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mais fi l'on ne peut parvenir à fe procurer une Reine, alors l'unique moyen, pour éviter la perte entiére de cette Ruche, eft de la marier à quelqu'autre foible, ou à quelque petit Effaim, de la maniére qu'il fera expliqué au Paragraphe 18e.

Cette Reine eft de la figure des Abeilles communes, mais plus groffe & plus longue; elle n'eft pas cependant à beaucoup près auffi groffe que les mâles; fa tête eft plus allongée, & fes ailes ne couvrent que la moitié de fon corps, au-lieu que celles des autres Abeilles le couvrent en entier. On remarque, dans fon intérieur, deux ovaires tous remplis d'oeufs, dans le temps de la ponte; & chaque ovaire eft un affemblage de vaiffeaux déliés, qui vont aboutir à un canal commun. Elle n'a ni palette triangulaire propre à recevoir la récolte de la matiére à Cire, ni broffe à l'extrémité des pattes, pour la recueillir de deffus fon corps, comme les Abeilles communes. Elle n'abandonne jamais fa Ruche; elle fe promène feulement dans toute l'étendue de fes États, pour voir ce qui s'y paffe, & y maintenir l'ordre,

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Elle prend même l'air à l'entrée de fa Capitale, pour jouir, dans un beau jour, du fpectacle & de la chaleur du Soleil mais toutes fes courses & fes voyages fe bornent là. Elle a l'agrément de ne trouver perfonne qui s'oppofe à fes défirs; on la prévient même fouvent avec complaifance, en lui offrant de toutes parts des aliments, à mefure qu'on les apporte du dehors. Elle trouve abondamment dans les magafins publics de quoi fe nourrir : elle choifit à fon gré, & elle ne manquera de provifions que lorfque la Ruche en fera totalement dépourvue.

Quelques Obfervateurs ont penfé qu'il y avoit dans une même Ruche jufqu'à trois Meres, & jamais davantage; mais ils ont confondu probablement celles qui éclofent au printemps, au nombre de 7 à 8, même jufqu'à 15. & 20, & qui fe trouvent toutes maffacrées, peu après qu'une Ruche a effaimé, tant celles qui ont fuivi l'Effaim, que celles qui font restées dans la Ruche, lorqu'elle ne doit plus en produire de l'année.

Telle eft la Loi de cette République chez les Abeilles plufieurs Reines

fourniroient trop d'ouvrage à faire, & des occupations fupérieures de beaucoup aux forces des Mouches ouvriéres. Comme la Reine eft feule deftinée à réparer les pertes journaliéres que fait la Ruche, & à produire de nouvelles Colonies, ainfi que je l'expliquerai au Paragraphe 8, il eft certain que lorsqu'un nouvel Effaim eft placé dans fa Ruche, à peine les Abeilles ouvriéres peuvent-elles affez conftruire de cellules pour recevoir tous les œufs que cette Reine eft prête à pondre. Elles travaillent fans relache pour fournir des domiciles à fes futurs fujets, & pour leur procurer, à mesure qu'ils naiffent & qu'ils prennent leur accroiffement, la nourriture dont ils ont befoin. Une feconde Pondeuse ne feroit donc pour elles qu'un furcroît infoutenable de peines & d'embarras : auffi eft-ce immédiatement après l'émission des Effaims, qu'on fait main-baffe fur ces Reines de précaution.

S'il s'y en trouve plufieurs, on les voit, au bout de deux ou trois jours & quelquefois dès le lendemain, toutes mortes auprès de l'Effaim: la même chofe fe remarque auprès de la Ruche

qui l'a produit, à l'égard des furnuméraires qui n'ont pas jugé à propos de fuivre les autres ; & alors c'est une marque affez certaine qu'elle ne produira plus d'Effaim cette année.

La Reine a un aiguillon beaucoup plus grand que celui des Abeilles ouvriéres; mais dont on a obfervé qu'elle ne fait ufage qu'après avoir été excitée pendant un temps affez confidérable, Cet aiguillon eft un peu recourbé fous le ventre, & c'eft mal-à-propos que quelques-uns ont foupçonné qu'il devoit lui fervir à fe débarraffer de fes Concurrentes je me fuis convaincu du contraire, en voyant, peu de temps après avoir pofé un Effaim fur fa table, une Reine poursuivie vivement par une Abeille ordinaire, qui l'obligea de s'enfuir de la Ruche, fans chercher à faire ufage, pour la confervation de fa vie, de l'avantage que fa taille fupérieure & fon aiguillon formidable lui donnoit fur elle.

En voila affez pour le préfent fur cette Mere merveilleufe: je traiterai, au Paragraphe 8e, de fa fécondité furprenante; j'aurai foin de faire mention des expériences de quelques Ob

fervateurs modernes, fur fa formation, & j'expoferai mes doutes à leur égard.

§. 4.

Police & induftrie des Abeilles; leurs travaux & leurs foins dans l'intérieur de la Ruche.

L

'Attention de fermer exactement, avec de la Propolis [4], toutes les ouvertures de la Ruche, s'il y en a; la conftruction des Alvéoles; le foin des Œufs & des Ambrions; l'emploi de la Cire, & l'emplacement du Miel, font les grandes & importantes occupations des Abeilles dans leur Ruche : leurs autres travaux ne font que fubordonnés, & relatifs à ceux-là, je veux dire qu'ils ne tendent qu'à la confervation & la défense de leurs provifions ou de leur République, & à la propreté néceffaire dans un État auffi peuplé, & en même temps auffi borné.

Dans tous les temps, mais furtout aux approches du printemps, elles ont foin de nettoyer leurs Ruches de tou

[a] Voyez La defcription au Paragraphe suivant.

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