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langue, & qui y fuis entré tard, ne peut s'inftruire auffi facilement de toutes chofes, qu'un naturel du pays nourri dès Penfance dans la maison. Pour moi jufqu'à Page d'environ trente ans, je n'ai guères fongé qu'aux chofes du monde; toutefois je vous dirai volontiers ce que je fçai.

Ulric continua fon voyage : & étant arrivé à la cour, il lui manqua quelque chofe néceffaire pour le retour: & toutefois il ne put fe réfoudre à rien demander, ni au roi ni à un prélat très-riche, à qui il avoit affaire ; se fouvenant de cette fentence de faint Jerôme, qu'un moine ne doit jamais rien demander, & prendre rarement ce qu'on lui offre. Il repaffa par Hirfauge, comme il avoit promis à Pabbé Guillaume, qui s'étant apperçû de ce qui lui manquoit, n'attendit pas qu'il le lui demandât, & pourvût à tout abondamment. Il lui rendit toutes fortes de fervices, jufqu'à lui faire les cheveux de fa main ; & le pria de Pinftruire des ufages de Clugni. Ulric écrivit depuis fes conversations, & en compofa fon recueil.

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Depuis long-temps il avoit perdu Pufage d'un œil, Vita n. 44& ayant perdu Pautre deux ans avant la mort, il s'appliquoit davantage à Poraison & à la pfalmodie. Saint Hugues ayant appris qu'Ulric étoit devenu aveugle envoya Cunon pour le rappeller à Clugni, voulant lui donner en cet état toute la consolation poffible, & après fa mort enrichir son église des reliques de ce faint homme. Mais Ulric ne voulut point quitter la Celle, & y acheva fes jours dans une grande vieilleffe vers fan 1093. Il avoit fait quelques miracles de fon vivant, & il s'en fit encore plus à fon tombeau. Sa vie fut écrite peu d'années après par un moine de la Celle.

s ff ij

Clugni.

21.

5.

LX.

Vitan. 34.

to. 4. Spicil. p.

v. Mabill. Elog.

Son recueil des coûtumes de Clugni, ne fut pas feuAN. 1091. lement utile à l'abbaye d'Hirfauge, pour laquelle il Coûtumes de avoit été écrit, mais à plusieurs autres monafteres de la haute Allemagne & des autres pays, qui rechercherent cet ouvrage comme un précieux tréfor. Il est divisé en trois livres, à la tête defquels eft une lettre à Pabbé S.Odi. n. 17. fac. Guillaume, où Pauteur fe plaint d'abord d'un abus, qu'il dit être la principale cause de la ruine des monasteres. C'est que les peres qui avoient grand nombre d'enfans, cherchoient à s'en dégager : principalement s'il y en avoit quelqu'un manchot, boiteux ou autrement incommodé. Les maisons remplies de ces invalides, ne peuvent, dit-il, garder aucune régularité, & Pobfervance n'eft exacte que dans celles où le plus grand nombre est d'hommes, qui y font entrez en âge mûr & de leur propre mouvement.

cap. 1.

6. 3. 41.

Le premier livre des coûtumes de Clugni, contient La defcription de Poffice divin; & commence par la diftribution de l'écriture-fainte pour les lectures. Elle étoit à peu près telle que nous Pobservons; mais les leçons étoient bien plus longues, puifque pendant la semaine de la feptuagefime on lifoit la Genéfe entiere. Il est vrai que Pon continuoit au réfectoir la lecture du chœur. Enfin à Pentrée du carême on avoit lû POctateuque, c'eft-à-dire, les cinq livres de Moyfe & les trois fuivans. Ils avoient beaucoup ajoûté à la pfalmodie prefcrite par faint Benoît. Premierement pendant tout Phyver, c'eftà-dire, depuis le premier jour de Novembre jufqu'au jeudi faint, ils difoient avec les nocturnes tous les jours de ferie trente pfeaumes: fçavoir depuis le 119. jusques à la fin du pfeautier. A laudes & à vêpres, en tout temps ils ajoûtoient quatre pleaumes & deux à complies : ̄à

AN. 1089.

c. 6.

prime, ils en ajoûtoient cinq, outre le fimbole Quicum-
que, qu'ils difoient tous les jours, & enfuite de prime
les fept pfeaumes pénitentiels avec les litanies. Je paffe c. 8.c.4.
plufieurs additions moins confidérables, mais il ne faut
pas oublier Poffice des morts qu'ils difoient toute Pannée
& à neuf leçons. On chantoit tous les jours de ferie
deux grandes messes, Pune du jour, Pautre des morts.
Les dimanches on en difoit trois : la meffe matutinale,
qui étoit du jour, la feconde de la Trinité, & la messe
folemnelle. Après la premiere, on faifoit Peau benite,
& on en faifoit lafperfion dans tous les lieux réguliers,
Pinfirmerie, le dortoir, le réfectoir, la cuifine, le cel-
lier. Pendant trois jours de la semaine un côté du chœur
pouvoit communier, & Pautre côté pendant les trois
autres jours, fuivant leur dévotion. On difoit auffi plu-
fieurs messes baffes, mais hors le temps de l'office &
de la grande messe.

c. 9.

C. 10.

c. 6. Lib. 2. 149.

c. 30. p.

Ulric marque enfuite toutes les cérémonies particu- Lib. 1. c. 12. lieres à certains jours, pendant tout le cours de Pannée, commençant au jeudi faint, qui en étoit le plus chargé, & j'en rapporterai ce qui me paroît le plus important. Cette nuit & les deux fuivantes, on lifoit les leçons de Jeremie fans les chanter, comme faifoient les chanoines, & fans nommer les lettres de Palphabet hébraïque. Chacun de ces trois jours on béniffoit le feu nouveau; & tous les freres communioient, fans préjudice du jour de Pâques. Le jeudi on lavoit les pieds à autant de pauvres qu'il y avoit de freres dans la maison ; & l'abbé y en ajoûtoit pour les amis autant qu'il jugeoit à propos. Avant le repas on donnoit à chaque pauvre une oublie en figne de communion.

Le vendredi faint tous les freres s'affembloient nuds

v. Brev. Clun

6. 13.

AN. 1091. pieds dans le cloître, & recitoient tout le pfeautier entre prime & tierce. Leur repas n'étoit que du pain & des herbes cruës, & pour collation ils goûtoient feulement un peu de vin. A ces paroles de la paffion : Ils ont partagé mes vêtemens; deux moines tiroient chacun de fon côté deux pièces d'étoffe de deffus l'autel ; mais Ulric trouvoit ces représentations peu conformes à l'efprit de l'évangile. Il loüe l'abbé Hugues d'avoir retranché de l'office du famedi faint ces mots : O heureufe faute, & péché d'Adam néceffaire : que toutefois nous disons. Ce jour on permettoit de dire des meffes basses après l'évangile de la grande meffe. Le jour de Pâques avoit Brev. Clun. p. fes premieres vêpres entieres & fes vigiles à trois nocturnes, comme l'ordre de Clugni l'observe encore.

C. 14%

c. 15.

422.423.

c. 25. v. feft. mob. Trin. n. 4.

C. 41.

c. 38.

Le dimanche de l'octave de la Pentecôte, on faisoit 3. Ballet fe à Clugni l'office de la fainte Trinité, qui n'étoit encore alors qu'une dévotion particuliere, & qui n'a été reçu par l'église Romaine que fous le pape Jean XXII. plus de deux cens ans après. A la fainte Pierre, qui eft la fête de patron, les nocturnes & les laudes étoient plus longues que la nuit : elles commençoient & finissoient de jour, en forte qu'on ne dormoit point. A l'exaltation de la fainte Croix, on faifoit l'adoration folemnelle, comme le vendredi faint. Entre ces longues prieres, je ne vois point de place pour l'oraison mentale, fi ce n'eft en hyver après les nocturnes, mais chacun faifoit alors ce qu'il vouloit ; & fouvent le fommeil les accabloit. Ulric dit bien que l'on prioit avant chacune des heures de l'office: mais il ajoûte, que cette priere n'étoit ordinairement que le Pater & quelquefois le Credo. La multitude des offices laiffoit peu de temps pour le travail des mains & recommandé dans la regle.

f. 41.

c. 18.

AN. 1091.

c. 30.

lect. p. 84.

Auffi Ulric n'en parle-t'il qu'en paffant; & il avoüe qu'il n'en a guères vû d'autre que d'écoffer des féves, arracher dans le jardin les mauvaises herbes & paîtrir le pain, encore n'étoit-ce pas tous les jours. On pfal- Wreg.t. 1. Anamodioit en allant au travail & en revenant, & pendant le travail même. Dès le temps de Louis le débonnaire, on regardoit le gros travail comme indigne des moines, à cause du facerdoce dont la plûpart étoient revêtus; & c'étoit pour y fuppléer, que fon avoit ajoûté des pfeaumes à toutes les heures de Poffice.

C.3.24.

Dans le fecond livre Ulric parle premierement de Lib. 1. 2m Pinftruction des novices. On leur donnoit Phabit en les recevant, mais ils demeuroient féparez des profez, avec lefquels ils ne fe trouvoient qu'à Péglife. A leur occafion, il parle du silence qui étoit très-exact à Clugni: fur tout après les repas. On ne parloit qu'à certaines heures, fçavoir, entre prime & tierce, none & vêpres, & cet intervalle étoit fouvent très-court. On ne parloit jamais en certains lieux, fçavoir, à l'église, au dortoir, au réfectoir & à la cuisine. Et comme dans ces lieux & ces temps de filence il étoit quelquefois nécessaire de fe faire entendre, on parloit avec les doigts comme les muets, usant de certains fignes établis, dont Pauteur rapporte un grand nombre d'exemples. Enfuite il décrit tout ce que chaque moine devoit faire pendant la journée, depuis fon lever jufques à fon coucher: car toutes ses démarches étoient réglées, même les moindres.

A Poccafion du prêtre femainier, Ulric décrit fort au long les cérémonies de la meffe folemnelle, pour montrer le respect que Pon rendoit au corps de notre Seigneur: mais pour le mieux connoître, il y faut joindre ce qu'il dit ailleurs de la maniere de faire le pain

IL. C. 4.

e. 30.

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