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Province

de Pe-tcheli.

mal-propreté & toutes les incommodités qui réfultent d'un logement bas, humide, refferré, où tous les individus d'une même famille font, pour ainfi dire, entaffés les uns fur les autres, il ne fe forme point de pefte dans le Pe-tcheli, & l'on n'y voit presque aucune de ces maladies épidémiques qui font fi communes en Europe. 2°. Tous les comeftibles fe confervent à Pe-king, pendant un temps affez confidérable, fans être sujets à la corruption: on y mange des raisins frais jufqu'à la Pentecôte, des poires & des pommes jufqu'à la Saint Jean; les fangliers, les cerfs, les daims, les chevreuils, les lapins, les lievres, les faifans, les canards, les oies, & tout le gibier qu'on apporte de la Tartarie à Pe-king, dès le commencement de l'hiver; les poissons de toute espece, qu'on y transporte auffi des rivieres du Leaotong, fe confervent, fans le fecours du fel, dans leur état de congélation pendant deux ou trois mois, quoique chaque jour on les expose au marché, & que chaque jour on les porte du marché dans les maisons particulieres, & des maifons particulieres au marché, jusqu'à leur débit total, qui n'a lieu ordinairement que vers la fin de Mars: il est certain que ces faits annoncent dans l'air une qualité antiputride, qui ne peut être que le résultat de la grande quantité de nitre qu'il contient.

3°. Le nitre n'est pas moins abondant dans la terre qui forme le fol du Pe-tcheli; il fuffit de s'éloigner de Pe-king de deux ou trois lieues, n'importe par quel rumb de vent, pour découvrir des champs entiers qui en font couverts. Tous les matins, au lever du foleil, la campagne, dans certains cantons, paroît auffi blanche que fi une légere couche de neige commençoit à fondre fur fa fuperficie.

En ramaffant avec un fimple balai tout ce qui eft blanc, on en tire beaucoup de kien, du nitre & du fel. On prétend que ce fel peut tenir lieu du fel ufuel; il eft au moins certain qu'à l'extrémité de la province, vers Siuen-hoa-fou, les pauvres & la plupart des payfans n'en emploient pas d'autre. Pour ce qui regarde le kien de terre, on s'en fert pour laver le linge, comme nous nous fervons du favon. Quoique les terres du Pe- tcheli foient chargées d'une grande quantité de parties nitreuses, elles ne forment cependant pas d'arides déferts; on les cultive avec foin, & un travail opiniâtre les force de devenir fertiles; elles gelent en hiver jusqu'à trois ou quatre pieds de profondeur, & elles ne dégelent que vers la fin de Mars, ce qui fuffit pour expliquer comment la gelée tue, aux environs de Pe-king, des plantes que M. Linnæus a élevées dans la Suede, qui eft de près de vingt degrés plus feptentrionale que ne l'eft la capitale de l'Empire Chinois.

ARTICLE II.

Province de Kiang-nan.

KIANG-NAN, qui eft la feconde province de l'Empire, eft, fans contredit, l'une des plus fertiles, des plus commerçantes, & par conféquent des plus riches de la Chine; elle est bornée au couchant par les provinces de Ho-nan & de Hou-quang, au midi par celles de Tche-kiang & de Kiang-fi, au levant par le golfe de Nan-king; le reste confine à la province de Chan-tong.

Les Empereurs ont tenu long-temps leur Cour dans

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de Pe-tcheli.

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de Kiang-nan,

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de Kiang-nan.

cette province; mais des raisons d'État les ayant obligés de s'approcher de la Tartarie, ils choifirent Pe-king pour le lieu de leur féjour. Cette province est fort vaste, elle compte quatorze villes du premier ordre, & quatre-vingttreize du second & du troisieme; ces villes font très-peuplées, & il n'en eft prefque aucune qui ne puiffe paffer pour une place de commerce. Les groffes barques peuvent y arriver de toutes parts, parce que le pays est tout coupé de lacs, de rivieres & de canaux qui communiquent avec le grand fleuve Yang-tse-kiang, lequel traverse la province. Les étoffes de foie, les ouvrages de vernis, l'encre, le papier, & généralement tout ce qui vient, tant de Nan-king que des autres villes de la province, eft beaucoup plus eftimé & plus cher que ce qu'on tire des provinces voisines. Dans la seule ville de Chang-hai & les bourgs qui en dépendent, on compte plus de deux cent mille Tifferands de fimples toiles de coton : la fabrication de ces toiles occupe la plupart des femmes.

On trouve en plusieurs endroits, fur les bords de la mer, quantité de falines, & le fel qu'on en tire se diftribue prefque dans tout l'Empire. Enfin, cette province est fi abondante & fi riche, qu'elle porte chaque année dans les coffres de l'Empereur, environ trente-deux millions de taëls (*), fans y comprendre les droits de tout ce qui entre & fort de la province.

Les peuples de cette contrée font polis & cultivés; ils ont de l'efprit & de grandes difpofitions pour les sciences;

(*) Un taël vaut une once d'argent; cette once, à la Chine, répond à 7 liv. 10 fous de notre monnoie.

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auffi en voit-on fortir un grand nombre de Docteurs, qui ne doivent qu'à leurs talens les places qu'ils occupent. de Kiang-nan. Cette province se partage en deux parties, dont chacune a fon Gouverneur ; celui de la partie orientale réfide à Sou-tcheou-fou, & celui de la partie occidentale à Nganking-fou chaque gouvernement a fous fa dépendance fept fou ou villes du premier ordre.

Kiang-ning-fou ou Nan-king est la capitale de cette province : cette ville, dit-on, étoit autrefois la plus belle & la plus floriffante du Monde ; quand les Chinois parlent de fa grandeur, il difent que fi deux hommes à cheval fortent dès le matin par la même porte, & qu'on leur ordonne d'en faire le tour au galop, en prenant des directions oppofées, ils ne se rejoindront que le foir. On fent que tout cela est exagéré; mais il est certain que Nan-king furpaffe en étendue toutes les autres villes de la Chine. On affure que fes murailles ont de circuit cinq grandes lieues & demie & quatre cent soixante-fix toises (*).

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(*) Voici comment un Miffionnaire François, réceminent arrivé à la Chine, parle de cette cité célebre : » Nous arrivâmes à Nan-king le 2 Juin; je voulus » voir cette ville, qu'on regarde comme la plus grande qui foit au Monde. Le » fauxbourg par lequel nous paffâmes eft très-long, mais il n'eft pas peuplé; fes » maisons font éloignées les unes des autres, ayant entre elles des rofeaux, des » mares d'eau, & des plantations de bambous.......... Ce fut du cinquieme étage » de la tour de porcelaine que nous confidérâmes la ville de Nan-king; nous la » dominions magnifiquement; nous cûmes bean faire, nous ne pûmes jamais » l'eftimer les deux tiers de Paris. Nous ne favions comment concilier ce qu'on dit de fa grandeur immenfe, avec ce que nous voyions de nos propres yeux. » Le lendemain nous tira d'affaire; nous avions déjà fait une bonne lieue au delà » de Nan-king, lorfque nous apperçûmes tout-à-coup les murs d'une ville accolés » à des montagnes & à des rochers : c'étoient les murailles mêmes de Nan-king,

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qui, laiffant la ville où elle eft, s'en vont bien loin lui former une enceinte de » quinze à feize lieues, dont douze ou treize ne font point habitées «

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de Kiang-nan.

cette province; mais des raifons d'État les ayant obligés de s'approcher de la Tartarie, ils choifirent Pe-king pour le lieu de leur féjour. Cette province est fort vaste, elle compte quatorze villes du premier ordre, & quatre-vingttreize du second & du troifieme; ces villes font très-peuplées, & il n'en eft prefque aucune qui ne puiffe paffer pour une place de commerce. Les groffes barques peuvent y arriver de toutes parts, parce que le pays eft tout coupé de lacs, de rivieres & de canaux qui communiquent avec le grand fleuve Yang-tfe-kiang, lequel traverse la province. Les étoffes de foie, les ouvrages de vernis, l'encre, le papier, & généralement tout ce qui vient, tant de Nan-king que des autres villes de la province, est beaucoup plus eftimé & plus cher que ce qu'on tire des provinces voisines. Dans la seule ville de Chang-hai & les bourgs qui en dépendent, on compte plus de deux cent mille Tisserands de fimples toiles de coton: la fabrication de ces toiles occupe la plupart des femmes.

On trouve en plufieurs endroits, fur les bords de la mer, quantité de falines, & le fel qu'on en tire se distribue presque dans tout l'Empire. Enfin, cette province est si abondante & fi riche, qu'elle porte chaque année dans les coffres de l'Empereur, environ trente-deux millions de taëls (*), fans y comprendre les droits de tout ce qui entre & fort de la province.

Les peuples de cette contrée font polis & cultivés; ils ont de l'efprit & de grandes difpofitions pour les sciences;

(*) Un taël vaut une once d'argent; cette once, à la Chine, répond à 7 liv. 10 fous de notre monnoic.

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