LE MARQUIS. Pour le coup, je refpire, & la voilà partie. Je ne puis retenir les tranfports de mon cœurs C'est vous, mon cher, mon aimable Docteur; Et je pourrai, dans l'ardeur qui me preffe........ Mais ma bouche en dit trop, & devroit cacher mieux Un fecret..... M. DE LA JOIE. Sur ce point que votre crainte ceffe, Elle ne me dit rien que mon art ne connoiffe: J'ai lû, depuis long-tems, ce fecret dans vos yeux; Les maux, dont j'ai, d'abord, le plus de connoiffance, Sont ceux qui, dans le cœur, cachent leur réfidence Et qui, dans les regards, vont fe peindre en naiffant. E Oui, l'étude des yeux cft ma grande science; Soyez fidelle à garder le filence; C'est notre devoir le plus grand, Un Médecin doit être un difcret confident. Je voudrois bien vous prier de me dire, Dans ceux de la Comteffe? M. DE LA JOIE. Oh! Ses yeux, que j'admire;' Sont un vrai labyrinte où tout mon art fe perd. LE MARQUIS. Comment donc ! Vos clartés font en défaut pour elle ? La chofe ne doit pas vous furprendre fi fort; Les caractéres font brouillés Au point, qu'il faut un an de foins bien redoublés, Et d'étude continuelle, Avant qu'on les ait démêlés. Encore, bien fouvent, aux regards de la Belle, Sommes-nous lourdement trompés; Et, quand elle eft, fur-tout, fage & fpirituelle, Les plus fins y font attrapés: Vous favez, comme moi, que la Comteffe eft telle. Vous auriez, par votre savoir, Puifqu'il faut vous en faire un rapport bien fidelle, Dans fes beaux yeux que je ne comprens pas, De la douceur, de la fierté, De l'Amour, dites-vous ? Quel feroit mon bonheur; Et que d'un feu fi doux je me viffe l'auteur ! M. DE LA JOIE. Mais, afin d'y trouver, vous feul, votre avantage, Que j'ai lûs dans fes yeux d'une Beauté fi fage; La Senfibilité, la Douceur & l'Amour, LE MARQUIS. J'ai fait d'abord, dans le fond de mon ame, Si j'en croyois la voix de l'efpoir qui m'enflâme, . M. DE LA JOIE. Il faut l'en croire. En vérité conftante, 'A quel reméde, donc, comptez-vous recourir ? Mais, au plus fimple, & du plus grand ufage; Qu'en langage ordinaire, on nomme Mariage, Ah! C'est le bien que je fouhaite, Comme le feul qui peut me rendre heureux; Et vous ferez l'auteur, fi vous formez ces nœuds, De ma félicité parfaite. M. DE LA JOIE. Mais, pour vous & pour moi je le dois, je le veux: Travaillent à donner des fujets à la vie, Ou, du moins, pour la maladie, Et a LE MARQUIS. En cette circonftance, Pour fon ami, que n'eft-il auffi fort? que de mon amour il ait la confidence, Il n'en a pas plus de pitié. Je l'ai chargé, tantôt, d'une lettre pour elle, Qu'au foin marqué de m'éviter. Voyez-le, cher Docteur; employez toute chose Eût-il un cœur de fer, j'efpere de le vaincre. Et d'attaquer fon cœur dans les régles de l'art ; C'est ce que je brûle de faire. |