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CLEON..

Il m'arrivera pis demain.

LE BARON.

Laiffez-vous vaincre.

CLEON.

Vous irritez ma peine au lieu de me convaincre.. Je n'ai que deux plaisirs, ne me les ôtez pas; C'eft de pefter tout haut, ou de jurer tout bas.. LISIDOR.

Vous avez choifi là deux plaisirs bien étranges! LE BARON.

Qu'un oncle tel que vous mérite de loüanges! Je ne me laffe pas de le dire. Ma foeur

Vous a-t-elle parlé ?

LISIDOR.

Non, je l'attens, Monfieur.

LE BARON à Cleon.

Sortons. Prenons congé de Monfieur votre frere. (A Lifidor.)

'Adieu, Monfieur, je vois que vous avez à faire. LISIDOR.

Il a beau me louer, c'eft de l'encens perdu ;
Et de fa foeur qui vient, le foin eft fuperflu.

(Il fort avec le Baron.).

SCENE III.

LISIDOR, ISABELL E:

ISABELLE.

L'Heure de ma vifite eft mal prise peut-être.

LISIDOR.

Non, celle où je vous vois ne fçauroit jamais l'être.

Mademoiselle, en quoi puis-je vous être bon ? J'en voudrois de bon coeur trouver l'occafion.

ISABELLE.

Elle s'offre aujourd'hui. Le bonheur de mon

frere,

Puifque j'en dois, Monfieur, faire l'aveu fincere,
Eft en votre pouvoir, & dépend feul de vous.
Votre niece eft l'objet de fes voeux les plus doux;
Il met, à l'obtenir, fagloire la plus grande,
Et je viens de fa part en faire la demande.

LISIDOR.

Le Baron choifit bien. Il ne pouvoit jamais
En de meilleures mains mettre fes interêts.
Sa propofition dans votre bouche aimable
Acquiert à mes regards un poids recommandable;
Cependant quel que foit fur moi votre pouvoir,
Je ne puis décider fi-tôt. Il faudra voir.

ISABELLE.

Mais de tous les partis offerts à votre niece, Mon frere eft le premier par le rang, la richesse; Et ce qui me paroît d'un plus grand prix en foi,

Par fon zèle pour vous qu'il partage avec moi. LISIDOR.

Laiffons fes interêts, parlons un peu des vôtres, Belle Ifabelle; au lieu d'agir tant pour les autres, Ne devriez-vous pas fonger plutôt pour vous. ISABELLE.

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LISIDOR.

Bon, une Demoiselle,

Charmante comme vous, fage, fpirituelle,
Affervit la fortune, & peut tout espérer.
ISABELLE.

Vous le croyez, Monfieur.

LISIDOR.

J'ofe vous l'afsurer.

ISABELLE.

Ce difcours me furprend.

LISIDOR.

La chofe eft très-certaine. ISABELLE.

Si vous continuez, vous m'allez rendre vaine.

LISIDOR.

Votre orgueil en ce point fera des mieux fondés, Et je vous en répons.

ISABELLE.

Et vous m'en répondez !

C'est m'en dire beaucoup.

LISIDOR.

Bien moins que je n'en pense. ISABELLE.

Vous me parlez, Monfieur, avec tant d'assurance Que vous m'embarraffez; mais je me flatte à tort! Eh, qui voudroit de moi dans mon malheureux fort?

LISIDOR.

Quelqu'un, & qui m'eft cher, puifqu'il faut vous l'apprendre,

Eft pénétré pour vous d'une eftime fi tendre
Qu'à fe voir votre époux, fon coeur ofe afpirer:
Je fuis chargé pour lui de vous le déclarer.
Il a de la naiffance, un grand bien en partage,
Il eft d'une humeur douce, à peu près de mon âge.
ISABELLE à part.

C'eft lui-même...

LISIDOR.

Ce mot femble un peu vous troubler?
ISABELLE.

Non, fon plus grand bonheur est de vous reffem

bler,

Et puifqu'il yous eft cher, Monfieur

vez croire

, vous de

Qu'à mériter fon coeur, le mien mettra fa gloire. LISIDOR.

Je fuis flatté pour moi prefqu'autant que pour lui, D'un aveu dont je vais l'informer aujourd'hui, Ne dites rien. Dans peu nous conclurons la chofe.

ISABELLE.

De mon deftin, fur vous, Monfieur, je me re

pose.

K

Mais pour mon frere enfin, ne décidez-vous rien? LISIDOR.

Vous m'occupez vous feule. Adieu, fongez-y

bien.

(Il lui baife la main. )

SCENE IV.

LISIDOR, ISABELLE, LE MARQUIS. LE MARQUIS à Lifidor.

TE vous dérangez point, Monfieur, je me

NE

retire.

LISIDOR...

Je ne me gêne pas. Je n'ai plus rien à dire.

(Il fort.)

SCENE V.

LE MARQUIS, ISABELLE.

PA

LE MARQUIS.

Ardon, fi j'ai troublé cet entretien fi doux:
Mais ces lieux ont fujet de fe plaindre de

vous.

Vos yeux embrafent tout fans diftinction d'âge, Et fans aucun égard au droit du voisinage

Le

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