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cependant le terrein ne permettoit pas de choisir, il faut au moins avoir l'at tention que toutes foient expofées au foleil de dix heures; de forte que dans ce moment il donne fur l'entrée des -Ruches. Je ne donne point la préférence à cette expofition, parce que je n'ai point remarqué que les Abeilles fortent bien plutôt qu'à celle de midi.

Il leur feroit quelquefois très-défavantageux de recevoir les premiers rayons du foleil levant; en voici la raifon à la fortie de l'hiver & au commencement du printemps, beaucoup d'Abeilles déterminées à fortir de leur Ruche, par l'impreffion de cette cha→ leur qui les auroit dégourdies, pren droient trop tôt leur effor; chaque jour il y en auroit un bon nombre qui feroienr faifies dehors par le froid, & n'auroient pas la force de regagner leur habitation: ainfi la Ruche la mieux fournie, fe dépeupleroit en peu de

temps..

Il eft donc important de ne pas les expofer au foleil levant : il eft beaucoup moins dangéreux de les placer au foleil de dix heures, parce que fi elles font alors dégourdies & invitées à fortir,

l'air lui-même fera fuffifamment échau fé, pour ne pas les faire périr en cam pagne. Voila pour l'expofition.

La pofition d'un Rucher peut être confidérée ou relativement au lieu par ticulier dans lequel il eft placé, ou relativement au pays & au canton dans lequel il fe trouve.

Ces deux objets, très - différens en eux-mêmes, demandent auffi des mefures différentes, & des attentions particuliéres. Un Rucher [4] doit, autant qu'il eft poffible, être proche de la maison, afin qu'on puiffe le foigner & le vifiter plus aifément. Il doit être à l'abri des grands vents & des ouragans, qui empêchent quelquefois les Abeilles de rentrer dans leurs Ruches : il est bon qu'elles foient placées dans des jardins, afin qu'elles y trouvent au moins quelques fleurs à portée, & qu'elles ne foient pas toûjours obligées d'en aller chercher au loin: on coure moins de rifques de perdre les Effaims lorfque le jardin eft planté d'arbres peu élevés, tels que font ceux en buiffon, que lorf qu'ils ne font remplis que de très-hauts arbres; & il y a toûjours à craindre

[4] C'est-à-dire, le lieu où funt les Ruches.
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pour l'Effaim, quand les Mouches qui le compofent s'élèvent beaucoup en l'air en fortant de la Ruche, parce que le haut vol qu'elles ont pris les engage à un vol plus long. D'ailleurs on a beaucoup moins de peine à le ramaffer, lorfqu'il eft placé fur un arbre peu élevé il faut cependant des arbres aux Abeilles pour fe divertir, pour faciliter leur vol, & empêcher que les nou veaux Effaims ne prennent la fuite.

C'est un avantage qu'il y ait auffi auprès des Ruches quelque ruiffeau avec des cailloux qui paroiffent par-cr par-là, ou quelques branches d'arbres pofées en travers & de côté, afin que les Abeilles puiffent y boire, fe repofer, fe garantir du chaud, fe raffembler ou fe fauver de l'eau, quand quelques coups de vent les y a difperfées ou précipitées.

Dans les lieux éloignés d'eau, il eft bon de leur en procurer auprès de leurs Ruches, dans des affiettes ou autres vafes, fur lefquels on met de petites branches, afin qu'elles puiffent boire. Enfin il leur est très-avantageux que le fieu dans lequel elles font placées & les environs abondent en herbes odorifé

tentes, telles que le Thym, le Roma rim, la Méliffe, la Sarriette, la Lavende, le Serpolet, la Sauge, les Ge nets, les Rabettes, les Lys, les Jaf mins, les Rofes, le Baumier, &c. Ces herbes & ces arbustes de bonne odeur les attirent, les attachent & les fixent dans leur domicile; mais fur-tout le dernier, qui produit, à la fin de l'hiver, un fuc épais & balfamique dont elles font fort friandes, & dont la nourriture leur eft d'autant plus précieufe qu'elle fe préfente dans un temps où la Campagne leur en offre fort-peu. Or cet arbre eft d'autant plus aifé à multiplier, qu'il vient de bouture & fans aucun foin.

Le voifinage des étangs & des grandes riviéres leur eft funefte, parce qu'il; y en périt un très-grand nombre, par les grands vents & les farts orages; mais loin que celui des bourbiers leur foit nuifible, on les voit rechercher avec empreffement les eaux falées, les lieux imbibés & infectés d'urine, l'eau détrempée dans la fiante de boeuf, & les égouts des fumiers.

Ce qu'on doit principalement éloigner des Abeilles, ce font les herbes

& les plantes qui peuvent leur nuire, ou donner une mauvaise qualité à leur Miel. De ce nombre font les Oignons, l'Ail, la Ciboule, les Poireaux, la Cigue, la Rhuë, la Jufquiame, qui font un mauvais Miel; le Sureau, l'Orme, le Tilleul, le Tithimale leur donnent la dyffenterie; l'Ellebore, le Buis, l'Arboifier, l'If, le Cornouiller, felon quelques Auteurs, les incommodent & nuifent à leur provifions.

A l'égard de la pofition des Ruches, relativement à chaque canton, je penfe qu'on peut en diftinguer de trois fortes, qui donneront trois produits différents. Les Plaines de bleds, les Prairies, les petits Ruiffeaux forment ce que j'appellerai la moyenne & la médiocre pofition. L'abondance des Bleds & des Prés, la proximité des Bois, des grands Friches & des petits Ruiffeaux, forment la bonne pofition. Le voifinage des Avoines, des Prairies, des Sarafins, des Bois, des grands Friches & des Montagnes couvertes d'herbes odoriférentes, l'éloignement des Étangs & des Riviéres, forment l'excellente pofition. Celle-ci rapportera deux fois plus que la premiére, & elle doublera fur la feconde.

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