jestés royales et impériales ? Comme autrefois , les familles abjectes, ou dépravées par la misère. Ceux dont on n'a pu tirer un bottier ou un coiffeur, on en tire des princes par douzaines, des généraux , des poètes, des orateurs, des ambassadeurs, un César ou un Cicéron, ce qu'on désire. N'étant propres à rien, on les juge propres à tout. Et que les acteurs de génie soient rares , étonnez-vous donc ! Il arrive chaque jour que le représentant d'un Tasse ne sait pas un mot de l'histoire de son personnage, et moins encore la langue qu'il parle, et moins encore son orthographe. Il joue au petit bonheur, et Dieu protége le héros ! Il est des exceptions, je le sais; on rencontre dans les coulisses des paissances honnêtes, des éducations brillantes, des manières élevées. Mais si jamais l'exception a prouvé la règle, je le revendique pour le cas présent. Qu'est-ce, sinon d'estimables jeunes gens que leur goût pour cet art a perdus, disons le mot? Combien , pour s'appeler Agamemnon, Arcas ou Clytemnestre, ne sont pas obligés d'abord de dépouiller leur pom véritable , le nom de leur vieux père qui rougirait jusqu'aux larmes de le découvrir sur l'affiche ! S'il en existe d'autres qui, partis de bas, soient parvenus à comprendre les singựlières difficultés de leur position , ça été à force d'études et d'expérience, et par un privilége particulier de l'intelligence qui était en eux. La première leçon de leur talent a été de leur apprendre qu'il fallait tendre sans relâche à devenir des Talma, ou se résoudre à demeu: rer des saltimbanques chargés du mépris universel; perspec: tive plus rude qu'encourageante ! Voilà pourtant ce qu'a fait la loi d'un peuple guerrier, transplaņiée et inflexiblement déduite jusqu'ici chez un peuple qui se pique de n'étre pas moins grand dans les arts que dans les combats. De cette disposition première sont nés tous les dangers, tous les malheurs que déplorent Bossuet et Rousseau, que nous déplorons nous-mêmes, mais pas stérilement, ou pour en forger des armes contre d'innocens plaisirs. L'avenir, du reste, pous rassure. Il s'opérera pour ·les comédiens le même mouvement juste et salutaire qui s'est opéré pour les gens de lettres. Et il n'en saurait arriver autrement, si, comme nous en sommes convaincu, la nouvelle société, qui est en fusion dans toutes les têtes, tend à s'organiser sur des bases plus larges et d'après des lois entièrement sympathiques à l'intelligence et au travail. Chaque jour notre code se dépouille de son enveloppe romaine; un esprit nouveau le pénètre. Le christianisme lui-même, arrivé à une époque difficile, après être sorti, comme toutes les grandes choses, plus grand de la lutte, entre dans les voies d'une transformation. Ces innombrables et ridicules essais de religion, dont nous sommes témoins depuis quelque temps, ont abouti à ramener à l'éternelle loi les esprits abusés, à tuer l'indifférence, à réveiller en faveur des doctrines catholiques le zèle et l'ardeur de l'étude égarée à de vaines recherches. La société peut se renouveler; le pivot qui la porte depuis dix-neuf siècles la portera pendant autant de milliers d'années. Dieu a fait sa loi assez souple pour rejeter et recevoir toutes les constitutions humaines. Qui båtit en dehors de ce cercle båtit pour les fantômes. Aussi la religion du Christ restera la religion de la nouvelle société. Il ne sera rien fait que par elle. Les réformes, elle les adoptera, les sanctionnera, et si l'on veut les rendre populaires, il faudra qu'on ait recours à sa parole, qui frappe à la fois aux deux bouts du monde. Elle achevera l'euvre de son divin maître; toutes ces victimes du démon du préjugé, elle les rachetera ; et comme elle réserve à tous une part dans le royaume des cieux, elle donnera à chacun ici-bas la dot que le Seigneur lui a préparée. Louis de MAYNARD, ESSAIS DE POÉSIE ÉTRANGÈRE. SUR UN TOMBEAU (). Dors bien, dors bien , ami, dans ta funèbre couche ! Hélas ! ami, ne le sent plus. Dors doucement et bien! L'épaisse couverture Dors, mon ami! Mon ami, dors ! (1) Cette pièce est traduite d'un recueil de poésies allémaniques de S.-P. Hébel, pasteur protestant à Larrach, village situé dans l'espèce de delta formé par le Rhin au-dessus de Bale. Toutes ses poésies se font remarquer par la simplicité naïve des détails, et par la peinture la plus exquise de la nature, Dors doucement et bien ! Mais, hélas ! dans ta tombe Redire ma prière à Dieu ! Mais dois-je désirer que tu puisses m'entendre? Oh! quel bonheur serait le mien ! Tu dors, et n'entends pas au clocher du village Dans le bameau silencieux. Et quand , dans le ciel noir, du sein d'un lourd nuage Et pourtant ne t'éveille pas. Nous, dès les premiers feux dont resplendit l'aurore , Du muet séjour du tombeau. Oh! tu te trouves bien sous ta tombe feorie! (*) L'horloge. Et tout ce qui jadis, comme un rêve fatal, Ami, ne te fait plus de mal. Et si, dans ce tombeau , sous cette pierre sombre, Puisse consoler ma douleur. Mais bientôt du Dien bon la volonté profonde Ami, tout à côté de toi. Et quand Dieu de mes jours anra tranché la trame, Près de toi je viendrai dormir. Et je n'entendrai plus au clocher du village Tu te leveras avec moi; Et quand l'aube, dorant le sommet des montagnes, Nous marcherons, le front serein. |