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doit fortir qu'au travers de leur ventre par tranfudation? Et comment eft-il poffible qu'un nouvel Effaim, dont les Abeilles n'ont encore fait aucunes forties, & que l'on a transvafé exprès de fa Ruche dans une autre, ait pu produire des gâteaux dans l'une & dans l'autre, d'une grandeur auffi confidérable que ceux mentionnés dans les expériences rapportées au commencement de ce Paragraphe, & cela fans qu'on ait pu appercevoir aucunes lames de cette Cire fur elles? Je ne fais ces questions que pour engager à de nouvelles expériences, qui conftarent une opération auffi merveilleuse; & en attendant la folution de ce Problême, je crois devoir fuivre les, Auteurs où j'ai puifé.

Les cellules font destinées à trois objets: 10 A renfermer la provifion de Miel pour l'hiver; & celles-là, qui font plus profondes que les autres, font fermées par un couvercle qu'on appelle cataracte. 20. A mettre en réferve la Cire brute qui doit être employée, foit à nourrir les Abeilles & le Couvain, foit à construire les Alvéoles, après qu'elle aura reçu fa pré

paration par la voie de la digeftion. 30 A loger les Œufs des Abeilles qui font bien-tôt changés en Vers, enfuite en Nymphes, & en dernier lieu en Cryfalides; & ces Œufs & ces Vers font de groffeur proportionnée aux Mouches qui en doivent éclorre; ainfi les Abeilles font des Alvéoles de trois grandeurs différentes pour les contenir les plus petits, & qui font le plus grand nombre, font font pour les Vers qui doivent fe changer en Abeilles ouvriéres ou mulâtres : ceux qui contiennent les Vers des faux Bourdons font plus grands, & leur diamètre eft précifément de trois lignes & demie; mais ceux qui font destinés à fervir de logement aux Vers, qui doivent fe tranfformer en Abeilles meres, font entiérement différens des autres,

Si les Abeilles ne font pas briller leur adreffe à l'égard de ces derniéres cellules, où l'on ne remarque ni fymmétrie ni régularité, elles y fignalent du moins leur magnificence par la profufion de la Cire, & la dépense qu'elles en font elles font arrondies & oblongues; le bout de haut, qui eft fermé lorfque le Vers à pris fon accroiffe

:

ment,

eft conftamment plus gros que celui de bas: elles paroiffent être groffiérement conftruites; leurs parois font fort- épaiffes, & une feule peut pefer autant que cent cinquante des autres le lieu qu'elles occupent femble être pris au hafard; les unes font pofées au milieu d'un gâteau, fur les cellules ordinaires, & d'autres font fufpendues au bord; on ne diroit pas que ce fût les mêmes Ouvriéres qui les euffent faites; auffi les détruit-on après que les fémelles en font forties [4]:

Il y a quelquefois beaucoup de différence entre les Cires faites par diverfes Abeilles. Cette différence confifte principalement en ce que les unes font plus difficiles à blanchir que les autres. On ne peut parvenir à donner un beau blanc à la Cire d'un certain Pays, & dans le même Pays la Cire qu'on tire de quelques Ruches, ne peut jamais prendre toute la blancheur qu'on parvient à donner à celle des autres. A la Blanchifferie d'Yere-laVille on préfére les Cires de Sologne à celles du Gâtinois; mais on y regarde

[4] Voyez les Expériences de Mr. Simon, & de la Société de la Haute-Luface, à ce fujet, §. 9 & 10.

les Cires de la Forêt de Fontainebleau comme bien inférieures, même à ces derniéres; on affure qu'elles ne deviennent jamais blanches; mais ce qui fait plus de tort à la Cire, c'eft la moififfure dans les anciennes Ruches, parce que l'humidité y pénétre facilement, fur-tout quand les orages pouffent violemment la pluie contre l'extérieur. Cette humidité s'imbibe dans la paille, y féjourne & la pénétre en peu de temps; elle gâte & corrompt tout l'ouvrage des Abeilles & les oblige enfin elles-mêmes, ou à périr ou à abandonner le terrein.

Ce malheur n'eft que trop commun dans ces Ruches, & quelque précaution qu'on prenne, on ne le prévient que rarement avec fuccès; il eft plus difficile encore d'y remédier quand il eft arrivé il faut fouvent pour cela couper & rogner tout l'ouvrage de la Ruche, jufqu'à quatre pouces près du fond; ce qui défole & déconcerte leş Abeilles qui, quand elles n'abandonnent pas tout-à-fait leur domicile, font quelquefois une campagne entiére à fe rétablir.

Il y a long-temps qu'on a penfé que

les Abeilles ne vivoient pas feulement de Miel, & qu'elles mangeoient encore la Cire brute. Ce fentiment a été prefque généralement reçu par ceux qui ont eu beaucoup de ces Mouches, dans la vue de profiter du fruit de leurs travaux : auffi dans divers Pays, comme la Hollande, la Flandre, le Brabant, &c., la Cire brute eft-elle appellée le pain des Abeilles. On n'y regarde le Miel que comme une boiffon plus propre à détremper leur nourriture qu'à les foutenir par elle-même: je pourrois encore avec raifon m'autorifer de plufieurs illuftres Naturalif tes, qui croient que le mêlange de ces deux matiéres eft néceffaire pour que les digeftions des Abeilles foient bonnes & louables : ils ajoûtent que ces Infectes font attaqués d'une maladie, qu'on appelle dévoiement, lorfqu'elles font obligées de vivre uniquement de Miel, & qu'elles ont épuifé toutes leurs provifions de Cire brute; cela paroît d'autant plus vrai-femblable, que le meilleur remède qu'on ait employé jufqu'à préfent, contre cette terrible maladie, eft de leur préfenter un gâ zeau tiré d'une autre Ruche, dont les

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