2) Rom. v1.4. Coloss. 11. 12.- - (3) De spiritu et litt. cap. xxv. n. 42.

fidélité précédente? Ou bien admettra -t-on dans un enfant une infidélité précédente dont son âge n'est point capable? Dans quelle absurdité veut-on jeter l'ancienne Eglise, en lui faisant égaler la nécessité de l'eucharistie qui suppose l'enfant en état de grâce, à celle du baptême qui le suppose en état de péché!

Voici encore un autre principe qui n'est pas moins clair. Toute l'Eglise et saint Augustin avec elle croit, sans qu'on en ait jamais douté, que l'eucharistie étoit pour les saints; c'est-à-dire, pour ceux qui étoient justifiés. Personne n'ignore ce cri terrible avant la communion, les choses saintes pour les saints. On étoit donc sanctifié quand on communioit; et si avant la communion on pouvoit être damné, on pouvoit être tout ensemble damné et saint. Si le baptême n'avoit pas remis pleinement tous les péchés, l'on communioit en péché, lorsque l'on communioit après le baptême; et la première communion étoit un sacrilége. Qui auroit pu digérer ces absurdités ? Mais cependant on veut supposer que c'étoit la foi de l'Eglise du temps de saint Augustin. Bien plus, on veut supposer que l'Eglise ne savoit pas la différence du baptême et de l'eucharistie. Sans doute l'eucharistie, qui est établie pour nourrir le chrétien, le suppose régénéré; mais s'il est régénéré, il est enfant de Dieu : on appelle aussi l'eucharistie le pain des enfans, le pain des saints, le pain des justes; mais, dit saint Paul, si l'on est enfant, on est héritier et cohéritier de Jésus-Christ (1) : on est tiré de la puissance des ténèbres pour être

(1) Rom, VIII. 17.

transféré

transféré au royaume du bien-aimé Fils de Dieu (1). On est donc en voie de salut incontinent après le baptême, et avant la communion on n'y est pas avant le baptême, parce que n'ayant encore rien reçu de Dieu, on n'a avec son péché que sa propre condamnation. L'état n'est donc pas le même, la nécessité n'est pas égale.

CHAPITRE XVI.

Vaine réponse des nouveaux critiques.

SONT-CE là des subtilités, comme les appelle M. Simon, et des réponses tirées par les cheveux, ou des vérités solides et évangéliques? On sait les finesses de nos critiques. Je ne raisonne pas, disentils, j'avance un fait : ils croient se mettre à couvert par cette défaite, et qu'on n'a plus rien à leur dire; mais au contraire on leur dit alors: C'est donc un fait que l'Eglise a ignoré les premiers principes de la religion, le langage de saint Paul, la définition du baptême et celle de l'eucharistie, avec leurs effets primitifs et essentiels. Quiconque admet de tels faits, peut, s'il veut, être protestant; mais il ne peut pas être catholique; et aussi venons-nous de lire dans le concile de Trente, après le concile de Bâle, la condamnation expresse de ce sentiment, que notre auteur a dissimulée avec tout le reste.

(1) Coloss. 1. 13.

BOSSUET. v.

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