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« dont noz avons parler ci-dessus, li uns des plus « grands et dont li segneurs se doivent penre plus près de penre vengance, si est des aliances fetes «< contre segneurs ou contre le commun porfit. »>

Les Etablissements de saint Louis avaient déjà donné pour l'une des bases de la peine l'intérêt de l'exemplarité: << Car li mauvais lessent à mal fere pour la << peur de la paine et li bon pour avoir l'amour de « Dien. >>>

En résumé, les appels, les cas royaux, la prévention et la compétence territoriale; voilà les principes auxquels je reconnais l'idée nouvelle qui s'empare de la répression.

Ce qu'il importe de remarquer, c'est la corrélation intime entre le principe, en vertu duquel la peine est infligée et le mouvement politique.

Lorsque le travail commencé au XIIe siècle par Louis-le-Gros, poursuivi par Philippe-Auguste, saint Louis, Philippe-le-Bel, au XIIIe siècle, eut fait de la royauté, une magistrature suprême, en dehors et au-dessus de la féodalité, un pouvoir central, dont l'action réglementaire, partout présente, s'étendait, sans tenir compte de la diversité des domaines, qui morcelaient la France, sur tout ce qui était susceptible d'être ramené à des conditions de fixité et d'unité, la pénalité a revêtu elle-même le caractère de généralité; elle est devenue un instrument public, une force sociale.

QUATRIÈME LEÇON.

SUITE DES PROLEGOMÈNES.—QUATRIÈME PÉRIODE DU XVI SIÈCLE à 1789.-
Caractère politique de cette période.-La souveraineté royale.-Dans
quels actes cette souveraineté se traduisait-elle ? — Ordonnances, édits,
lettres-patentes, déclarations du roi. — Arrêts du conseil.-En principe
la souveraineté royale était-elle absolue ?-De l'enregistrement des Par-
lements. Des arrêts de réglement. — Principales ordonnances sur le
Droit pénal -Du Droit romain, des Coutumes, du Droit canon comme
sources du Droit pénal.-Indications bibliographiques.
L'idée de vengeance publique domine-t-elle le Droit pénal? — L'idée de
vengeance divine et l'idée d'intimidation ne s'introduisent-elles pas dans la
législation?-Influence de chacun des principes qui animent les sources du
Droit pénal.-Témoignages des faits législatifs.-Témoignages de la science
juridique.-Mouvement philosophique.

MESSIEURS,

Nous avons constaté dans la dernière période des essais et des efforts de centralisation et d'unité; nous avons vu la royauté s'aidant d'institutions générales pour généraliser son action et pour lutter, 1° contre la féodalité à laquelle elle veut reprendre les lambeaux épars de la souveraineté ; 2o contre la suprématie ecclésiastique, à laquelle elle ne veut pas soumettre sa souveraineté politique.

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Mais la période de lutte et de combat doit précéder la période de triomphe et de victoire.

C'est dans la période de triomphe et de victoire que nous entrons; je l'ai appelée la période royale par excellence, la période des ordonnances.

Du XIII' au XVI siècle, je ne vous ai cité que quatre monuments généraux de Droit pénal s'appliquant à toutes les parties du territoire français.

Du XVIe siècle à 1789, nous n'allons plus guère voir, en matière pénale au moins, que des monuments généraux, que des monuments émanés de la souveraineté royale.

La royauté a vaincu la féodalité et conquis son indépendance temporelle; elle a vaincu ou va vaincre même les instruments dont elle s'était servie, à savoir les Parlements, les États-Généraux, les Assemblées des notables, dont elle a bien accepté le secours, mais dont elle ne veut pas subir la domination.

Sur les ordonnances, j'examinerai deux questions: 1o Les ordonnances avaient-elles toutes le même titre et le même caractère?

2° L'autorité législative des ordonnances. quel que fût leur titre, n'était-elle pas subordonnée à l'enregistrement des Parlements?

1° Les ordonnances étaient des lois qui avaient un

PREMIÈRE QUESTION: Les ordonnances se divisaient en ordonnances proprement dites, en édits, en lettrespatentes et en déclarations.

grand caractère de généralité, qui embrassaient un ensemble de matières diverses.

Quant à la forme, les ordonnances commençaient toujours par ces mots: A tous présents et à venir, salut. Elles étaient signées du roi, visées par le chancelier et scellées du grand sceau en cire verte. Leur date, en général, n'indiquait que l'année et le mois; elles étaient rendues avec plus ou moins de solennité: quelquefois par le roi sur les remontrances des EtatsGénéraux, quelquefois par le roi en assemblée des notables, quelquefois par le roi sur l'avis de commissions choisies dans son Conseil et dans le Parlement de Paris, quelquefois par le roi sans aucune de ces garanties, et comme on disait, du propre mouvement du roi.

2o Les édits étaient des lois qui réglaient une matière spéciale, comme le poison, la banqueroute, le rapt, le péculat, le duel; soit que cette matière spéciale n'eût pas été réglée dans les ordonnances antérieures, soit que l'on sentit la nécessité de déroger aux ordon

nances.

Les édits commençaient aussi par ces mots: A tous présents et à venir, salut; ils étaient signés du roi, visés par le chancelier et scellés du grand sceau en cire verte.

La date n'était que l'indication de l'an et du mois. Toutefois, certains édits n'étaient scellés que de cire jaune, et quelques-uns portent la date du jour du mois.

3 Les déclarations du roi étaient des lois interpré

tatives des ordonnances et des édits, ou indicatives des moyens suivant lesquels ces ordonnances et ces édits devaient recevoir leur exécution.

4° Les lettres-patentes n'étaient que par exception des sources de législation; elles n'étaient habituellement que des concessions de grâces, de priviléges à des particuliers, et se terminaient d'ordinaire par ces mots: sauf en autre chose notre droit et l'autrui en toutes; mais aussi quelquefois elles réglaient des points d'intérêt général, soit en créant des dispositions nouvelles, soit seulement en les rappelant. Elles devaient avoir la même formule que les édits et étaient revêtues du même sceau.

Au lieu de commencer par ces mots : A tous présents et à venir, salut; elles commençaient par ceux-ci: A tous ceux qui ces présentes lettres verront. Elles étaient scellées de cire jaune, et la date indiquait non seulement l'année et le mois, mais encore le jour du mois.

5° Les arrêts du Conseil étaient des décisions rendues au nom du roi et réputées son œuvre, bien qu'elles fussent de fait l'oeuvre d'un conseil supérieur divisé en plusieurs bureaux ayant chacun un nom spécial : Conseil d'Etat, Conseil des finances, Conseil privé ou Conseil des parties. Les arrêts de ce Conseil cassant ou révisant les arrêts du Parlement, pour violation des lois du royaume, n'étaient admis comme lois qu'autant qu'ils étaient revêtus des formalités des lettrespatentes, sauf dans les matières de finances ou dans celles qui se rattachaient au domaine du roi, comme le réglement des frais en matière criminelle.

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