Savant fans le paroître, il perce en badinant, même! Je dois à son mérite un éloge fi doux. MELANIE. que moi Vous en gardez, ma Soeur, une moitié pour vous. LUCIND E. Au Concert, chez Harmophilete, Notre connoiffance s'eft faite. J'y chantois dans un Concertò. Il me loua beaucoup, & nous nous.fîmes Enfuite il s'approcha; de plus près nous nous vi mes. Nous parlâmes à fonds Mufique, & nous finîmes Par chanter ensemble un duò. On nous battit des mains, & nous nous applaudîmes. Ce n'eft pas, vous le voyez bien, Une ardeur déclarée, une amour véritable, Non, c'est de sentiment un rapport favorable. Et qui forme,entre-nous,un Concert agréable... Ce Concert me le fait traiter comme unami, Comme un foutien de mon parti, Et chérir tout au plus comme un confrere aimable. ISABELLE. La préférence eft jufte & raisonnable. Vous, Mélanie, allons, parlez préfentement, C'eft votre tour. LUCINDE. Suivez ce confeil falutaire, MELANIE. Depuis huit jours auffi j'ai fait la connoiffance Mais à mes yeux ce qui le rend parfait, Ce que j'aime encor plus, c'eft qu'il ne danfe pas Mais en jeune Seigneur qui badine fa Danfe. Ah! comme il coule un pas de menuet! Et d'un Zéphir, c'est le portrait. Dans un tambourin, c'eft l'image Qui brife, qui détruit, bouleverse, ravage; ISABELLE. J'entens, vous l'eftimâtes. MELANIE. Oui, mais ce n'eft pas là le mot. LUCINDE. Moi, j'y fuis, vous le diftinguâtes. Quelque chofe de plus. Quelque chofe de moins. Mon coeur n'est pas fi fot. LUCINDE. Attendez, vous le préférâtes? ? MELANIE. Non, ce n'est pas cela. ISABELLE. Quoi donc, vous le goutåtest MELANIE. Qui, juftement, voilà le mot que je cherchois. C'eft fimplement le pur gout qui nous lie: Qui naît des talens affortis, Et fans troubler nos coeurs, fait unir nós efprits. Elle régne fans tirannie. On n'eft point brûlé de fes feux; Ni liberté, ni larme, ni soupir. Elle fçait nous guider toujours vers le plaifir, Qui méne droit au repentir. Quand on la fuit, quand on l'écoute D'un talent qu'on n'a pas reçu pour l'enfouir, Et notre ame fe livre toute Au foin de l'exercer, de s'en entretenir. ISABELLE. Il eft bon, vous avez bien fait de le faifir. MELANIE. Vous même, en me parlant, n'oubliez pas ce ter me. Il dit ce que je fens, & mon coeur s'y renferme. Faites-y bien reflexion. ISABELLE. Oui, mais votreDanfeur vous paroît bien aimable. MELANIE. Chacun le trouve tel, c'eft fans prévention. Votre Poëte, à vous, vous semble préférable. ISABELLE. Mais je lui rends juftice, & c'est fan's paffion. Du vôtre avec plaifir, vous voyez la préfence, Et fa jambe brillante a pour vous des appas. |