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Je ne puis m'excufer qu'à force de tendreffe,
Qu'en re doublant de föin, d'égard, de politeffe.
Je dois, pour réparer le temps que j'ai perdu,
bas au Marquis.

Ne vous quitter jamais... Fais je bien? Qu'en dis-tu ?
LE MARQUIS bas.

Non, tu t'échauffes trop.

BELFORT bas an Marquis.

Mais l'action l'exige.

à Emilie, lui prenant la main.

Je ne veux plus fonger qu'à vous.

LE MARQUIS.

Plus froid, te dis-je.

EMILIE à Belfort.

Tiendrez-vous parole?

BELFORT lui baifant la main.

Oui, voilà ma caution.

LE MARQUIS le tirant par la manche.
Doucement, vous paffez votre commiffion;
Et ce baifer, morbleu....

BELFORT bas au Marquis

Mais il eft néceffaire.

Je dois le répéter. * Ce garant eft fincere.

*à Emilie, lui rebaifant la main.

LE MARQUIS bas à Belfort.

Pourfui, Boureau; tu ris, tu trouves très-plaifant De m'avoir fait Mari, pour être fon Amant!

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BELFORT.

En ce moment je goûte une joye infinie.
Mais la parta ez-vous ? parlez, belle Emilie.
LE MAR QUI S.

Pour le coup, ton amour auroit tort d'en douter;
Dans les
yeux de Madame, on la voit éclater.

EMILIE.

J'en fais gloire, Monfieur, bien loin que je m'en cache

J'aime trop mon Epoux.

BELFORT.

L'aveu qu'il vous arrache Met le comble à mes voeux, & je ne conçois pas Comment j'ai pû deux jours négliger tant d'appas, Me pardonnez-vous bien un oubli si blâmable ? EMILI E.

Oui, fuffiez-vous encor mille fois plus coupable. Mais laiffons-le paffé; ne fongeons qu'au préfent, LE MARQUIS,

Madame, pour tous deux ce présent est charmant. Pour moi, je vous l'avoue, il eft moins agréable.

EMILIE.

Mais vous le trouveriez en France plus aimable; Mon cœur, pour votre bien, vous y voudroit déja,

LE MARQUIS d'un air piqué,

Rien n'eft plus obligéant pour moi que ce voeu-là : Je vous en remercie, & de toute mon amę.

BELFORT.

Ne parlons que de joye & de plaifir, Madame,
Je veux, ce foir, je veux donner ici le Bal.

Nous l'ouvrirons tous deux.

LE MARQUIS.

Moi, j'y danferai mal.

BELFORT.

Je prétends célébrer cette heureuse journée
Comme le premier jour d'un nouvel hymenée."
J'ai repandu l'ennui fur un front fi charmant;
J'y veux, aux yeux de tous, rappeller l'enjoûment.
Mes torts ont éclaté, l'offense eft folemnelle :
La réparation le doit être comme elle,
Je vais tout ordonner. Souffrez auparavant
Que je vous reconduife à votre appartement.
EMILIE.

Oui, je veux en chemin vous prier d'une chofe,
BELFORT lui donnant la main.

Que de ma volonté la vôtre en tout difpofe.
Adieu, prépare-toi, Marquis, à bien fauter.

SCENE VIII.

LE MARQUIS, LA FLEUR.

LE MARQUIS.

LA cruelle, en partant, ne daigne pas jetter

Un regard feulement fur ma trifte perfonne.
Mais Belfort l'accompagne, & mon cœur en friffonne
Va, la Fleur, fui leurs pas. Imagine un moyen
Pour ramener Belfort, & rompre l'entretien.
LA FLEUR.

J'y vole... Mais, Monfieur, vous les quittez à peine
Quel prétexte, avec eux, voulez-vous que je prenne?
LE MARQUIS.

Quel prétexte, Maraut? Il en eft cent pour un.
Pour me fervir, le Sot, n'a pas le fens commun.
S'il montre de l'efprit, c'est toujours pour me nuire.
Joins Belfort au plus vîte ; & tout bas va lui dire
Que j'ai besoin de lui, qu'à l'instant, dans ces lieux,
Il vient de m'arriver un accident fâcheux,
Dépêche-toi, Maraut, & vole fur les traces.

SCENE IX.

LE MARQUIS feul.

J'AI toutes les rigueurs, il a toutes les graces;

On l'adore, on me hait; on le cherche, on me fuit ;
Quand on ne le voit pas, on se meurt, on languit ;
Et fi-tôt qu'on lui parle, ou qu'il vient à paroitre,
Le mal s'évanouit & l'on fe fent renaître.
On n'a des fentimens & des yeux que pour lui.
Il n'a qu'à dire un mot pour diffiper l'ennui;
Ce feul mot eft payé de mille prévenances,
Et je ne puis avoir les moindres préférences.
Dès que j'ouvre la bouche, on répand froidement
Et toujours pour me faire un mauvais compliment.
Que dis-je ? En çet instant ou je suis à la gêne,
Ou je gémis tout feul & dévore ma peine,
Il la conduit chez elle, il lui donne la main,
Et l'on a des fecrets à lui dire en chemin ?

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