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» volonté, et ne lui retirez pas votre secours ». Ce jeune homme disoit aussi : « Je suis foible et inca

pable de faire le bien, mais vous pouvez me sau» ver vous, qui tenez tout en votre puissance, ne » permettez pas que je marche dans les voies de la » chair, mais apprenez-moi à faire votre volonté ». Quand le solitaire dit, Apprenez-moi, et que Josaphat le répète, ils ne parlent pas de l'instruction extérieure qui avoit déjà été faite; mais de la doctrine du dedans, par laquelle actuellement on est véritablement enseigné de Dieu, selon la parole de JésusChrist, erunt omnes docibiles Dei, selon le grec docti à Deo, ou docti Dei, didazτoi toŭ Jɛoũ (1), les disciples de Dieu au dedans par l'actuel accomplissement de sa volonté. C'est pourquoi ces deux saints disoient (2) Apprenez-nous à faire votre volonté. C'est toujours l'effet qu'on demande, et on demande par conséquent une grâce qui le donne efficacement; ce qu'on explique par les mots suivans : Quand vous inspirez des forces, les foibles de» viennent forts, puisque c'est vous seul qui donnez » un secours invincible. Fortifiez-moi, afin que je » demeure dans la foi jusqu'à la fin de ma vie, etc. » Tout cela faisoit voir d'où l'on attendoit la persévérance, et par quelle grâce.

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Dans une tentation qui sembloit pousser à bout la vertu : «< O Dieu, disoit Josaphat (3), espérance » des désespérés, et refuge unique de ceux qui sont » destitués de secours, ne permettez pas que l'iniquité me corrompe, ni que je souille ce corps que » j'ai promis de vous garder pur ». Après qu'il eut (1) Joan. vi. 45. — (2) P. 620. · (3) P. 633.

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dit AMEN, et qu'il eut fini sa prière, il sentit, dit Fhistorien, une consolation céleste, et les mauvaises pensées furent dissipées en un moment. L'action de grâces suivoit aussi forte que la demande. « O Dieu, » disoit ce jeune prince, en apprenant la conversion » inespérée de son père (1), qui racontera votre » miséricorde et votre puissance! vous êtes celui qui >> changez les pierres en étangs et les rochers en » ruisseaux. Cette roche, c'est-à-dire, le cœur de » mon père, est devenue une cire molle quand il » vous a plu; et qui en doute, puisque vous pouvez » faire naître de ces pierres des enfans d'Abraham? » Etendez donc sur votre serviteur cette main ou» vrière et invisible qui fait tout achevez de le déli>> vrer, et faites-lui sentir très-efficacement que vous >> êtes le seul Dieu et le seul roi ». Lorsqu'il ajoute (2) : Je vous rends grâces, d'un si soudain changement, ó Dieu, amateur des hommes ; et encore (3): Je vous rends grâces de ce que vous n'avez pas méprisé mes prières ni rejeté mes larmes, et de ce qu'il vous a plu de retirer mon père, votre serviteur, de ses péchés, et de le tirer à vous, qui êtes le Sauveur de tous, il montre quel secours il avoit besoin de demander pour obtenir un si grand effet, et en un mot qu'il ne le falloit ni moins grand ni moins efficace.

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(1) Joan. v1. p. 642. — (2)a P. 643. — (3) P. 645.

CHAPITRE XXV.

Prières dans les hymnes: hymne de Synésius, évéque de Cyrène.

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PARMI les prières des saints, il faut mettre dans les premiers rangs les hymnes qu'ils ont composées à la louange de Dieu. L'Eglise d'Occident a adopté celles de saint Ambroise, de Prudence et de beaucoup d'autres, où nous voyons à chaque vers, qu'on demande à Dieu, non le pouvoir, mais l'effet et le secours qui l'attire, comme on voit dans l'hymne de Tierce, où l'on invoque le Saint-Esprit, afin que bouche, tous les sens, toute la force de l'ame retentissent d'actions de grâces, que la charité s'allume en nous, et que l'ardeur s'en répande sur chain, ce qu'on termine en disant : O Père, accordez-le nous, etc. On n'a qu'à ouvrir le Bréviaire pour trouver dans toutes les hymnes ces prières, où l'on demande l'effet actuel; mais les saints d'Orient ne sont pas moins attachés à ces demandes, que ceux d'Occident. Synèse, évêque de Cyrène, a composé au quatrième siècle des hymnes sacrées, dans lesquelles on trouve, avec le tendre d'Anacréon, la sublimité d'Alcée et de Pindare. Mais sans nous arrêter là, il s'agit d'entendre dire à ce poète céleste : « Découvrez-moi la lumière de la sagesse : donnez» moi la grâce d'une vie tranquille ôtez de mes » membres les maladies et l'emportement désor» donné de mes passions: chassez ces chiens dévo

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>> rans de mon ame, de mes prières, de mes actions: » donnez à votre suppliant une vie innocente, une » vie intellectuelle gardez mon corps sain et mon >> esprit pur : donnez-moi les fruits des bonnes œu»vres : donnez-moi des paroles véritables, et tout » ce qui nourrit l'espérance: accordez, Père cé» leste, à mon ame d'être unie à la lumière primi» tive, et qu'y étant une fois unie, elle ne se replonge jamais dans ces ordures terrestres (1) »; c'est-à-dire, en d'autres termes : donnez-moi le commencement, donnez-moi la fin : « Afin, dit-il (2), » que je sois uni à la source de l'ame, donnez, mon » Dieu, une telle vie, une vie irrépréhensible à » votre poète ».

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Mais de peur qu'on ne nous réponde qu'en demandant le commencement il avoit déjà commencé, puisqu'il prioit, il reconnoît la prière même comme un don de Dieu : « Accordez, dit-il (3), à mon ame, >> que soigneusement gardée (comme sous la clef) » par votre main paternelle, elle vous offre sainte>> ment des hymnes intellectuelles avec la sainte as» semblée qui règne avec nous »; et encore (4) : << Donnez-moi pour compagnie un de vos saints >> anges, benin dispensateur des prières conçues dans » mon ame par une lumière divine ». C'est le secret de la grâce de savoir connoître que lorsque Dieu veut nous exaucer, il inspire premièrement les prières qu'il veut entendre; et ensuite, quand on lui demande, comme fait ce philosophe chrétien, qu'il

(1) Hymn. 11. 318. 111. 320, 329. — (3) Hymn. v. 342. — (3) Hymn. 111, 334.—(4) Hymn. iv. 340.

nous délivre des vices, et qu'il nous inspire la vertu, on impute tout à sa grâce jusqu'au premier com

mencement.

CHAPITRE XXVI.

Hymne de saint Clément d'Alexandrie, et sa doctrine conforme en tout à celle de saint Augustin.

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SAINT Clément d'Alexandrie est celui qui a donné à Synèse, au commencement du troisième siècle, le modèle des hymnes sacrées, dans celle qu'il a composée pour Jésus-Christ à la fin de son Pédagogue. Il la commence par cette prière qui conclut ce livre « Prions, dit-il (1), le Verbe en cette ma» nière : Regardez vos enfans d'un œil propice, di» vin Pédagogue (conducteur des ames simples et » enfantines). Fils et Père, qui n'êtes qu'un Sei» gneur, donnez à ceux qui vous obéissent, d'être remplis de la ressemblance de votre image, et de » vous trouver, selon leur pouvoir, un Dieu benin et » un juge favorable : faites que tous tant que nous » sommes, qui vivons dans votre paix, étant trans» férés à votre cité immortelle, après avoir traversé >> les flots que met le péché entre elle et nous (en >> attendant) nous nous assemblions en tranquillité » par votre Esprit saint, pour vous louer et vous >> rendre grâces nuit et jour jusqu'à la fin de notre >> vie »; après quoi il parle ainsi : « Et parce que » c'est le Verbe notre conducteur qui nous a menés

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(1) Pedag. 1. p. 195,

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