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pour ceux qui ramaffent les paillettes d'or de riviére. L'Abeille devient toute poudrée, affez ordinairement d'une poudre jaune, quelquefois d'une poudre rouge, & d'autres fois d'une poudre d'un blanc jaunâtre, felon que font colorées les pouffiéres des étamines des fleurs dans lesquelles elle a fait fa récolte: on en voit fouvent qui, lorfqu'elles retournent à leurs Ruches, ont les poils fi chargés de cette poudre colorée qu'elles en font méconnoiffables. Dans le temps que les fleurs des Arbres font encore peu dévelopées, & ne fourniffent pas une récolte aifée & abondante, l'Abeille tâte avec fes dents la capfule dans laquelle ces pouffiéres font renfermées : fi elle la trouve bien conditionnée & bien préparée, elle la preffe avec fes deux dents, comme avec une pince; elle oblige par cette preffion la capfule à s'ouvrir, & à lui donner les pouffiéres qui n'en étoient pas encore forties: elle prend alors ces pouffiéres avec ces deux premiéres jambes, elles les donne enfuite aux deux fuivantes, qui les portent aux deux derniéres mais lorsque l'Abeille n'a pas été obligée de preffer les capfules,

pour faire fortir les pouffiéres qui y font renfermées, & qu'elle a fait fa récolte en couvrant fes poils de ces pouffiéres précieuses, elle les ramaffe fur fon corps en fort-peu de temps.

Pour cet effet, elle pofe deffus les unes ou les autres de fes jambes, dont l'avant-derniére partie eft faite en broffe: ces broffes retiennent un peu humides les pouffiéres qu'elles ont enlevées, & que l'Abeille raffemble enfuite, & réunit en deux petits tas aux palettes de fes jambes de derriére, où fe trouve une cavité uniquement deftinée à les contenir : cette cavité eft bordée de gros poils, au milieu defquels eft une espèce de corbeille propre à conferver ce qui lui eft confié. C'eft dans cette cavité que les jambes de la feconde paire portent la pouffiére des étamines, en les preffant les unes contre les autres, pour en former des pelotes, quelquefois auffi groffes qu'un grain de poivre, mais d'une figure un peu plus applatie. Affez chargée de ces deux petites pelotes, elle part alors & les porte à la Ruche; quelquefois elle les avalle avant de rentrer, & cela arrive fur-tout lorfque la féchereffe empêche

ces pelotes de demeurer colées aux deux palettes; ce qui fait croire à bien du monde, qui les voient arriver à leur Ruche fans pelotes, qu'elles n'ont rien récolté; mais le plus fouvent elle les rapporte à fes pattes, & les remet à d'autres Ouvrières, qui les avallent pour les préparer.

Enfin la Cire brute eft auffi déposée dans les cellules: l'Abeille, qui arrive chargée, entre dans celle qui lui plaît, détache avec l'extrémité de fes jambes du milieu les deux petites pelotes qui tiennent à celles du derriére, & les fait tomber au fond. Si cette Mouché. quitte alors l'Alvéole, il en vient une autre qui met ces deux pelotes en une feule maffe, qu'elle étend au fond de la cellule, & c'eft ainfi qu'elle fe trouve peu à peu remplie de cette Cirebrute, dont les Abeilles ont foin de fe pourvoir suffisamment, pour leur nourriture pendant l'hiver. Au refte il ne faut pas croire que ces pelotes foient de vraie Cire, elles ne font que la matiére propre à la faire. Mr. de Réaumur a fait une infinité d'expériences très-convaincantes fur cette matiére à Cire, dont je vais indiquer les plus faciles.

Qu'on ramaffe un certain nombre de pelotes de Cire, qu'il eft facile de faire tomber des jambes d'une Abeille avec un petit bâton; qu'on essaye avec les doigts de les paîtrir & amollir, & furtout de les réduire en une lame plate, on parviendra à les froiffer, à les broyer, mais jamais à en faire de la Cire, ou quelque chofe d'approchant; on ne réuffira pas même à les ramollir. Le microscope montrera encore après tous ces efforts, que les grains qui compofent la petite maffe, ont confervé leur nature & leur figure.

Que l'on mette une petite pelote dans une cuillére d'argent, pofée fur de la cendre chaude ou du charbon un peu ardent, fi la petite boule étoit de Cire, dans un inftant elle deviendroit coulante, au-lieu qu'elle ne change point de figure; elle jette de la fumée; elle fe defféche & fe réduit en charbon.

Cette matiére, éprouvée à l'eau comme au feu, paroîtra encore différente de la Cire. Si on en jette dans l'eau, même de celle qui aura été bien defféchée, & bien dépouillée de toute humidité, elle tombera & reftera au

fond, au-lieu que la Cire remonteroit & refteroit à la furface: enfin la couleur des rayons démontre fenfiblement que la matiére à Cire demande une préparation; ils font tous d'une blancheur éclatante, en fortant des mains de nos Ouvriéres : ils devroient cependant participer des différentes couleurs des pouffiéres des fleurs, fi ces pouffiéres, étoient de la vraie Cire.

C'est donc dans le corps même des Abeilles que la Cire brute doit être travaillée : c'est là qu'eft le laboratoire qui prépare les pouffiéres des fleurs, & leur donne le dégré de cuiffon néceffaire pour les transformer en vraie Cire : & pour fe convaincre que c'est dans leur eftomach que les Abeilles forment la Cire, il ne faut qu'examiner un Effaim nouvellement amaffé, avant qu'aucune Abeille ait encore pris fon effort, on y trouvera un rayon commencé, dont la Cire étoit ou dans les jambes des Abeille, ou dans leur eftomach; or elles ne pouvoient pas avoir leurs jambes garnies des dépouilles des fleurs, puifqu'elles ne fortent prefque point le jour qu'elles doivent effaimer, pour aller à la pico

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