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§. 15.

Caufes qui font effaimer les Ruches; celles qui retardent la fortie d'un Effaim, ou qui empêchent certaines Ruches fortes d'effaimer: moyens de fuppléer à ce défaut, en les partageant: moyen unique de conferver fes Ruches, & d'avoir de bons Effaims.

'Empreffement d'un Effaim à quit ter la Ruche qui lui a donné l'être, n'eft point une fuite de la légereté des Abeilles, ou d'un efprit d'indépendance. L'impoffibilité feule de refter enfemble plufieurs ménages & plufieurs Maitreffes, forcent les Abeilles à prendre ce parti. Leur grand nombre, joint à la chaleur de la faifon, en produit une infupportable dans la Ruche, qui les détermine à fe féparer : elles n'attendent pas pour cet effet, le temps de la Canicule : comme le fort de la Ponte eft au printemps, la naiffance d'un Effaim qui remplit la Ruche en peu de temps, joint à la chaleur, fuffit pour les y obliger. Des temps froids & pluvieux, des printemps rigoureux

retardent fouvent leur départ : les dif férentes pofitions, auffi-bien que la variété des climats, produifent encore des changemens dans chaque Province.

Cependant il faut convenir que la chaleur n'est pas toujours un des motifs qui oblige les Effaims de prendre l'effor, l'instinct naturel les y porte: cela est fi vrai, qu'une même Ruche qui fe trouve bien au large, par la fortie d'un premier Effam toûjours très-nombreux, en jette fouvent dans le même mois un fecond & un troifiéme ; & ce dernier la dégarnit au poinct de ne pouvoir paffer l'hiver fuivant, fi l'on n'a pas l'attention de la renouveller de la maniére que je le dirai au Paragraphe 18e.

Le mauvais temps peut retarder la fortie d'un Effaim de huit jours. Souvent même il l'oblige après avoir pris l'effor en tout ou partie, ou s'être déja fixé, à retourner auffi-tôt ou peu après dans fa Ruche. Ces accidens peuvent encore venir de la foibleffe de la jeune Reine, qui ne s'eft pas trouvée affez vigoureuse pour fuivre fa Colonie, ou d'un deffein d'éprouver fes forces, pour aller au loin fe loger dans un endroit

commode, qu'elle aura fait reconnoître quelque temps auparavant par des Députés.

Ce n'est point ici une fiction à plaifir, & quantité d'Obfervateurs ont vu avec furprise, un Effaim effayer fes forces aux environs de fa Ruche pendant quelques minutes, fe repofer même fur une branche & reprendre peu après fon effor, pour fe rendre en droite ligne dans des trous d'arbres, ou des creux de murailles, dans lefquels ils en avoient vu fortir & rentrer un certain nombre quelques jours auparavant.

Il arrive encore que fur un grand nombre de Ruches, on n'a que peu ou point d'Effaims. Cet accident réfulte fouvent de l'intempérie du printemps & de l'été, qui font dans de certaines années très-défavorables aux Abeilles, par des froids ou des pluies d'une trop longue durée. Ces froids & ces pluies empêchent en partie, ou retardent la naiffance & la perfection du Couvain; & fur-tout celle de la Reine, fans laquelle il n'y a nulle Colonie à espérer.

Mais lorsqu'on voit que la faifon eft

avancée, & qu'une Ruche ne jette point d'Effaim, quoiqu'elle foit confidérablement garnie de Mouches, c'est une marque affez certaine qu'il ne s'y trouve point de jeune Reine en état de fe mettre à fa tête. Alors, fi l'on n'y apporte pas de remède, il arrive quelquefois qu'une Ruche auffi forte périt l'hiver fuivant, parce que la plupart des jeunes Abeilles qui s'attendoient à aller fonder un nouvel établissement, ne travaillent que fort peu à remplir les magafins publics, qu'elles ne regardent pas comme les leurs; enforte que cette Ruche fi peuplée périt par le grand nombre d'Abeilles qu'elle con

tient.

Le feul remède que je connoiffe & qui m'ait réuffi, eft de prendre le foir une Ruche compofée de quatre hauf

fes

pour le moins; on en détache les deux fupérieures, que l'on fépare de *celles de deffous, & on les écarte autant que faire fe peut l'une de l'autre, en prenant la précaution de mettre fous chacune une hauffe vuide.

Il faut examiner enfuite pendant quelque temps ce qu'elles font: fi elles continuent leur rumeur ordinaire, dans

l'une comme dans l'autre, & qu'elles fortent & rentrent comme de coutume, on peut être affuré qu'il y a une Mere-Abeille dans chaque Ruche, ou du moins un Œuf ou Embryon de Mere, qui fuffit pour les y faire refter.

Si au contraire il ne fe trouve pas de Mere-Abeille dans l'une des deux les Abeilles communes l'abandonneront, pour aller fe réunir à l'autre. Alors pour prévenir cet accident, il ne faut qu'y introduire une Reine qu'òn aura faifie fur quelque fecond Effaim, & conferver comme il eft expliqué au commencement du Paragraphe précédent. C'eft pourquoi, quand on veut faire cette opération, pour y réussir à coup fûr, il faut attendre qu'on puiffe avoir quelque fecond Effaim, où il fe trouve toûjours des Reines furnuméraires.

On peut même, fans aucun danger, fi l'on avoit pu fe procurer plufieurs Reines, en mettre une dans chaque Ruche, & tout ce qui peut en arriver, eft d'en trouver une, quelque temps après, massacrée deffous ou à peu de distance.

J'ai dit qu'il falloit faire cette opé

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