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cet ouvrage, qu'il est tout-à-fait novice en théologie, et non-sealement qu'il prononce trop hardiment, mais encore qu'il prononce mal, pour ne rien dire de plus, sur des matières qui le passent.

Avant que d'entrer dans cette discussion, il faudroit donner en général une idée de son ouvrage; mais personne ne le sauroit faire bien précisément. S'il s'en falloit rapporter au titre, on croiroit, qu'en promettant de donner l'histoire des principaux commentateurs du nouveau Testament, il voudroit nous faire connoître seulement leur génie et leur savoir, leur genre d'écrire, leur manière d'interpréter, le temps et l'occasion de leur composition, et les autres choses semblables, sans entrer dans les questions, ou décider sur le fond, qui seroit un ouvrage immense, et auquel plusieurs grands volumes ne suf firoient pas; mais ce n'est pas le dessein de notre auteur. Sous prétexte d'une analyse telle quelle, qu'il fait semblant de vouloir donner de certains endroits, il veut dire son sentiment sur le fond des explications, louer, corriger, reprendre qui il lui plaira, et les Pères comme les autres, décider des questions, non pas à la vérité de toutes, car ce seroit une entreprise infinie, mais de celles qu'il a voulu choisir, et en particulier de celles où il a occasion d'insinuer les sentimens des sociniens, tant contre la divinité de Jésus-Christ que sur la matière de la grâce, ou en commettant les Grecs avec les Latins, et les Pères les plus anciens avec ceux qui les ont suivis, il interpose son jugement avec une autorité, qui assurément ne lui convient pas.

On ne voit donc pas pourquoi il lui plaît d'entrer dans ces questions, puisqu'assurément il n'est pas possible qu'il les éclaircisse autant qu'il faut dans un volume comme le sien : ce qui est cause qu'en remuant une infinité de difficultés, qu'il ne peut ni ne veut résoudre, il n'est propre qu'à faire naître des doutes sur la religion; et c'est un nouveau charme pour les libertins, qui aiment toujours à douter de ce qui les condamne. On ne peut rendre non plus aucune raison du choix qu'il a fait des auteurs dont il a voulu composer sa compilation telle quelle. S'il se vouloit réduire selon son titre, à traiter des commentateurs du nouveau Testament, on ne voit pas ce qui l'obligeoit à parler de saint Athanase, de saint Grégoire de Nazianze, et des autres qui n'ont point fait de commentaires, ni des écrits polémiques de ces Pères, ou de ceux de saint Augustin. Si, sous le nom de commentateurs, il veut comprondro tons les auteurs qui ont traité du nouveau Testament, c'est-à-dire, tous les auteurs ecclésiastiques, on ne voit pas pourquoi il oublie un saint Anselme, un Hugues de saint Victor, un saint Bernard, et surtout un saint Grégoire le Grand; d'autant plus que les deux derniers, outre qu'ils ont traité comme les autres la doctrine de l'Evangile, et en particulier les matières sur lesquelles M. Simon a entrepris de nous régler, ils ont encore expressément composé des homélies sur les évangiles, et que d'ailleurs ils méritoient sans doute autant d'être nommés que Servet et que Bernardin Ochin, dont M. Simon nous a donné une si soi

gneuse analyse, encore qu'il n'en rapporte aucun commentaire; c'est-à-dire, que sous le nom des commentateurs, il a parlé de qui il lui a plu : que sous le titre de leur histoire il traite les questions qu'il a en tête en un mot, qu'il dit ce qu'il veut, sans que son livre se puisse réduire à aucun dessein régulier; et si je voulois exprimer naturellement ce qui en résulte, je dirois qu'on y apprend parfaitement les expositions des sociniens, les livres où l'on peut s'instruire de leur doctrine, le bon sens et l'habileté de ces curieux commentateurs, ainsi que de Pélage, chef de la secte des pélagiens, et de tous les autres auteurs, ou hérétiques ou suspects, et qu'on y apprend plus que tout cela comment il faut affoiblir la foi des plus hauts mystères, avec les fautes des Pères (c'est-à-dire, celles que M. Simon leur impute), et en particulier celles de saint Augustin, principalement sur les matières de la grâce, dont notre auteur nous découvre le véritable systême, et fait bien voir à saint Augustin ce qu'il devoit dire pour confondre les pélagiens; en sorte, si Dieu le permet, que ce ne sera plus ce docte Père, mais M. Simon qui en sera le vainqueur. En un mot, ce qu'il apprend parfaitement bien, c'est à estimer les hérétiques et à blâmer les saints Pères, sans en excepter aucun, pas même ceux qu'il fait semblant de vouloir louer. Et voilà, après avoir lu et relu son livre, ce qui en reste dans l'esprit, et le fruit qu'on peut recueillir de son travail.

Si cela paroît incroyable à cause qu'il est insensé, je proteste néanmoins devant Dieu que je n'exagère

rien. Tout paroîtra dans la suite; et pour procéder plus nettement dans cet examen, je me propose de faire deux choses: la première, de découvrir les erreurs expresses de notre auteur sur les matières de la tradition et de l'Eglise, et ce qui tend à la même fin, le mépris qu'il a pour les Pères, avec les moyens indirects par lesquels, en affoiblissant la foi de la Trinité et de l'incarnation, il met en honneur les ennemis de ces mystères : la seconde, d'expliquer en particulier les erreurs qui regardent le péché originel et la grâce, parce que c'est à ces mystères qu'il s'est particulièrement attaché.

DE LA TRADITION

ET DES SAINTS PÈRES.

PREMIÈRE PARTIE,

Où l'on découvre les erreurs expresses sur la Tradition et sur l'Eglise, le mépris des Pères, avec l'affoiblissement de la Foi, de la Trinité et de l'Incarnation, et la pente vers les ennemis de ces mystères.

LIVRE PREMIER.

ERREURS SUR LA TRADITION ET L'INFAILLIBILITÉ DE L'ÉGLISE.

CHAPITRE PREMIER.

La Tradition attaquée ouvertement en la personne de saint Augustin.

Pour commencer par où il commence lui-même, c'est-à-dire, par saint Augustin, il l'attaque sans déguisement, comme sans mesure, dès les premiers mots de sa préface, et il l'attaque sur la matière où il a le plus excellé, qui est celle de la grâce : ce que je remarque ici, non dans le dessein d'entamer ce

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