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AN. 1091.
Lib. III. c. 13.

11. 6.30.

P. 146.

P. 149.

Lib. 1. c.35

Dup. iv. Rat. c. 46. n. 7.

Lib.2.c.35.

qui en devoit être la matiere. On ne le faifoit jamais
le dîner on prenoit du meilleur froment,
qu'avant
que
Pon choififfoit grain à grain: on le lavoit foigneu-
fement, & on le mettoit dans un fac fait exprès. Un
ferviteur d'une pureté éprouvée le portoit au moulin,
dont il lavoit les meules, & les couvroit deffus & deffous.
Il se revêtoit d'une aube & d'un amit, qui lui couvroit
la tête & le vifage au-deffous des yeux : il mouloit ainsi
le bled & faffoit la farine. Deux prêtres & deux diacres
revêtus de même d'aubes & d'amits, paitriffoient la
pâte dans de l'eau froide, afin qu'elle fût plus blanche,
& formoient les hofties. Un novice tenoit les fers gra-
vez où on les devoit cuire : le feu étoit de bois fec &
préparé exprès, & on chantoit des pseaumes pendant

ce travail.

Pour le service du grand autel il y avoit deux calices d'or tous les freres offroient leurs hofties, entre lefquelles on en choisissoit trois pour confacrer. A la communion on trempoit le précieux corps dans le fang contre l'usage des autres églifes d'Occident. Les jours de ferie on portoit au réfectoir les hofties offertes & non confacrées, que le prêtre diftribuoit à ceux qui n'avoient pas communié. On diftribuoit de même les nouveaux raifins, que l'on avoit bénis à la meffe à la fin du canon, fuivant l'ancien ufage d'y bénir les fruits.

La nourriture ordinaire des moines étoit des féves & des herbes, avec lesquelles on faifoit cuire du lard, que l'on preffoit enfuite pour en mêler le fuc avec les féves. Cette obfervance étoit ancienne, d'affaisonner Sup. lib. XLVI. les herbes & les légumes d'un peu de graiffe: pour montrer que l'on ne s'abftenoit pas de la chair par superstition, comme les Manichéens. A Clugni on retranchoit

n. 28. 1. c. 44.

C. 49.

cette

1

III. c. 18.21.

cette graisse pendant l'Avent, & depuis la Septuagefi- AN. 1091. me jusqu'à Pâques. Depuis la Quinquagefime on retranchoit encore les œufs & le fromage; & ce jour on donnoit par extraordinaire des œufs épicez, du fruit & des oublies. Les dimanches & les jeudis on fervoit du poiffon, s'il étoit à bon marché, & on donnoit de l'extraordinaire à plufieurs fêtes. On ne permettoit jamais de manger après complies, quelque befoin qu'on en eût.

Dans le troifiéme livre Ulric parle des officiers du monaftere, premierement de Pabbé, & à son occafion des pénitences qu'il avoit droit d'impofer. D'autres pouvoient punir les fautes légeres, dont la pénitence étoit de fe tenir profterné ou appuyé fur les genoux ou les coudes, ou en d'autres poftures pénibles: ne point aller à Poffrande, ni baifer l'évangile, ni recevoir la paix, ni manger avec les autres. L'abbé feul pouvoit punir les fautes griéves; & la pénitence étoit d'être fuftigé en plein chapitre avec des verges: demeurer dans un lieu feparé, y manger & y coucher, fe tenir à toutes les heures à la porte de l'églife. Que fi la faute avoit été commise devant le peuple, la pénitence étoit publique : le coupable étoit fuftigé au milieu de la place, ou pour une moindre faute expofé le dimanche à la porte de Péglife, lorfque le peuple entroit à la messe avec un ferviteur qui difoit la cause de la pénitence à ceux qui la demandoient. Si un moine fe révoltoit contre la correction, les autres fe jettoient fur lui, fans attendre qu'on leur dit ; & le menoient dans la prifon, où on descendoit par une échelle, & qui n'avoit ni porte ni fenêtre : quelquefois même on mettoit aux fers le coupable. L'abbé Hugues difoit, au rapport

Tome XIII.

T tt

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c.7.

c. 8.

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C. II.

d'Ulric, que les monafteres n'étoient point deshono-
rez par
les fautes des moines, mais par leur impunité.
Pour obferver jufques aux moindres négligences &,
les proclamer en chapitre, il y avoit des circateurs ou
furveillans, qui faifoient la ronde par toute la maison
plufieurs fois le jour. En forte qu'il n'y avoit ni lieu ni
moment, où aucun des freres pût fe déranger en sûreté.
Mais ce qu'il y avoit de plus fingulier à Clugni, c'est
Pattention continuelle fur les enfans, qui y étoient éle-
vez. On leur donnoit Phabit si-tôt qu'ils étoient offerts
à Dieu folemnellement suivant la regle; mais on diffé-
roit au moins jusques à quinze ans leur bénédiction
c'est-à-dire, leur profeffion. Ces enfans n'étoient que
fix dans le monaftere, & avoient au moins deux maî-
tres, afin de les garder à vûe & ne les quitter jamais.
Ils avoient un lieu féparé dans le dortoir, & aucun au-
tre n'en approchoit : quelque part qu'ils allafsent,
même pour les actions les plus fecretes, ils étoient tou-
jours accompagnez d'un maître avec un autre enfant.
S'ils faifoient quelque faute à l'office, on les châtioit
fur le champ à coups de verges, mais sur la chemise :
car ils en portoient au lieu de fergettes, & étoient auffi
mieux nourris que les moines. Perfonne n'approchoit
d'eux que
leurs maîtres. Enfin, dit Ulric, voyant avec
quel foin on les garde jour & nuit, j'ai souvent dit en
moi-même, qu'il eft difficile qu'un fils de roi foit élevé
dans fon palais avec plus de précaution, que le moin-
dre enfant à Clugni. Les jeunes profès avoient auffi,
tant qu'on le jugeoit néceffaire, un cuftode ou gardien,
qui ne les quittoit point.

Le chambrier de Clugni gardoit non-feulement les habits, mais Pargent, parce qu'il achetoit tout ce qui

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Sup. lib. XLVL

c. 16.

regardoit le veftiaire. Outre les habillemens marquez
parla regle, ils portoient des pellices ou robes fourrées,
mais de mouton feulement, & des bottines de feutre
pour la nuit, des fergettes & des calleçons : ce qui étoit
permis par la regle d'Aix-la-chapelle, dont les moines ». 28.
de Clugni avoient confervé plufieurs ufages. On rafoit
les moines environ une fois en trois semaines, & pen-
dant cette action on chantoit des pfeaumes. Ils fe bai-
gnoient deux fois Pan, avant Noël & avant Pâques.
Outre les aumônes ordinaires qui étoient de la charge
de Paumônier, le chambrier faifoit celle de l'entrée du
carême, qui étoit accompagnée d'une distribution de
lard ou d'autre viande. Ulric dit, que Pannée qu'il écri-
voit il s'y étoit trouvé dix-fept mille pauvres. Cette en-
trée du carême, ou comme dit Pauteur, le carême en-
trant, fignifie les derniers jours gras.

C. 17.

c. 23.

c. 11. in fin.

Ces coûtumes de Clugni n'étoient pas nouvelles du Sac. 5. ast. Bom temps d'Ulric, il y a apparence que la plûpart s'y obfer- P. 161. voient dès l'origine de ce monaftere; & Jean qui écrivoit la vie de faint Odon vers le milieu du dixième fiécle, en rapporte quelques-unes, particulierement touchant Péducation des enfans & le filence.

Odon abbé

Narrat. to. 12.

Spicil. p. 360.

En ce temps-là fut rétabli le monaftere de faint Mar- LXI. tin de Tournai, par les foins du docteur Odon, qui faint Martin de en fut le premier abbé. Il nâquit à Orleans, & dès fon Tournai. enfance il s'appliqua à l'étude avec un tel fuccès, qu'étant encore jeune il paffoit pour un des premiers docteurs de France. Il enfeigna premierement à Toul : puis les chanoines de la cathédrale de Tournai ly appellerent pour gouverner leur école, comme il fit pendant cinq ans. Il y acquit une telle réputation, que les clercs venoient en troupes pour l'écouter : non-feulement de

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France, de Flandre, de Normandie : mais des pays éloignez, de Bourgogne, d'Italie, de Saxe. La ville de Tournai étoit pleine d'étudians, que fon voyoit difputer dans les ruës, & fi on approchoit de Pécole, on les trouvoit tantôt fe promener avec Odon, tantôt affis autour de lui : & le foir devant la porte de Péglise il leur montroit le ciel, & leur apprenoit à connoître les conftellations.

Quoiqu'il fçut fort bien tous les arts liberaux, il excelloit principalement dans la dialectique, fur laquelle il compofa trois livres ; &'il s'y nommoit Oudart, parce qu'il étoit plus connu fous ce nom, que fous celui d'Odon. Il fuivoit dans la dialectique la doctrine de Boëce & des anciens : foûtenant que l'objet de cet art font les chofes & non pas les paroles, comme prétendoient quelques modernes, qui se vantoient de fuivre Porphyre & Ariftote. De ce nombre étoit Rainbert, qui enfeignoit alors la dialectique à Lisle, & s'efforçoit de décrier la doctrine d'Oudart. Ces deux fectes porterent depuis les noms de Realiftes & de Nominaux.

Oudart n'étoit pas moins eftimé pour fa vertu que pour fa science. Il conduisoit à Péglise ses difciples nombre d'environ deux cens, marchant le dernier, & leur faisant observer une difcipline auffi exacte que dans le monaftere le plus régulier. Aucun n'eût ofé parler à fon compagnon, rire, ou regarder à droit ou à gauche: & quand ils étoient dans le chœur, on les eût pris pour des moines de Clugni. Il ne leur fouffroit ni fréquentation avec les femmes, ni parure dans leurs habits ou leurs cheveux: autrement il les eût chaffez de fon école, ou leût abandonnée lui-même. A Pheure de fes leçons il ne permettoit à aucun laïque d'entrer dans le cloître

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