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SUR LA LECTURE

DE L'ÉCRITURE SAINTE.

Ce qu'on doit le plus recommander, c'est la lecture

du nouveau Testament, où il faut avoir une attention particulière aux quatre Evangiles, où sont la vie et la mort de notre Seigneur, qui fait notre exemple et notre salut, avec les propres paroles sorties de sa bouche; et ensuite aux Actes des Apôtres, où l'on voit les commencemens et la fondation de l'Eglise. Dans les Epîtres de saint Paul, on s'attachera principalement aux grandeurs de JésusChrist, et aux préceptes moraux. Les autres Epîtres canoniques sont toutes morales et pleines d'instructions, dont tous les fidèles doivent profiter. Les avertissemens moraux, et les sentimens de piété, d'adoration, d'actions de grâces envers Dieu et envers Jésus-Christ, sont admirables dans l'Apocalypse; c'est à quoi il se faut attacher, sans trop s'occuper l'esprit des mystères de ce divin livre.

Pour ce qui regarde l'ancien Testament, les livres dont tout le monde peut tirer le plus de profit, sont les Proverbes de Salomon, son Ecclésiaste, le livre de la Sagesse, et l'Ecclésiastique.

Pour profiter des Proverbes, et des autres livres de cette nature, où il y a beaucoup de sentences, il est bon de s'en mettre à chaque lecture une ou deux des plus touchantes dans l'esprit; s'en faire

une nourriture, et la règle de ses pratiques pendant la journée.

Il faut apprendre dans l'Ecclésiaste à mépriser tous les biens du monde, et même à mépriser l'homme, selon ce qu'il a de corporel, où il n'est guère élevé au-dessus des bêtes; mais il se doit estimer beaucoup par le rapport qu'il a à Dieu, comme il paroît principalement au dernier chapitre.

On apprend, par la même raison, à mépriser aussi les belles qualités de l'esprit, qui ne se raphuportent pas à cette fin; la science, la sagesse maine, qui, sans la crainte de Dieu, n'est qu'erreur et qu'illusion, et ne produit à l'esprit qu'un vain travail. En un mot, ce livre est fait pour dégoûter l'homme de tout ce qui est sous le soleil; et par-là il est très-propre aux ames retirées du monde. C'est aussi pour cette raison que saint Jérôme le lisoit à sainte Blésille, pour lui en inspirer le mépris ; et il en dédia la version, avec un excellent Commentaire, à sainte Paule et à sa fille sainte Eustoquie, si renommées dans toutes les Eglises pour avoir préféré Bethleem à Rome, et une humble retraite à toutes les grandeurs du monde.

Les histoires de Tobie, de Judith, d'Esther, de Job, et des Machabées, sont très-édifiantes. On peut voir, dans la personne de Judith, les avantages que produisent la chasteté et le jeûne; et dans celle d'Holoferne, les maux où l'on est plongé par l'intempérance.

Il y a des profondeurs dans de certains endroits du livre de Job, qu'il n'appartient pas à tout le monde de pénétrer; et il se faut contenter d'y observer, comme, au milieu des agitations que Dieu permet à l'esprit malin d'exciter dans cette sainte

ame, il revient toujours à Dieu et à sa bonté, où il met son espérance.

Celles qui sont plus versées dans les saintes Ecritures et dans la vraie piété, tireront beaucoup d'utilité de la Genèse, où se voit la toute-puissance de Dieu dans la création de l'univers; la chute de nos premiers parens, et la malédiction du genre humain; sa dépravation punie par le déluge; la voca tion, la foi et l'obéissance d'Abraham; les promesses du Christ à venir, faites à lui et aux patriarches; la foi d'Isaac, celle de Jacob; l'histoire admirable de Joseph, et les témoignages de la providence paternelle de Dieu, et autres choses semblables. On remarquera principalement dans l'Exode, et dans le reste du Pentateuque, l'endurcissement de Pharaon; les bontés de Dieu envers son peuple, avec ses ingratitudes châtiées dans le désert, et les extrêmes rigueurs de la justice divine; les merveilles de Sinaï, lorsque la loi de Dieu y fut publiée, et les autres qui sont racontées dans ces divins livres; avec la sagesse, l'autorité et la douceur de Moïse.

On passera plus légèrement sur les préceptes cé rémoniaux, qui ne regardoient que l'ancien peuple, et n'étoient que des figures et des ombres : et pour la même raison, on pourra se dispenser de la lecture du Lévitique; à la réserve du chapitre xxvi, capable de pénétrer des frayeurs de la justice de Dieu, les ames les plus indociles et les plus rebelles.

On remarquera, principalement dans le livre de Josué et des Juges, la prompte vengeance de Dieu, lorsque le peuple est infidèle; et le soudain retour de ses miséricordes, aussitôt qu'il revient à lui. Il faut observer, dans le livre des Rois la fidélité de Samuel, la punition des facilités et de l'excessive indulgence d'Héli, d'ailleurs très-saint pontife; la

désobéissance et les injustes jalousies de Saül; David, sa clémence, sa fidélité, son péché, sa pénitence; les merveilles du règne de Salomon, et sa chute déplorable, capable de faire trembler les saints; le schisme des dix tribus, l'aveuglement et les malheurs où elles tombèrent pour s'être séparées du peuple de Dieu; les prodiges de la vie d'Elie et d'Elisée; la protection que Dieu donne aux rois et aux peuples, lorsqu'ils sont fideles à sa loi; sa longue patience, et enfin ses rigoureux châtimens. Les livres d'Esdras découvrent le profit que fit le peuple saint des châtimens de Dieu, et les marques de la divine bonté envers ceux qui se repentent.

On pourra se préparer par cette lecture à celle des prophètes, parmi lesquelles les plus touchans sont Isaïe et Jérémie. Les chapitres Ln et LII d'Isaïe contiennent tout le fruit de la passion du Sauveur. Les Lamentations de Jérémie apprennent aux ames chrétiennes, sous la figure de la ruine de Jérusalem, à déplorer leur véritable malheur, qui est celui de perdre Dieu par le péché. On peut laisser les derniers chapitres d'Ezéchiel, depuis le XL. jusqu'à la fin; on pourroit dire depuis le xxxvIII. :\ le reste se lira avec beaucoup d'édification. L'histoire de Susanne, avec la fidélité des trois jeunes hommes, édifiera beaucoup dans Daniel. On ne sauroit trop lire le chapitre Ix, où le mystère de Jésus-Christ est révélé. L'obscurité d'Osée n'empêchera pas qu'on n'en profite beaucoup, si, en laissant les mystères plus obscurs, on s'attache uniquement à ce qui regarde les mœurs, et la vive répréhension que Dieu fait des vices. On en peut dire autant à proportion des autres prophètes..

Pour découvrir le fil de l'histoire sainte, on peut se servir utilement du Discours sur l'Histoire uni

verselle. Le petit récit de la suite du peuple de Dieu, au commencement du second Catéchisme de Meaux, sera aussi fort utile; aussi bien que le Catéchisme historique de M. l'abbé Fleury. Il faut être persuadé que les plus grandes difficultés qu'on trouve dans l'ancien Testament, viennent des mœurs et des coutumes particulières de l'ancien peuple.

On trouvera, en quelques endroits de l'Ecriture, certains récits et certaines expressions, auxquels il n'est pas nécessaire que tout le monde s'attache. Le Saint-Esprit a eu ses desseins en les insérant dans les saints livres; et ces sortes d'expressions tendent toutes, ou à inculquer quelques vérités, ou à inspirer l'horreur des grands crimes. Mais comme elles peuvent faire d'autres effets dans les ames foibles, il faut passer par - dessus légèrement, et prendre bien garde surtout à ne s'y arrêter pas par curiosité; car Dieu frapperoit terriblement ceux qui abuseroient jusqu'à cet excès de sa parole, et qui feroient servir de matière à leurs mauvaises pensées, un livre qui est fait pour les extirper.

Si l'on trouve dans les saints livres quelque chose qui ressente quelque vice ou quelque péché; comme le mensonge, il faut croire, ou que c'est un mystère que tout le monde n'est pas capable de pénétrer; ou en tout cas, que cela ne doit servir ni de règle ni d'excuse; puisque, par un effet terrible de l'infirmité humaine, les saints peuvent avoir fait quelques fautes au milieu de leurs plus belles actions; et que nous ne devons suivre de toutes leurs vies que ce qui est conforme à la loi de Dieu. La plus utile observation qu'il y ait à faire sur la lecture de l'Ecriture, est de s'attacher à profiter de ce qui est clair, et de passer ce qui est obscur, en l'adorant, et soumettant toutes ses pensées au jugement de

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