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AN. 1080.

VII. ep. 20.

s'excufer d'aller à ce concile de Lyon, fous prétexte de la divifion qui étoit en France; & toutefois il offroit d'aller à Rome. Sur quoi le pape lui répondit qu'il de- v. ep. 121. voit plutôt être jugé dans le pays, où les accusateurs & fes défenfeurs fe trouveroient plus aifément. La lettre eft du troifiéme Janvier 1080. Manafsès ne s'étant donc point préfenté au concile de Lyon, y fut dépofé; & le pape confirma ce jugement au feptiéme concile de Rome, comme il le lui déclara par sa lettre du dixfeptiéme d'Avril, ajoûtant toutefois par grace: Nous vous permettons, jusqu'à la faint Michel, de vous purger avec les évêques de Soiffons, de Laon, de Cambrai, de Châlons & deux autres en qui nous ayons pareille confiance ; à condition que vous rendrez tous les biens à Manafsès, à Brunon & à tous les autres, qui ont parlé contre vous pour la justice; & que dans PAscension vous quitterez Péglife de Reims, & vous vous retirerez, à Clugni ou à la Chaife-Dieu, avec un clerc & deux laïques, pour y vivre régulierement à vos dépens. Et pour vous épargner la peine de venir jusques ici, vous pourrez vous purger devant l'évêque de Die & Pabbé de Clugni.

Comme Manafsès n'executera rien de ce qui lui étoit vIII. epift. 17. prefcrit, le pape le déclara excommunié & dépofé fans 18. 19. 20. efpérance de reftitution. Il en écrivit au clergé & au peuple de Reims & aux évêques de la province, leur ordonnant de procéder à Pélection d'un autre archevêque, du confentement de Pévêque de Die fon légat. Il en écrivit aufli à Ebles comte de Rouci, qui avoit poursuivi la dépofition de Manassès, afin qu'il favorisât cette election; & au roi Philippe, afin qu'il ne lempêchât pas & ne donnât aucune protection à Manassès.

Cc c ij

AN. 1080. Guibert de vita fun, c. 11.

tipape.

1080.

III.

Luc. n. 15.

Ces quatre lettres font du vingt-feptiéme de Décembre 1080. Elles eurent leur effet: car Manafsès voulant fe maintenir à main armée, & continuer à diffiper les tréfors de l'église de Reims, fut chaffé par les feigneurs, le clergé, & les bourgeois ; & étant banni du pays, il se retira auprès du roi Henri, & mourut vagabond &

excommunié.

Quand on eut appris à la cour du roi Henri la nouGuibert élu an- velle excommunication prononcée par le pape contre Ab. Urfp. Chr. lui, dix-neuf évêques de fon parti s'affemblerent à Mayence le jour de la Pentecôte, qui cette année 1080. étoit le dernier de Mai; puis en vertu de leurs lettres, trente évêques & plufieurs feigneurs d'Italie & d'Allemagne affemblez à Brixen dans le Tirol, déposerent Hildebrand, & élurent pape Guibert archevêque de Ravenne, fans qu'il y eût perfonne pour représenter Péglife Romaine que le cardinal Hugues le Blanc. Le Vita S. Anaf décret de cette élection étoit plein de calomnies contre Hildebrand, qu'ils accufoient entre autres choses d'avoir troublé Pempire chrétien, de foûtenir un roi parjure, de femer la difcorde, d'exhorter aux facriléges, Acta ap. Boll. aux homicides & aux incendies. La datte étoit du jeudi vingt-cinquième de Juin. Le roi retourna enfuite chez lui, & Guibert marcha en Italie, revêtu des marques de la dignité papale, & prenant le nom de Clement III. Cependant le pape Gregoire, pour se foûtenir contre che le fecours des le roi Henri, cherchoit l'appui des princes Normands: Sup. lib. LXII. fçavoir, de Guillaume roi d'Angleterre & de Robert 21. 52. v11. ep. 23. duc de Calabre. En renvoyant ceux que le roi avoit

4.3, tom. 17.

IV. Gregoire cher

Normands,

envoyez à Rome avec le légat Hubert, il écrivit à ce prince une lettre bien différente de celles qu'il lui avoit écrites fix mois auparavant. En celle-ci il releve Pamitié

AN. 1080.

qu'il a toujours euë pour le roi Guillaume, & la con-
fiance qu'il a en fon obéiffance & en son secours contre
les ennemis de Péglise : lui promettant non-seulement
la récompenfe éternelle, mais la victoire & la puissance
en ce monde. Cette lettre eft du vingt-quatrième d'A-
vril 1080. & quinze jours après, en renvoyant le légat
Hubert en Angleterre, le pape écrivit encore au même
roi, à la reine Mathilde fon épouse, & au prince Ro- 26. 27.
bert leur fils.

VII. epift. 25.

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to. x. conc.

Quant à Robert Guischard duc de Poüille, de Calabre & de Sicile, le pape entra en conférence avec lui, avec Jourdain prince de Capoue & les autres principaux feigneurs Normands qu'il avoit fi fouvent excommunicz; & il les reçut en grace, moyennant la promeffe qu'ils lui firent de leurs fecours. Nous avons les actes faits avec le duc Robert, par où fon peut juger 250. des autres. Le premier eft le ferment de fidélité à Péglife Romaine, & au pape Gregoire, avec promesse de le défendre contre tous, & de procurer, quand le cas arriveroit, l'élection canonique des papes fes fucceffeurs. La datte eft du vingt-neuviéme de Juin 1080. jour de faint Pierre. Enfuite eft l'inveftiture que le pape Gregoire lui donne de la terre qui lui avoit été accordé les par papes Nicolas & Alexandre : laiffant en furféance ce qui regardoit Salerne, Amalfi & une partie de la Marche de Fermo, que Robert poffedoit injustement, ce que prétendoit le pape. Cet article fait voir combien il étoit pressé de s'accorder avec Robert. Le troifiéme acte, eft la conftitution de douze deniers de cens, que Robert promet au pape pour chaque paire de boeufs de fon domaine, payable à Pâques tous les ans.

à

Mais quand le pape eut appris ce qui s'étoit passé en

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AN. 1080.

vnr. ep. 6.

Allemagne & Pélection de Pantipape, il envoya des légats en Poüille & en Calabre, avec une lettre aux évêques de ces provinces, où il parle ainfi de l'entreprise des fchifmatiques : Ils fe font efforcez de renouveller leur ancienne conspiration, & d'établir sur eux pour antechrift & pour héréfiarque un homme facrilége, parjure à Péglise Romaine, & notté pour ses crimes abominables par tout le monde chrétien, fçavoir, Guibert, qui a ravagé Péglise de Ravenne. Cette affemblée de fatan a été compofée de gens dont la vie eft détestable & Pordination hérétique ; & ce qui les a pouffez à cette fureur, c'est le défefpoir d'obtenir de nous par prieres ou par promeffes le pardon de leurs crimes, fans fe foûmettre à un jugement eccléfiaftique. Nous les méprifons d'autant plus, qu'ils croyent être montez plus haut, & nous efperons voir leur ruine prochaine & la tranquillité de Péglise qui les aura vaincus & confondus. La lettre eft du vingt-uniéme de Juillet 1080.

Peu de jours après il écrivit aux mêmes évêques au fujet de Michel empereur de Conftantinople dépofé deux ans auparavant, que l'on difoit être arrivé en ItaAnna. Comm. lie. Les auteurs Grecs difent, que c'étoit une impostuGauf. Malat. re, & que ce prétendu empereur étoit un moine nom

lib. 1. p. 28.

lib. 3. n. 13.

mé Rector; & l'hiftorien des princes Normands convient qu'il étoit au moins douteux fi c'étoit l'empereur Michel, mais que Robert Guischard le crut ou feignit de le croire, pour avoir un prétexte de faire la guerre à l'empereur Alexis. Le pape exhorte donc les évêques encourager les troupes qui doivent paffer en Grece à cette occafion, & leur donne pouvoir de les absoudre de leurs péchez.

à

Il efperoit d'ailleurs, avec le fécours des Normands

AN. 1080

VIII. ep. 7.

& des feigneurs de Toscane, vaffaux de la princesse Mathilde, aller attaquer Guibert jusques dans Ravenne. C'est ce qui paroît par une lettre adreffée à tous les fidéles de faint Pierre, où il dit : Après le premier de Septembre, quand le temps commencera à fe rafraîchir, voulant délivrer léglise de Ravenne de la main des impies, nous irons, Dieu aidant, en ces quartiers-là à main armée. C'est pourquoi nous vous exhortons à méprifer comme nous leurs vains efforts, vous tenant affurés de leur chûte qui eft proche. Je ne vois pas que le VI. ep. 12. 13pape Gregoire ait effectivement marché en armes contre Ravenne: mais après avoir exhorté au mois d'Octobre le peuple & le clergé de cette ville & les évêques voifins à élire un autre archevêque, enfin au mois de Décembre il leur envoya Richard, qu'il avoit tiré de Péglise Romaine pour le revêtir de cette dignité, & qui ne paroît pas en avoir pris poffeffion.

14.

dolfe.

V.

Brunon.bell. Sa

Cependant le roi Henri entra en Saxe, & il y eut une fanglante bataille fur la riviere d'Elfter dans l'évêché de Mort duroi RoNaumbourg le jeudi quinziéme jour d'Octobre 1080. Les Saxons eurent l'avantage, Henri s'enfuit, son armée fut défaite, & on pilla le bagage, où il fe trouva de grandes richesses, particulierement des évêques qui avoient fuivi le roi au nombre d'environ quatorze. Les Saxons chanterent Kyrie eleifon, comme un cantique de on. p. 105; joie fur le champ de bataille: mais leur victoire devint 1080. Berthold. inutile par la perte du roi Rodolfe qui fut tué en cette journée d'un coup dans le bas ventre. Il eut auffi la main droite coupée : ce que fes ennemis regarderent comme une punition, d'avoir violé le ferment qu'il avoit fait au roi Henri. Ce prince fut extrêmement regreté, principalement des pauvres ; & les Saxons firent

eod.

Abb. Urfp. an.

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