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excès de la liberté de la presse périodique dont l'abus était flagrant, et provoqua une loi dans le but de les réprimer. Après le 18 brumaire, Chabot devint membre du tribunat, et y resta jusqu'à sa dissolution. Il travailla dans plusieurs comités de législation, et contribua à la rédaction des différens Codes; il prit une part très-vive à la discussion du Code civil, et fit beaucoup de rapports sur des points importans de la législation. Il embrassa activement la révolution qui mit le pouvoir entre les mains de Bonaparte. Il présidait l'assemblée lors de la communication du traité d'Amiens (le 16 floréal an 10). Ému par cette heureuse nouvelle, Chabot engagea l'assemblée à saisir cette occasion de donner au premier consul un gage éclatant de la reconnaissance nationale, et vota en faveur du consulat à vie, persuadé que c'était le seul moyen de terminer la révolution d'une manière honorable. Ce fut lui qui fut chargé de féliciter Bonaparte à l'occasion du vœu du tribunat. Le discours qu'il lui adressa à ce sujet est remarquable, et on y reconnaît facilement le désir du bien et de la tranquillité, plutôt que celui de plaire à l'homme qu'il haranguait. En effet, après avoir exposé avec éloquence, clarté et précision, l'objet de sa démarche, Chabót ajoute habilement :

<< Bonaparte a des idées trop grandes, trop géné>> reuses pour s'écarter jamais des principes libéraux qui ont fait la révolution et fondé la république. Il >> aime trop la véritable gloire pour flétrir jamais, par >> des abus de pouvoir, la gloire immense qu'il s'est » acquise. En acceptant l'honneur d'être le magistrat suprême des Français, il contracte de grandes obligations, il les remplira toutes. La nation qui l'ap>> pelle à gouverner est libre et généreuse; il respec

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>> tera et affermira sa liberté, et ne fera rien qui ne soit » digne d'elle. Investi de sa confiance entière, il n'usera >> du pouvoir qu'elle lui délègue, que pour la rendre » heureuse et florissante. Il distinguera ses vérita»bles amis qui lui diront la vérité, d'avec les flatteurs >> qui chercheront à le tromper. Il s'entourera des » hommes de bien, qui, ayant fait la révolution, sont » intéressés à la soutenir. Il sentira qu'il est de son » intérêt comme de sa gloire de conserver aux auto» rités chargées de concourir avec lui à la formation >> des lois de l'État, la dignité, la force et l'indépendance >> que doivent avoir les législateurs d'un grand peuple. >> Bonaparte, enfin, sera toujours lui-même ; il voudra >> que sa mémoire arrive glorieuse et sans reproches » jusqu'à la postérité la plus reculée, et ce ne sera jamais de Bonaparte qu'on pourra dire qu'il a vécu » trop de quelques années. »>

A ce langage noble et ferme, qui ne reconnaît l'homme de bien et l'ami de la patrie?

Quand il fut question d'élever Bonaparte à l'empire, Chabot appuya fortement la proposition du tribun Curré; et Carnot lui ayant dit qu'il avait eu une arrièrepensée en votant le consulat à vie, Chabot en convint, et le réfuta remarquablement par la justesse de sa dialectique :

« Oui, dit-il, je le déclare franchement, les propo>>sitions qui vous sont faites aujourd'hui ne sont que » le développement, elles sont la pensée toute entière » de la proposition que je fis le 16 floréal an 10. »>

Admirateur sincère de l'homme extraordinaire qui avait délivré la France de l'anarchie, Chabot proposa au tribunat, dans la séance du 9 nivôse an 14, un arrêté conçu en ces termes :

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«Le tribunat émet le vœu que l'une des principales places de Paris soit appelée place Napoléon-le-Grand, » et qu'il y soit élevé une colonne sur le modèle de la >> colonne trajane, laquelle sera surmontée de la statue » de l'empereur, et aura pour inscription: A Napoléon»le-Grand la patrie reconnaissante. »

Commandant de la Légion-d'Honneur depuis 1804, il fut nommé, en février 1806, inspecteur général des écoles de droit. A la dissolution du tribunat, il fut appelé au Corps-Législatif, dont il cessa de faire partie en mars 1809, époque à laquelle il fut nommé à la cour de cassation. En 1810, il entra au conseil de l'Université.

Considérant que le vrai bonheur des peuples ne consiste pas dans de vaines théories, mais dans des principes certains et invariables, qui sont dictés par une raison éclairée, les divers actes de la vie publique de Chabot, jugés impartialement, sont conçus dans un point de vue identique, et les sentiments conservateurs y dominent. Au retour de Louis XVIII, il conserva tous ses emplois.

Chabot était remarquable par son élocution, par sa clarté dans les discussions, par sa précision dans les idées, par la force de ses raisonnements et par l'impartialité dans ses opinions. Sa vie privée fut aussi remplie que sa vie publique. Toutes deux eussent eu plus d'éclat, s'il n'eût pris soin de les couvrir du voile de la modestie. Simple dans ses mœurs, dans ses habitudes et dans ses goûts, l'amitié ne fut jamais pour lui un vain nom. Il composa son bonheur des services qu'il parvint à rendre et des heureux qu'il put faire. Chabot est mort à Paris le 18 avril 1819, époque à laquelle il présidait un concours ouvert à l'École de Droit pour une chaire de droit romain.

M. Avoine de Chantereyne, qui lui succéda dans cette présidence, rappela, le 22 avril 1819, une phrase du discours d'ouverture prononcé par Chabot lui-même, et la lui appliqua.

La voici : « Les hommes qui, vivans, servirent leur » pays par le noble usage de leurs talens et de leurs » connaissances, sont encore utiles après leur mort » par les exemples qu'ils laissent à suivre. » Trop prompte, hélas! mais bien juste application de cette vérité !

Outre les nombreux discours prononcés par Chabot, nous avons de lui les Questions transiloires sur le Code civil, et le Commentaire sur la loi des successions, ouvrages couronnés d'un succès tellement rare, que tout éloge devient superflu.

A. MAZERAT.

SUR

LA LOI DES SUCCESSIONS".

OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES.

SOMMAIRE.

1. Définition du mot succession.

2. Comment sont déférées les successions?

3. De quoi se compose la succession ab intestat?

4. Pourquoi la loi s'occupe-t-elle de la transmission des biens?

5. Comment, à qui et sous quelles conditions les transmet-elle? 6. De l'ouverture des successions.

7. De la saisine.

8. De la capacité requise pour succéder.

9. De l'indignité.

10. Quels héritiers doivent être appelés?

11. Les parens légitimes seuls portent le nom d'héritiers.

12. Dans quel ordre sont-ils appelés?

(1) (Note de l'auteur.) Mon premier ouvrage sur les Successions fut composé pour un journal judiciaire. Chaque mois, je devais fournir la matière de trois ou quatre feuilles d'impression; et, comme j'avais d'autres occupations obligées, souvent mon travail était fait avec trop de précipitation. Lorsque ensuite j'examinais d'autres articles de la loi, j'apercevais des erreurs ou des équivoques dans ce qui était déjà imprimé; mais il n'était plus possible de les réparer, et il s'y joignait encore une quantité considérable de fautes typographiques. D'après cette explication, il paraîtra sans doute moins étonnant que l'ouvrage, qui parut d'ailleurs presque immédiatement après l'émission de la loi nouvelle sur les successions et qui fut le premier commentaire sur cette loi, contienne un trop grand nombre d'erreurs et d'incohérences. Jusqu'à présent, il a été réimprimé dans le même état et sans aucune espèce de changement, parce que j'avais reconnu la nécessité de le refaire en entier, et que déjà TOM. I. 1

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