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Vous augmentez fon embarras.

Monfieur s'explique affez, ce difcours doit fuffire; Il paroît très-clair à mes yeux,

Ma chere, & vous devez l'entendre encore mieux.
LE MARQUIS à la Comteffe.

Je vois à vos regards què la chose est obscure,
Et je dois l'exprimer avec plus de clarté.
LA COMTESSE.

Il n'eft pas mal qu'il regne un peu d'obscurité.
LE MARQUIS.

Non, je dois m'affranchir d'une gêne fi dure;
Ma raifon m'autorise à cette liberté.

Eh! Qu'ai-je à craindre, en cette conjoncture,
Quand mes fens font reglés, & mes deffeins conduits
Par la vertu, l'honneur, l'eftime & la droiture ?
Je n'efpere qu'en vous dans l'état où je fuis;
Madame, ayez pitié des peines que j'endure.
LA COMTESSE.

Votre amour à préfent n'a plus rien de fufpect.
Puifqu'il eft fuivi de refpect,

Et que vous defirez que mon fecours l'appuïe,
Je vous promets mes foins auprès de mon amie.
CIDALIS E.

Comteffe, épargnez-moi, vous me faites rougir.
LE MARQUIS.
Non, ne rougiffez pas. La Comteffe s'abuse.

LA COMTESSE.

A quoi bon ce détour, quand je veux vous fervir?

CIDALISE.

Il eft dans fon génie. Aifèment je l'excufe.
LE MARQUIS à la Comtesse.
Mon Billet, fi vous l'avez lû,
Madame, a dû mieux vous instruire.

LA COMTESSE.

Je ne fçai pas, Monfieur, ce que vous voulez dire.
LE MARQUIS.
Léandre, je le vois, ne vous l'a pas rendu.
LA COMTESSE.

Je vous laiffe, Marquis, avec Mademoiselke ;
Votre cœur s'expliquera mieux,
Quand vous ferez feul avec elle.
LE MARQUIS.

Non, ayez la bonté de refter en ces lieux.
Votre frere à propos vient s'offrir à mes yeux;
Je lui veux devant vous, daignez me le permettre,
Demander compte de ma Lettre.

SCENE I V.

LES ACTEURS PRECEDENS,

D1

LEANDRE.

LE MARQUIS.

I moi, je t'en ferai tout-à-fait obligé Qu'as-tu fait du Billet dont je t'avois chargé ?

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LEANDRE bas.

Ce n'eft ni le lieu ni le tems.

LE MARQUIS.

C'est le tems & le lieu de rompre le filence,
Et ta difcrétion se montre à contre-tems :
Il faut devant ta fœur que ta bouche s'explique.

Tantôt.

LEANDRE.

LE MARQUIS.

Non. A préfent. Mauvaise politique.
LEANDRE bas.

Tu t'en repentiras, fi tu me fais parler.
En ami, je te le déclare.

LE MARQUIS.

Je ne puis concevoir ton procedé bifarre!
Mais au point où j'en fuis, rien ne me fait trembler.
Parles, quoiqu'il en foit.

CIDALIS E.

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Mais, puifqu'il veut, Léandre Que vous éclairciffiez la chofe devant nous,

A fon defir vous devez condescendre;

C'est un fecret, pour moi, que je brûle d'apprendre, LEANDRE.

J'ai tort de n'avoir pas rendu fon Billet doux.

?

LE MARQUIS.

Pourquoi ne pas le rendre?

LEANDRE.

C

Appaife ton courroux.

CIDALISE.

C'est un foin que jamais un bon ami, n'oublie.

LEANDRE.

Mademoiselle, excufez, je vous prie,

Je vous l'aurois rendu, puifqu'il étoit pour vous

Mais j'ai cru franchement que vous étiez partie.
LE MARQUIS.

Ah! Quelle trahifon! Je reste confondu.

CIDALIS E.

Pour l'oubli d'une Lettre, il paroît éperdu !
Mais ce jeune homme a des manieres,'

Et des façons d'agir toutes particulieres.
LEANDRE à Cidalife.

Le Billet vous fera fidélement rendu;
Et vous ne perdrez rien, pour avoir attendu.
LA COMTESSE à Cidalife.
Je vous l'avois bien dit, que vous étiez aimée
Je vous en félicite, & j'en fuis très-charmée.
LE MARQUIS.

Madame, encore un coup, votre efprit est déçû:
Impitoïablement, votre frere me jouë.
LA COMTESSE.

Adieu, Marquis. Vous voilà convaincu,
Et de votre choix je vous louë.

CIDALIS E.

(Elle s'en va.)

A ce tendre Billet que je dois recevoir
Si vous voulez que je faffe réponse,
Il faut me l'envoïer ce foir

Je pars demain, je vous l'annonce;

Et vous rifquez, Marquis, de ne plus me revoir.

(Ellefuit la Comtesst.)

SCENE V.

LE MARQUIS, LEANDRE.

LE MARQUIS.

DEs la pointe du jour, ab' Fuffes-tu partie

Pour ne plus te montrer à mes yeux, de ta vie!
Dans la peine où je fuis, je ne me verrois point!
Et toi, cruel ami, parle. Jufqu'à ce point,
As-tu pû, contre moi, pouffer la raillerie ?
Devant ta fœur, encor, tu vas me deffervir.
LEANDRE.

Tu m'y forces toûjouts toi-même;
J'ai pris foin de t'en avertir:

C'est un acharnement qui me fait trop

LE MARQUIS.

fouffrir.

Mais enfin, à ta fœur, par quel caprice extrême

Ne pas

rendre ma Lettre?

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Oh! C'eft ta faute à toi,

D'avoir voulu m'en charger malgré moi.
Je t'ai marqué ma repugnance,
Pour m'acquitter de cet emploi ;

Mais, loin de m'écouter, tu m'as fait violence,
Et tu m'as mis par ta cruelle inftance,

Dans la neceffité de tromper ton ardeur.

LE MARQUIS.

Mais Léandre, d'où vient, à me fervir près d'elle

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