prêtre dans la forêt de Craon, où il augmenta encore AN. 1096. fes aufterités. Comme on venoit le voir en foule, il convertit grand nombre de perfonnes, & forma une communauté de chanoines reguliers, qui fut Pabbaye de la Roue. Le pape Urbain etant venu à Angers, entendit parler de ce folitaire & voulut Pentretenir. Il le fit prêcher à la dédicace de Peglife de faint Nicolas, où Paflemblée étoit très-nombreufe ; & fut fi content de fon fermon, qu'il lui ordonna d'exercer ce talent & d'aller prêcher par tout. Robert obéit, .quoiqu'avec bien de la peine, & commença à prêcher dans les diocèfes voisins, étant honoré de tout le monde, & faifant un fruit merveilleux. Comme le monaftere de la Roue

XXXV.
Concile de

Roüen.

$99. Ex. Odorico.

Lib. ix. p. 721.

ne fuffifoit pas pour recevoir toutes les perfonnes qui vouloient vivre fous fa conduite, il en fortit par Pordre du pape & par le confeil de Pévêque d'Angers, qui étoit alors Geofroi de Mayenne. Il fe fépara donc de fes chanoines avec bien des larmes de part & d'autre, & prenant avec lui quelques compagnons, il alla répandre de tous côtés la femence de la parole de Dieu.

Pendant le même mois de Février 1096. Guillaume archevêque de Roüen y affembla un concile de fes fufX. Con, fragans. Odon de Bayeux, Gillebert d'Evreux & Serlon de Sées avoient aflifté, comme j'ai dit, au concile de Clermont, avec les députés des autres évêques de Normandie, chargés de leurs excufes; & ils en rapporterent à leurs évêques les lettres fynodales. On examina donc au concile de Rouen les decrets du concile de Clermont, on confirma les ordonnances du pape, & on y fit huit canons. Ils regardent principalement la tréve de Dieu & la liberté de l'églife. La trêve eft perpétuelle à l'égard des églifes & leurs parvis, à Pégard des moi

C. 2.

nes,

c. 3.

nes, des clercs, des religieufes, de toutes les femmes, des pèlerins, des marchands & de leurs ferviteurs : des AN. 1096. hommes & des bêtes fervant au labourage des terres de Péglise & des biens des clercs. On prefcrit une formule de ferment pour l'observation de la tréve, que tous les hommes au-deffus de douze ans, feront obligés de prêter; & on prononce anathême contre ceux qui ne les obferveront pas. Ainfi les évêques s'efforçoient de rétablir peu à peu la sûreté & la tranquillité publique.

c. 8.

6.6.

Edmer. 1. Now

On défend aux prêtres de faire hommage aux laïques, en prêtant ferment entre leurs mains; parce, dit le canon, qu'il eft indigne que des mains confacrées foient mifes dans celles qui font fouillées de crimes. On défend aux hommes de nourrir leurs cheveux : ce qui a rapport à ce que faifoit en même temps faint Anfel- vor. p. 39. me: car il obligeoit les jeunes hommes à couper leurs longs cheveux, à caufe des débauches infâmes qui regnoient à la cour d'Angleterre. Ces canons furent lûs publiquement par Giflebert évêque d'Evreux, furnommé la Gruë, à cause de fa grande taille, & par Fulbert archidiacre de Roüen; & ils furent approuvez par l'archevêque Guillaume & les autres évêques, fçavoir,Odon de Bayeux, Gislebert de Lifieux, Turgis d'Avranches, Serlon de Sées, & Raould de Coutances. Les abbez de toute la province avec le clergé, & une partie des feigneurs étoient préfens. Il est remarquable qu'en ce qui nous refte de ce concile, il n'eft pas dit un mot de la primatie de Lyon.

Concile de Tours, &c.

Au commencement du mois de Mars 1096. le pape xXXVI. vint à Tours & logea à Marmoutier. Le dimanche neuviéme du mois il prêcha fur le bord de la Loire, en préfence de Foulques comte d'Anjou, de plufieurs fei

Tome XIII.

Ffff

AN. 1096.
Sup.lib.xxxIx.

p. 601.

gneurs

& d'une infinité de peuple. Le lendemain il dédia l'églife de Marmoutier. Il vifitoit fouvent celle n. 55. to. x. conc. de faint Martin, & il s'en déclara feul évêque : car elle fe prétendoit depuis long-temps exempte de la jurifdiction de l'archevêque de Tours. La semaine suivante, qui étoit la troifiéme de carême, il tint un concile à faint Martin, où il confirma les décrets de celui de Clermont. Là quelques évêques de France s'efforcerent d'obtenir l'abfolution du roi Philippe : mais les autres s'y oppoferent, & le pape la refufa. Le concile finit le quatrieme dimanche de carême par une proceflion folemnelle, où le pape fe couronna d'une couronne de palmes, fuivant fufage de Rome, & donna au comtę d'Anjou la rofe d'or, que les papes béniffoient ce jourlà. Enfuite il indiqua un autre concile à Arles pour la fin de Juin.

Ordo. Rom.

5.p.876:

Sur la fin de Mars le pape retourna à Poitiers, enfuite il paffa à Xaintes, où il célébra la fête de Pâques, qui cette année 1096. étoit le treiziéme jour d'Avril, Enfuite il vint à Bourdeaux, où le premier jour de Mai il dédia la grande églife: puis à Toulouse, où le vingtquatrième du même mois il dédia Péglife de faint SerCatel. mem.lib. nin. Ifarn étoit alors évêque de Toulouse, & le pape Arn. Verd. t. 1. étoit accompagné de Bernard archevêque de Tolede, Bibl. Lap. p. 799. Sur la fin de Juin le pape vint à Maguelone à la priere de l'évêque Godefroi; & le dimanche jour de S. Pierre, après avoir prêché devant le clergé & le peuple affenblé, il confacra folemnellement toute fille de Maguelone; donna Pabfolution de tous leurs pechez à tous ceux qui y étoient enterrez & qui le feroient à Pavenir, & accorda à cette églife plufieurs autres priviléges. Il étoit affifté en cette cérémonie des archevêques de Pife & de

Tarragone, & des évêques d'Albane, de Segni, de
Nîmes & de Maguelone.

Tandis que le pape étoit
étoit à Montpellier, il examina,
à la priere du roi Philippe, Pélection de Guillaume
pour
févêché de Paris. Il étoit frere de Bertrade, que ce prince
avoit épousée de la maniere irréguliere que j'ai dit, &
n'avoit pas encore tout-à-fait Page pour être évêque:
ce qui rendoit cette élection fufpecte. Toutefois fi-tôt
qu'elle fut faite, Ives de Chartres écrivit au pape, que
Guillaume étoit un clerc de grande efperance, nourri
dans Péglife de Chartres, & ajoûta: Il n'a rien voulu
faire en cette rencontre fans notre conseil; c'est pour-
quoi nous avons envoyé avec lui quelques-uns de nos
freres pour s'informer foigneufement s'il avoit toutes
les voix, & fi cette élection s'étoit faite moyennant de
Pargent, ou avoit été extorquée par quelque violence
du roi. Comme ils nous ont rapporté que tout s'étoit
bien paffé, nous avons confeillé à notre frere de con-
fentir à Pélection, & ne fe pas fouftraire à Pordre de
Dieu; car nous craignions, que quelqu'un ne vînt à la
traverse s'ingérer par fimonie. Quant au défaut de fon
âge, nous lui avons confeillé de garder les interftices
convenables dans fa promotion aux ordres; & cepen-
dant de vous demander difpenfe de ce qui pourroit
manquer à la régularité de fon ordination. Je vous prie
de ne point écouter ceux qui voudroient lui rendre de
mauvais offices auprès de vous; & de nous prescrire vous-
même, comment cette affaire peut être terminée à votre
fatisfaction. Ce témoignage d'Ives de Chartres étoit
d'autant plus fort, que ce prélat s'étoit plus déclaré

contre Bertrade.

AN. 1096.

Le pape donc étant à Montpellier, & ayant examiné Ivo.ep.50 Ffff ij

cette élection, commit Ives de Chartres, qui étoit alors AN. 1996. auprès de lui, pour la difcuter plus amplement. Ives étant de retour, fit venir devant lui les chanoines de Paris; fçavoir, le doyen, le chantre & un archidiacre : qui jurerent au nom de tous, que dans Pélection de Guillaume il n'y avoit eu ni crainte du roi, ou de la prétendue reine, ni fimonic. C'eft pourquoi il ordonna de la part du pape à Richer archevêque de Sens, de le facrer avant la faint Remi: lui permettant de porter le pallium en cette cérémonie, quoique Pusage lui en fût interdit, à caufe de fon refus de fe foumettre à la primatie de Lyon. Cet ordre fut exécuté, & dans le temps marqué Guillaume fut facré évêque de Paris.

Id. ep. 54.

XXXVII.

Concile de Nif

mes.

Spicil.to.4.p.234.

Le pape étoit à Nifmes au commencement de Juillet, & y célébra le concile qu'il avoit indiqué pour être tenu to. x. p. 605. à Arles. Il y étoit affifté de étoit affifté de quatre cardinaux : Gautier évêque d'Albane, Gregoire de Pavie, Jean diacre, Albert prêtre. Entre les évêques on marque Daïbert arche▾ vêque de Pife, Hugues de Lyon, Amiat de Bourdeaux, Bernard de Tolede, Hugues de Befançon, Brunon évêque de Segni & Bertrand de Nifmes. Ce concile fit feize canons, qui ne font la plupart que ceux de Clermont, que le pape confirma & publia dans tous les conciles to. v. conc. p. qu'il tint enfuite. Le plus fingulier du concile de NifSup. lil, xxxvII. mes, eft celui qui maintient les moines dans le droit n. 4. Dam. opufc. d'exercer les fonctions facerdotales: c'eft le même mo

1618.

XXXVIII

Can. 3.

pour mot qui eft attribué au pape Boniface IV. par faint Pierre Damien, dans un traité où il foûtient ce droit des moines, & on rapporte ce décret au concile de Rome de Pan 610. mais le ftile convient mieux au temps d'Ur bain II. Voici la fubftance de ce décret.

Quelques ignorans pouffez d'un zéle amer affurent,