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jolie lettre du monde, que vous m'avez écrite, trop flateufe pour l'écouter, trop brillante d'imagination pour me hazarder à y faire une réponse en forme, qui ferait indigne peut-être d'un élève de Chapelle, à qui vous pourriez la montrer dans le commerce étroit où je vous vois avec lui quarante ans après fa mort.

Mais fi je me défie de mon efprit, je fuis toujours für de mon cœur; & je vai répondre au fentiment d'eftime & d'amitié que j'ai pour vous, dont vous me demandez une marque effentielle, qui eft de vous dire avec la fincérité dont je fais profeffion, ce que je penfe de la petite affaire dont vous me faites ouverture &c. A Paris ce 26. Juillet 1717.

A MON

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Déeffe de la fanté,

Fille de la fobriété,

Et mère des plaisirs du fage,
Qui fur le matin de notre âge
Fais briller ta vive clarté,
Et répans ta férénité

Sur le foir d'un jour plein d'orage.
O Déeffe, exauce mes vœux ;

Que ton étoile favorable

Conduife ce mortel aimable:

Il eft fi digne d'être heureux.
Sur Hénaut tous les autres Dieux
Verfent la fource inépuisable

De leurs dons les plus précieux.
Toi, qui feule tiendrais licu d'eux,
Serais-tu feule inéxorable?

Ramène à fes amis charmans,

Ramène à fes belles demeures

Ce bel-efprit de tous les tems,
Cet homme de toutes les heures.
Orne pour lui, pour lui fufpens
La courfe rapide du tems,

Il en fait un fi bel ufage:
Les devoirs, & les agrémens,
En font chez lui l'heureux partage.
Les femmes l'ont pris fort fouvent
Pour un ignorant agréable;
Les gens en us pour un favant,
Et le Dieu joufflu de la table
Pour un connaiffeur fi gourmand.
Qu'il vive autant que fon ouvrage ;
Qu'il vive autant que tous les Rois,
Dont il nous décrit les exploits,
Et la faibleffe & le courage,
Les mœurs, les paffions, les loix,
Sans erreur & fans verbiage.
Qu'un bon eftomac foit le prix
De fon cœur, de fon caractère १
De fes chanfons, de fes écrits.
Il a tout, il a l'art de plaire,
L'art de nous donner du plaifir
L'art fi peu connu de jouïr:
Mais il n'a rien s'il ne digère.

Grand DIEU, je ne m'étonne pas,
Qu'un ennuyeux, un Des Fontaine
Entouré dans fon galetas

De

De fes livres rongés des rats,

Nous endormant, dorme fans peine,
le bouc foit gros & gras.

Et que

Jamais Eglé, jamais Sylvie,
Jamais Life à fouper ne prie
Un pedant à citations,

Sans goût, fans grace & fans génie;
Sa perfonne, en tous lieux honnie,
Eft réduite à fes noirs gitons.

Hélas! les indigeftions

Sont pour la bonne compagnie.

Après cette hymne à la fanté, que je fais du meilleur de mon cœur, fouffrez, Monfieur, que j'y ajoute mentalement un petit Gloria Patri pour moi. J'ai autant befoin d'elle que vous; mais c'était de vous que j'étais le plus occupé. Qu'elle commence par vous donner fes faveurs comme de raifon; buvez gaîment, fi vous pouvez, vos eaux de Plombières; & revenez vîte à Cirey avant que les Huffards Autrichiens viennent en Lorraine. Ces gens- là ne font boire que des eaux du Styx. Souvenez-vous que dans la foule de ceux qui vous aiment il y a deux cœurs ici, qui méritent que vous vous arrêtiez fur la route.

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A MON

A

MONSIEUR

DE FONTENELLE.

L

De Villars, le 1. Septembre 1720.

Es Dames, qui font à Villars, Monfieur, fe font gatées par la lecture de vos Mondes. Il vaudrait mieux que ce fût par vos églogues, & nous les verrions plus volontiers ici, bergères, que Philofophes. Elles mettent à obferver les Aftres un tems qu'elles pourraient beaucoup mieux employer; & comme leur goût décide des notres, nous nous fommes tous faits Phyficiens pour l'amour d'elles.

Le foir fur des lits de verdure,
Lits que de fes mains la Nature,
Dans ces jardins délicieux,

Forma pour une autre avanture,

Nous brouillons tout l'ordre des Cieux;

Nous prenons Venus pour Mercure;

Car vous faurez qu'ici l'on n'a,

Pour examiner les planètes,

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