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rée il y a plus, on a pouffé l'expérience jufqu'à faire déloger brufquement & dès le grand matin, dans un jour de pluie, toutes les Abeilles d'une Ruche, pour les faire paffer dans une nouvelle, & l'on a trouvé, dès le foir même, qu'elles y avoient déja commencé un rayon de Cire. Cette Cire, qu'elles ont employée, étoit donc dans leur eftomach.

Enfin fi l'on prend une Abeille, & qu'on l'ouvre avec précaution, l'on trouvera dans son estomach, ces pouffiéres des fleurs, dont les unes font déja changées & altérées, & les autres auront confervé leur figure & prefque toute leur qualité; d'ailleurs des Obfervateurs, auffi patients qu'habiles & attentifs, leur ont vu partager & avaller la provifion des pelotes, qu'une autre Abeille apportoit du dehors: ainfi tout démontre que ces pelotes qu'elles ramaffent, ne font que de la matiére à Cire, qui fe perfectionne dans leur eftomach par la digestion.

Pour former les Alvéoles, les Abeilles rendent par la bouche cette Cire, ainfi préparée, qui n'eft plus en fortant qu'une liqueur mouffeufe, & quel

quefois une espèce de bouillie qu'elle pofe avec la trompe, après l'avoir formée avec fes dents. C'eft avec ces inftruments qu'elle gâche, paîtrit & façonne, comme un Maffon avec fa truelle, ces Alvéoles, d'une forme hexagone, avec une jufteffe qui le difpute au compas, & qui donne la folution de ce Problême qui a exercé les plus beaux Génies de l'Europe, de bâtir le plus folidement & avec la plus grande économie poffible.

Chaque rayon à deux ordres d'Alvéoles, oppofés l'un à l'autre, qui ont leur bâfe commune. Chacun de ces rayons eft dans une direction vertigale; il n'y a entre-deux qu'autant d'espace qu'il en faut pour que quelques Abeilles puiffent paffer à la fois, & elles y ménagent des trous qui traverfent cha que rayon pour leur abréger le chemin; l'épaiffeur de chacun de ces rayons, eft d'un peu moins d'un pouce,. ainfi la profondeur de chaque Alvéole, deftinée pour les Abeilles ouvriéres, est d'environ cinq lignes, & leur longueur eft conftamment de deux lignes deux cinquiémes, dans tous les Pays' où il y a de ces Infectes : c'est une règle

gle univerfelle, en fait de mesure, & qui ne varie point.

On voit la trompe des Abeilles agir continuellement, & changer de figure dans les différentes pofitions où elles fe trouvent. Elles commencent toûjours par attacher & fouder folidement les gâteaux au milieu du haut de la Ruche, & dans un nouvel établissement, lorfqu'elles fe fixent à l'un des côtés ; c'est, ou parce que la Ruche eft trop grande, ou que l'Effaim eft trop foible, ce qui eft d'un fort mauvais augure.

La pâte de Cire fe féche bien-tôt, & devient en peu de temps de vraie Cire fort blanche; dans la fuite elle devient jaune, quelquefois même brune & prefque noire, parce qu'elle est expofée aux vapeurs que la chaleur de la Ruche produit, qui terniffent en peu de temps l'état primitif de ces rayons fi uniformes & fi appétiffans, quand ils fortent de la main de ces ha biles Ouvriéres:

Telle eft la maniére dont les plus fçavans Naturalistes nous ont appris que les Abeilles ramaffent la Cire fur les fleurs, la préparent dans un de leurs eftomachs, par l'effet de la digef

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tion qui s'y opére, & en forment enfuite les Alvéoles. Cependant Mr. de Hornbostel nous offre des doutes fur ces opérations. Il affure » qu'il y a environ >> vingt ans, il apperçut, au temps où »les Abeilles prennent le plus de >> nourriture, des feuilles minces, & » d'une matiére blanche, dans le re>> couvrement inférieur des fix an»neaux cailleux qui compofent le » ventre de l'Abeille, & que des ex

périences lui apprirent être de vraie » Cire, qu'elle produifoit fous cette » forme par transpiration.

Mon but n'eft pas de contredire des expériences que l'on atteste avoir été réitérées par d'autres: mais je ne peux m'empêcher de demander à Mr. Hornboftel, 10. s'il eft bien für que ces feuilles minces, qu'il n'a apperçuës qu'au temps où les Abeilles prennent le plus de nourriture, ne foient point une fuite de l'abondance des poudrettes fur les fleurs; dont la partie la plus fine, & pour ainfi dire la quintescence feroit tombée, & fe feroit coagulée dans les interstices de ces anneaux tant par leur mouvement perpétuel que par l'humidité de la ro

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fée ou la fueur que le travail peut occafionner? 20. Si la Cire fe trouve formée entre les anneaux par la tranfudation, pourquoi Mr. de Réaumur qui a obfervé fi exactement les opérations des Abeilles, ne les a-t-il pas vues, à mesure qu'elles conftruisent leurs gâteaux, détacher avec leurs trompes ou leurs pieds ces follicules minces? 30 Pourquoi Mr. Hornbostel, lui-même, n'a-t-il pas remarqué ces mouvemens, qui doivent être très-fréquens & très-fenfibles dans leurs opérations? 40 Pourquoi cette Cire eftelle en follicules entre ces anneaux, plûtôt qu'en bouillie, puifque les Abeilles ne pourroient employer ces follicules à la confection des gâteaux, qu'en les délayant de nouveau dans leur bouche? 5o. Pourquoi n'a-t-il apperçu ces follicules qu'au temps où les Abeil

les prennent le plus de nourriture, & non dans tous les temps fans diftinc-. tion, où elles rapportent de la Cire à leur Ruche en quantité, plus ou moins grande? 60. Enfin pourquoi Mr. de Réaumur a-t-il vu cette Cire préparée dans l'un des eftomachs de plufieurs Abeilles qu'il a ouvertes, fi elle ne

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