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Et préférablement il doit être choisi. (à Léandre.)

A vos raisons il faut fe rendre.

J'ai mon deffein quand je vous presse ainfi. Moneftime pour vous ne peut trop loin s'étendre. Partons; venez, de ce projet, Léandre, Tout en chemin faifant, vous ferez éclairci.

(ils fortent.)

SCENE II I.

L'EPINE feul.

PAr bonheur, à la fin, mon maître fe dégage

D'un pas qu'il n'avoit pas prévû;

Mais il ne peut long-temps jouer ce perfonnage; Et quelqu'art qu'il emploie, il fera fuperflu. Vifer en même temps à courtiser trois filles

Dans la même maison, du pere étant connu,"

L'une à l'infçû de l'autre,oh,c'eft du temps perdu! Egalement, dit-il, il les trouve gentilles,

Et leurs divers talens le divertiffent fort.

Il voudroit conferver cette bonne fortune.

Vraiment, il n'a pas tout le tort;

Je pense comme lui, trois amusent plus qu'une. Mais c'est trop pour un homme entreprendre à la fois.

On ouvre; les voici qui viennent toutes trois.

Parlons; mais, non, il faut attendre

Que Lucinde foit fans témoin.

Pour épier l'inftant qu'il faudra prendre,

Ecartons-nous, mais fans aller

mais fans aller trop loin.

( il s'en va.)

SCENE IV.

ISABELLE, LUCINDE,

J'Aur

MELANIE.

ISABELLE.

"Aurois, à toutes deux, quelques chofes à dire.

Mon coeur, pour s'épancher, cherche votre en

tretien.

MELANIE.

Je voudrois auffi vous inftruire

D'un grand fecret qui pése fort au mien.

LUCINDE.

Moi, j'ai de mon côté, tout examiné bien;
Une confidence à vous faire.
MELANIE.

Ifabelle, courage, ouvrez-nous votre coeur;
Vous avez parlé la premiére.
ISABELLE.

Je ne me ferai pas beaucoup prier, ma foeur.
Le ridicule hymen qu'a propofé mon pere,
Me force à cet aveu fincére.

L'une & l'autre, écoutez. Dans cet apartement
Nous fommes feules.

LUCIND E.

Oui, dévoilez hardiment.

Vos fentimens à notre vûe.

ISABELLE.

Je ne veux pas au moins que la chofe foit fçûe.

MELANIE.

Votre fecret fera gardé fidélement,

Puifque le nôtre auffi demande un grand filence. ISABELLE.

J'ai, depuis peu de jours, fait, non pas un amant,

Car ce n'eft pas chez moi l'ouvrage d'un

Mais une aimable connoiffance.

moment,

C'est un jeune homme plein d'efprit, Qui joint les agrémens à beaucoup de science, Et fait des vers les plus jolis de France.

Il m'a parlé pour la premiére fois.

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ISABELLE.

Dans un spectacle bourgeois;

Où je l'ai vû jouer la Comédie,

Et la jouer, mais dans un vrai parfait
Même il n'eft rien qu'il ne copie.

Il fait tout ce qu'il veut, l'amoureux, le valet
D'une façon à s'y méprendre.

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Je vous en félicite, Ifabelle, tant mieux,

Il doit vous plaire davantage,

Et rien n'affadit plus qu'un langoureux hom→

mage.

ISABELLE.

Auffi n'eft-il pas de mon goût.

Notre amour pour l'efprit, & pour les vers fur tout, Eft dans le fond le feul noeud qui nous lie:

C'est

S'il recherche mon entretien,

Et fi je préfére le fien,

pour faire tous deux briller notre génie,
Et goûter le fouverain bien

De cultiver la Poësie.

Si je devois pourtant faire choix d'un époux,

J'aimerois mieux, je l'avoue entre nous, Puifqu'il faut que mon cœur fans fard fe montre au vôtre,

J'aimerois mieux que ce fût lui qu'un autre. Mes foeurs, à cet égard, dites, me blâmez-vous?

MELANIE.

Rien n'est plus naturel.

LUCINDE.

Moi, loin que je vous blâme,

Je vous applaudis fort, on ne peut mieux penser, Ma foeur; & fans plus balancer,

Votre exemple m'invite à vous ouvrir mon ame.
Je connois comme vous, depuis fort peu de temps,
Un jeune homme des plus charmans.

Pour les accords il montre un goût extrême;
Ma Mufique eft celle qu'il aime.

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