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dans celle de M. Simon, qui fait semblant de les révérer.

CHAPITRE XIII.

Suite du mépris de l'auteur pour les écrits et les preuves de saint Basile, et en particulier pour ses livres contre Eunome.

Ce qu'il y a de pire en cette occasion, c'est d'affecter de les faire foibles dans tous les écrits où ils défendent le plus fortement la foi de la Trinité. Nous avons vu comme on a traité la docte homélie de saint Basile sur le commencement de l'évangile de saint Jean. Si nous en croyons M. Simon, les livres contre Eunome, qui sont un trésor des passages les plus concluans pour la foi de la Trinité, n'ont guère de fondement sur l'Ecriture. Saint Basile, dit notre auteur (1), lui oppose (à Eunome) de temps en temps des passages du nouveau Testament. Ce n'est que de temps en temps, et à l'entendre ils y sont bien clair-semés; mais cela est faux. Il faut une fois que ce critique, qui avance si hardiment des faussetés, en soit démenti à la face du soleil. Les passages du nouveau Testament sont en si grand nombre, et si vivement pressés dans ce livre de saint Basile, que l'hérétique en est visiblement accablé. Outre ceux qu'il étale plus au long, il y en a quelquefois plus de vingt ou trente si fortement ramassés en peu de lignes, qu'on n'en peut assez admirer la liaison, que ce critique n'a pas sentie.

(1) P. 105.

Encore, si en ôtant à l'Eglise le nombre des preuves, il lui en avoit laissé la force, la foi demeureroit suffisamment établie, et on pourroit bien en croire un Dieu, quand il n'auroit parlé qu'une fois. Mais ces passages, que saint Basile semoit par-ci par-là dans ses discours, sont, dit-il (1), pour la plupart les mêmes qui ont été produits ci-dessus sous le nom d'Athanase. Souvenons-nous donc quels ils étoient, et ce qu'en a dit notre auteur. C'étoient des passages dont nous avons vu que, selon lui, on ne pouvoit rien conclure de clair. C'est ainsi qu'il jette de loin en loin des paroles qui, rapprochées et unies ensemble, comme un hérétique ou un libertin le saura bien faire, laissent les preuves de l'Eglise, non-seulement en petit nombre, mais encore foibles; ce qu'il confirme en ajoutant (2): Que la plupart de leurs disputes (de saint Basile et d'Eunome) roulent sur les conséquences qu'ils tirent de leurs explications ; en sorte qu'on y trouve plus de raisonnemens que de passages du nouveau Testament. Nous examinerons ailleurs ce qu'il ajoute encore un peu après (5) Que cette méthode n'est pas exacte, à cause que la religion sembleroit dépendre plutôt de notre raison que de la pure parole de Dieu. I suffit ici de faire voir que l'esprit de notre critique est de donner un mauvais tour aux preuves des Pères.

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C'est encore une autre malice contre les Pères, de prendre plaisir à relever les défauts qu'on croit trouver dans leurs preuves. Saint Basile, dit notre auteur, se sert aussi de quelques preuves tirées de P. 105. ·(2) Ibid. — (3) P. 107.

l'ancien Testament; (on voit toujours en passant l'affectation d'exténuer le nombre des preuves); mais, poursuit-il (1), il ne suit pas toujours le sens le plus naturel. Il en rapporte un exemple dont je ne veux pas disputer; car il n'est pas nécessaire qu'il n'y ait jamais dans les Pères des preuves plus foibles ou même défectueuses. Ce qu'il falloit remarquer, c'est que pour une preuve de cette nature, les Pères en ont une infinité de si convaincantes, que les hérétiques n'y pouvoient répondre que par des absurdités manifestes. Tout lecteur équitable en portera ce jugement; et sans cet avis nécessaire, les exemples de pareils défauts, dont l'auteur a rempli son livre, ne servent qu'à insinuer le mépris des Pères, et c'est aussi le dessein qui règne dans tout cet ouvrage.

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CHAPITRE XIV.

Mépris de M. Simon pour saint Grégoire de Nysse, et pour les écrits où il établit la foi de la Trinité.

VOILA pour ce qui regarde saint Basile. Saint Grégoire de Nysse, son frère et son défenseur contre Eunome, ne vaut pas mieux; puisqu'encore qu'il soit plus exact et attaché à son sujet dans les douze livres qu'il a écrits contre Eunome, pour la défense de saint Basile, il y conserve néanmoins l'esprit de rhéteur (2). Le voilà donc déjà rhéteur et vain discoureur comme les autres: tachant de persuader ses lecteurs autant par la beauté de son art que par la force de ses raisons. Cet autant enveloppe un peu la (1) P. 105. . (2) P. 114.

malignité de l'auteur; mais au fond c'est trop clairement s'opposer à la vérité, que de choisir constamment et en tant de lieux des paroles pour l'obscurcir.

Poursuivons. Etant orateur de profession, il fait entrer dans tous ses discours les règles de son art (1). On a vu ce que c'est qu'un orateur, dans le style de notre critique; et de là vient, qu'ayant rangé saint Grégoire de Nysse dans cet ordre, il en tire cette conséquence: C'est pourquoi, dit-il (2), il faut lire beaucoup pour y trouver (dans cet ouvrage contre Eunome) un petit nombre de passages du nouveau Testament expliqués. Il se trompe, il y en a un très-grand nombre, ou étalés au long, ou pressés ensemble, comme nous avons dit de saint Basile. Mais l'auteur affecte de parler ainsi, parce qu'il ne nous veut point tirer de l'idée du petit nombre et de la foiblesse des preuves de l'Eglise.

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CHAPITRE XV.

Mépris de l'auteur pour les discours et les preuves de saint Grégoire de Nazianze sur la Trinité.

MAIS saint Grégoire de Nazianze est celui dont on représente les preuves et la méthode comme la plus foible. C'est dans ses Oraisons contre Eunome, qui, comme nous avons vu, ont acquis à ce grand docteur le titre de théologien, à cause qu'il y soutient avec tant de solidité la véritable théologie; c'est, dis-je, dans ces oraisons qu'on le met (1) P. 111. (2) P. 114.

au nombre de ceux qui se contentent des apparences et de l'ombre de la raison (1).

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Il est vrai qu'on tempère, en quelque façon, cette téméraire critique par un quelquefois et un souvent (2). Mais ces foibles corrections ne servent qu'à faire voir que le hardi censeur des Pères n'ose dire à pleine bouche ce qu'il en pense. Car si les preuves de saint Grégoire de Nazianze lui avoient paru concluantes en gros, du moins, en disant que souvent elles sont apparentes plutôt que solides, et que toutes ne sont pas fortes, il auroit dû expliquer qu'elles le sont ordinairement, ce qu'il ne fait en aucun endroit. Au contraire, ce grand personnage est partout, dans notre auteur, un homme qui tremble, qui évite la difficulté Grégoire évite, dit-il (5), de rapporter en détail les endroits de l'Ecriture où il est fait mention du Saint-Esprit : il se couvre en ajoutant, qu'il laisse cela à d'autres qui les avoient examinés. Pour exposer la chose comme elle est, et à l'avantage de ce grand théologien, il falloit dire qu'à la vérité il se remet du principal de la preuve aux écrivains précédens, et à saint Basile, qui avoit écrit devant lui sur cette matière (4); mais que dans la suite il ne laisse pas de rapporter toutes leurs preuves et tous leurs passages d'une manière abrégée, et d'autant plus convaincante. Mais il faut dire encore un coup à notre critique, qu'il ne sent pas ce qu'il lit. Il croit n'entendre que peu de passages de l'Ecriture dans les discours théologiques de saint Grégoire de Nazianze, parce que ce su

(1) P. 124. (2) Ibid. — (3) 124 — (4) Orat. 37.

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