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AN. 1089.

munié au premier dégré Phéréfiarque de Ravenne ufurpateur de l'église Romaine, avec le roi Henri; au fecond rang ceux qui les aident d'argent, de confeil ou d'obéiffance, principalement en recevant d'eux ou de leurs fauteurs les dignitez eccléfiaftiques. Au troifiéme rang, font ceux qui communiquent avec eux : nous ne les excommunions pas nommément, mais nous ne les recevons point en notre fociété fans pénitence, que nous moderons felon qu'ils ont agi par ignorance, par crainte ou par néceffité. Car nous voulons que l'on traite avec plus de rigueur, ceux qui font tombez volontairement ou par négligence, ce que nous laissons à votre difcretion.

Quant aux clercs ordonnez par des évêques excommuniez, nous n'en portons pas encore de jugement, parce qu'il faut un concile général : nous vous répondons toutefois, quant à préfent, que vous pouvez laiffer dans les ordres qu'ils ont reçûs, ceux qui ont été ordonnez par des évêques excommuniez, mais auparavant catholiques: pourvû que ces évêques ne fuffent pas fimoniaques, & que les clercs dont il s'agit n'ayent pas reçu d'eux les ordres par fimonie : pourvû aussi qu'ils foient recommandables par leurs moeurs & leur doctrine. A ces conditions vous pourrez les laiffer dans leurs ordres, après leur avoir impofé la pénitence que vous jugerez convenable. Mais nous ne leur permettons point de monter aux ordres fupérieurs, finon pour une grande utilité de Péglife & rarement. Le pape permet de même pour la néceffité préfente de Péglife contre les fchifmatiques, de laiffer ou rétablir dans leurs fonctions les prêtres & les autres clercs tombez dans le crime : marquant toutefois qu'il ne veut point donner d'atteinte

à l'ancienne difcipline: qu'il ne réhabilitoit jamais les clercs criminels, quelque pénitence qu'ils euffent faite.

Le pape donne enfuite à Gebehard la jurisdiction fur Pifle de Richenou, fauf Pexemption des moines: ausquels il lui commande de donner un abbé catholique, auffi-bien qu'à faint Gal & aux autres monasteres qui en manquent. Il lui enjoint encore de pourvoir aux évêchez d'Aoufte & de Coire, & aux autres où l'évêque de Passau ne pourra venir. Car, ajoûte-t’il, nous lui avons donné, comme à vous, la commiffion de gouverner à notre place la Saxe, PAllemagne & les autres pays voifins afin que vous réprouviez les mauvaises ordinations, que vous confirmiez les bonnes; & que vous régliez toutes les affaires eccléfiaftiques, après avoir pris confeil des hommes pieux, jusques à ce que vous puiffiez recevoir un légat plus particulier du saint fiége. La bulle eft dattée de Rome le dix-huitiéme d'Avril.

:

AN. 1089.

me.

XLVI.

Berthold. an.

Il n'étoit pas aifé de tenir alors le jufte milieu entre la trop grande indulgence, qui eût affoibli la difci-Suite du fchifpline, & la rigueur exceffive qui eût révolté les coupables. Car Guibert & fes fectateurs ne ceffoient de faire des ordinations dans les lieux de Pobéïffance du roi 1089. Henri, & de les vendre bien cher. Ce qui multiplioit tellement le nombre des excommuniez, que les catholiques avoient bien de la peine à les éviter. Le pape Berthold. tint cette année un concile général de cent quinze évêques, où il y a apparence que Pon confirma Pindulgence à Pégard des fchifmatiques; car les Romains chafferent honteufement Guibert, & lui firent promettre par ferment, qu'il n'ufurperoit plus le faint fiége. Il confervoit toujours celui de Ravenne; & dans toutes les char

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tes de cette église il fe nomme Guibert archevêque, AN. 1089. hors une feule, où il prend le nom de Clement; & ce qui eft de plus fingulier, celles où il fe nomme Guibert, font dattées du pontificat de Clement, comme si c'é

to. x. conc. p. 1818.

311.

toit deux hommes différens.

Les deux partis cherchoient à faire la paix, & il y eut Ex Rub. bift. une conférence des ducs & des comtes catholiques, Raven. lib. 5. p. avec l'empereur Henri. Ils lui promettoient leur fecours pour le rétablir dans fon royaume, s'il vouloit abandonner Guibert & reconnoître Urbain ; & il ne s'en éloignoit pas beaucoup : mais il vouloit avoir le confentement des feigneurs de fon parti. Entre ceux-ci étoient les évêques ordonnez par les fchifmatiques, qui voyant qu'ils feroient infailliblement dépofez avec Guibert, détournerent abfolument l'empereur de se réconcilier

avec le

pape.

Pour fortifier d'autant plus le parti catholique, le pape Urbain perfuada à la comteffe Mathilde d'époufer Guelfe fils de Guelfe duc de Baviere, & petit-fils Sup. lib. LXII. d'Azon marquis de Ferrare. Mathilde étoit veuve deBerthold. an. puis treize ans & en avoit quarante-trois : auffi ne fit1089.1095. elle ce mariage que par obéiffance au pape, pour être

n. 32.

XLVII.

de Cantorberi.

mieux en état de foûtenir Péglise Romaine contre les fchifmatiques; & Guelfe protefta depuis, qu'il ne lui avoit jamais touché. Ce mariage affligea fort Pempereur

Henri.

L'Angleterre perdit cette année Parchevêque LanFin de Lanfranc franc, une des grandes lumieres de ce fiécle, le restaurateur de l'Angleterre pour le fpirituel, comme le roi Guillaume le conquérant pour le temporel. Ce prince avoit une telle confiance en lui, que quand il demeuroit en Normandie, il laissoit à Lanfranc la garde de

Vita Lanfr.

6.15.

c. 8.

P'Angleterre tous les feigneurs lui obéiffoient & Pai- AN. 1089. doient à défendre le royaume & y maintenir la paix, fuivant les loix du pays: Lanfranc ne laissoit pas de venir quelquefois trouver le roi en Normandie, comme il fit en 1077. il profita de cette occafion pour revoir Pabbaye du Bec, dont il avoit été tiré ; & il y fut reçu avec la joye que Pon peut imaginer, par le vénérable abbé Helloüin, qui avoit déja été le vifiter en Angleterre. Dans Pune & Pautre vifite Lanfranc oubliant fa dignité, reconnoiffoit toujours Helloüin pour son maître: à Cantorberi il lui rendit tous les honneurs poffibles: au Bec il voulut être traité comme les autres moines; & vécut avec eux en frere : reprenant fon ancienne Vita Herl. fac.6. place de prieur, au lieu de la chaire épifcopale qu'on lui avoit préparée. Il fit la dédicace de Péglise de ce monaftere le vingt-troifiéme d'Octobre 1077.

c. 7.

Ben.par.2.p.354.

20.

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21.21.

L'archevêque Lanfranc rebâtit de fond en comble Vita Lanfr. n. Péglise métropolitaine de Cantorberi, brûlée quelques années auparavant, & répara les lieux réguliers pour les moines qui defservoient cette église. Il bâtit deux hôpitaux hors de la ville; & retira plufieurs terres alienées de fon églife. Il s'oppofa aux vexations d'Eudes frere du roi Guillaume, évêque de Bayeux & comte de Cant; & délivra, non-feulement les fujets de Péglise, mais tous les habitans de la province des exactions induës dont il les avoit chargez. Lanfranc permit à Thomas archevêque d'Yorc de faire ordonner un évêque pour les ifles Orcades, par deux évêques fuffragans de Cantorberi : mais il fupprima le fiége épiscopal de faint Martin aux fauxbourgs de Cantorberi, où toutefois il n'y avoit qu'un corévêque.

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1.31. Lanfr. ep.

1.32.

Nonobftant fes grandes occupations il s'appliquoit à .36.

corriger les exemplaires des livres eccléfiaftiques, parAN. 1089. ticulierement des faintes écritures; & on en trouve encore de corrigez de fa main. Il étoit très-libéral, & fes aumônes montoient par an jufques à cinq cens livres. Il mourut la dixième année de fon pontificat le vingthuitiéme de Mai 1089. Il laiffa plufieurs écrits, dont les principaux font le traité de feuchariftie par Berenger & diverfes lettres. Sa doctrine rendit l'abbaye du Bec une école célébre, & ce fut alors que les Normands commencerent à cultiver les lettres, qu'ils avoient négligées depuis leur converfion fous leurs cinq premiers ducs. Mais on venoit étudier fous Lanfranc des provinces voifines, de France, de Gascogne, de Bretagne, de Flandres. Entre fes difciples les plus fameux furent Anfelme, depuis pape fous le nom d'Alexandre II. Guitmond archevêque d'Averfe, Guillaume archevêque de Roüen, Hernost & Gondulfe évêques de Rochefter, Foulques de Beauvais, Yves de Chartres, & plufieurs autres évêques : fur tout faint Anfelme fon fucceffeur dans le fiége de Cartorberi. *

XLVIII.

Tarragone.

P. 468.

Berenger évêque d'Aufone ou Vic en Catalogne, Métropole de étoit depuis long-temps à Rome, où il pourfuivoit le Marca. Hif. iv. rétabliffement de la métropole de Tarragone. Cette ville, qui fous les Romains donnoit le nom au tiers de PEspagne, avoit été tellement ruinée depuis Pinvasion des Maures, que fon évêché avoit été uni à celui d'Aufone & la province foûmise à la métropole de Narbonne pendant quatre cens ans. Berenger obtint du pape UrAppend. Marca. bain II. une bulle adreffée aux trois comtes Berenger

n. 303.

de Barcelone, Ermengaud d'Urgel & Bernard de Befalu, aux évêques de la province & à tout le clergé & à la nobleffe par laquelle le pape les exhorte à faire tous

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