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Il ne faut pas penfer qu'on puiffe placer des Ruches dans tout canton, & dans telle quantité qu'on le voudra: on doit examiner foigneufement la qualité du pays où l'on le trouve; voir s'il eft propre à entretenir beaucoup d'Abeilles; proportionner le nombre des Ruches à la quantité de nourriture qu'il peut fournir,& n'en pas placer cent dans un lieu qui n'en peut nourrir que cinquante. Les vaftes & fécondes Plaines de la Beauce, de l'Ile de France & du Soiffonnois, qui font des greniers à bled pour la France; mais qui ont peu de Prairies arrofées par des ruiffeaux, ceffent, dans bien des années, de fournir aux Abeilles de quoi faire récolte, long-temps avant le retour des faifons qui les retiennent chez elles. On arrache dans ces Provinces tout le chaume des champs, & en même temps les herbes qui s'y trouvent. Lorfque l'été eft fec, que les foins ont été coupés, & que les bleds font mûrs, tout eft vuide dans ces Campagnes : les Abeilles ont beau les parcourir, elles n'en rapportent aucun Miel, & n'y trouvent point ou y trouvent fi peu de fleurs, qu'à peine les plus diligentes,

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ou les plus heureuses, peuvent recueillir quelques petites pelottes de Cire, ou même de quoi fe nourrir hors de leur Ruche il faut donc fe régler fur la connoiffance du canton qu'on habite; c'est le vrai moyen de ne pas s'expofer à des méprifes difpendieufes, & de retirer de fes Abeilles tout le fruit qu'elles peuvent donner.

§. 26.

Néceffité de vifiter fouvent fes Ruches pendant l'hiver; façon de donner du Miel à celles qui en ont befoin: en quelles circonftances il faut leur ôter la hauffe de bas avantage de mes nouvelles Ruches.

Left bien important de vifiter fouvent fes Ruches pendant l'hiver: ro' Pour ôter les Teignes & les Mouches mortes, dont la vue & l'infection ne manqueroient pas d'occafionner parmi les vivantes une langueur mortelle, qui feroit bientôt fuivie d'une deftruction générale: 2o Pour leur donner le remède qui a été indiqué au Paragraphe 20°, en cas qu'on s'apperçoive qu'elles

font attaquées de la dyffenterie, ce qui a lieu, fur-tout aux approches du printemps: 30 Pour voir fi elles ne manquent pas de provifions; car il arrive fouvent que telle Ruche qui eft forte en Abeilles, n'a pu conftruire pendant l'été & l'automne qu'un petit nombre de gâteaux, ou bien n'a pu les garnir d'une provifion fuffifante de Miel & de Cire brute pour paffer l'hiver; & alors elle ne peut manquer de périr de faim, fi l'on n'a pas l'attention d'y pourvoir à temps.

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Rien de plus facile que de remplir tous ces objets avec mes nouvelles Ruches en les foulevant doucement, un coup d'oeil dans l'intérieur fuffit pour s'affurer de leur état. Les Teignes s'attachent la plupart dans le bas, & furtout à la natte convexe qui eft fur la table on peut donc la tirer entiérement hors de la Ruche, pour balayer à fon loifir les Mouches mortes avec une plume d'Oye, & enlever avec la pointe d'un couteau, les Teignes qui qui font collées dans les interstices, fans craindre les forties des Abeilles. Si elles manquent de provifions, après avoir remis lå natte voutée à fa place,

on y introduit des gâteaux remplis de Miel, qu'on aura eu foin de conferver exprès, ou à leur défaut, une affiette remplie de Miel, fur lequel on a jetté trois ou quatre brins de paille, pour foutenir un papier arrondi & percé comme un crible, afin que les Abeilles defcendent deffus, fans s'empâter les jambes & les aîles, & le fucent avec leurs trompes, à travers ces petits trous.

Lorfqu'on met fes Ruches en hiver ; c'eft-à-dire, lorfqu'au mois de No vembre on interdit à fes Mouches toutes forties & toute lumiére, en mettant la plaque de fer blanc percée à la bouche de la Ruche, & fi l'on ne voit que peu ou point de gâteaux dans la Ruche inférieure, que les Abeilles auront alors abandonnée, pour fe res tirer toutes dans les hauffes fupérieu

il faut détacher & enlever cette hauffe, parce qu'un trop grand vuide ne ferviroit, dans l'hiver, qu'à augmenter l'impreffion du froid, & pourroit au retour du printemps empêcher les Ruches d'effaimer, ou du moins retarderoit beaucoup la fortie des Effaims qui ne s'y trouveroient pas gênés.

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CONCLUSION.

N doit être convaincu préfentement des avantages de mes Ru

ches fur toutes celles dont on a fait ufa ge ci-devant : il est certain qu'avec une legére attention, & des foins, dont le Payfan le plus groffier eft capable, & que fon propre intérêt doit lui infpirer, il parviendra en peu d'années à fe procurer un nombre confidérable de Ruches, parce qu'en fuivant exactement cette méthode, on les renouvelle chaque année, & que l'Auteur que j'ai pris pour modèle affure qu'il en à fait fubfifter ainfi quelques-unes un grand nombre d'années; mais quand on ne pourroit les conferver que fept à huit ans, leur multiplication ne pourroit manquer de devenir fort confidérable, & ce doit être un objet des plus intés reffans pour les Habitans de la Campagne, puifqu'elle leur offre, fans beaucoup de peine & de frais, une ressource abondante, certaine, & d'autant plus agréable que cette occupation ne pren drà que fort peu fur leur travaux ˆor

dinaires.

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