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des plantes; un écoulement qui s'échape tranfude par leurs pores, & s'épaiffit fur les fleurs & les feuilles. La récolte du Miel eft toûjours plus abondanté que celle de la Cire telle Ruche qui ne donnera qu'une livre de Cire par an, donnera au moins feize livres de Miel, & quelquefois beaucoup davantage, fuivant les pays & les années plus ou moins favorables.

Lorfqu'une Abeille entre dans une fleur qui a près de fon bord de ces réfervoirs destinés à contenir une liqueur miellée, & dont ils ont été bien remplis, elle peut trouver de cette liqueur épanchée fur différentes parties de la fleur.

La trompe eft l'inftrument avec lequel elle recueille cette liqueur. On n'est pas long-temps à voir avec quelle activite, & avec quelle adreffe elle en fait ufage: fi on obferve une Mouche qui vient se poser fur une fleur bien épanouie, dans l'inftant on la voit s'avancer vers l'intérieur; bien-tôt elle allonge le bout de fa trompe, & l'applique contre les bords de la fleur, tout près de leur origine. Alors le bout de cette trompe eft dans une action con

tinuelle, il fe donne fucceffivement une infinité de mouvemens différens; elle fe raccourcit & fe rallonge enfuite: elle fe contourne & fe courbe pour s'appliquer fur toutes fes parties.

Pour connoître furement à quoi tendent tant de mouvemens fi prompts & fi variés, & quel effet ils produifent, il n'y a qu'à enfermer quelques Abeilles dans un tube de verre, dans lequel on aura mis, par-ci par-là, quelques goutes de Miel, elles oubliront prefque fur le champ qu'elles font prifonniéres : on ne tardera pas à en voir d'auffi près qu'il eft poffible, qui le fucceront, ou plûtôt le lapperont; en peu de temps elles auront nettoyé le tube avec leur trompe, & cette trompe par conféquent doit être regardée comme une feconde langue, par le moyen de laquelle elles forcent la liqueur à entrer dans leur gofier, & à paffer de-là dans leur eftomach.

Il eft vrai-femblable que quand elles ne trouvent pas une provifion fuffifante de Miel épanché, elles emploient leurs dents, comme elles s'en fervent lorfque les fommets des étamines tiennent encore renfermées les pouffiéres

qu'elles cherchent. Elles peuvent bien alors, avec leurs dents, ouvrir les veffies qui contiennent la liqueur miellée : elles fçavent s'en fervir quand il s'agit de hacher du papier qui couvre du Miel mis fur une affiette: eh! pourquoi ne s'en ferviroient-elles pas, quand il s'agit de déchirer des veflies pleines de Miel, ou d'une liqueur propre à devenir Miel.

Les Abeilles ne donnent point d'autres préparations au Miel, que de le cuire, le façonner & l'épurer dans leur estomach: il se perfectionne fans doute dans ce laboratoire, au moins en fortil plus épais & plus condenfé qu'il ne l'étoit avant qu'elles le ramaffaffent. Lorfque leur eftomach en est bien rempli, elles rentrent avec cette provifion dans leur Ruche pour lors, où elles en font part à celles qui font reftées pour les travaux du dedans, où elles vont le dégorger dans les cellules qui font destinées à cet ufage. Il a acquis affez d'épaiffeur & de confiftence pour le foutenir fans s'écouler dans les Alvéoles, quoiqu'ils repréfentent un pot couché & incliné sur le côté.

Remarquez

Remarquez cependant qu'il y a fur le Miel, qui remplit un Alvéole, une derniére couche qui fe fait diftinguer facilement; elle femble être ce que la crême eft fur le lait, & elle fert à y retenir tout le Miel. Quelques-uns onc cru que cette crême n'étoit qu'une croûte de Miel, ou une couche plus épaiffe qui fe formoit tout naturellement au-deffus du Miel, à peu près comme il arrive au-deffus des pots de confitures. Ils fe font fondés fur ce que cette couche a toutes les qualités, & toute la faveur du Miel même, excepté qu'elle a plus d'épaiffeur & de confiftence; mais Mr. de Bomare prétend qu'il y en a dans tous les Alvéoles, foit qu'ils foient pleins de Miel en tout ou feulement en partie : il prétend, dis-je, que les Abeilles introduifent chaque jour de nouveau Miel, au travers de cette croûte, jufqu'à ce que l'Alvéole en foit rempli.

Quoiqu'il en foit, parmi les Alvéoles qui le renferment, les uns font destinés à fournir celui qui eft néceffaire à la confommation journaliére des Abeilles, & les autres doivent conferver celui qui fervira à les nourF

rir dans les temps où elles en iroient inutilement chercher fur les fleurs. Celles dont le Miel eft à l'abandon, font ouvertes, les autres font fermées. Les Abeilles les condamnent avec des petites plaques de Cire, qui empêchent que le Miel ne s'évapore, & ne devienne dur & grainé.

Je ne parlerai point ici des différens ufages auxquels il pourroit être employé, s'il étoit plus commun: entr'autres de l'hydromel, qui eft une liqueur autant facile à faire, qu'agréable pour les Habitans de la Campagne, & forteftimée, fur-tout dans le Pays Meffin. Je dirai feulement que pour en avoir de bon, on doit le choifir épais, grainu, clair, nouveau, pefant, transparent, d'une odeur douce & agréable, un peu aromatique, d'un goût gracieux & piquant; & pour dire quelque chofe de plus précis encore, on préfére le blanc, ou le pâle, au plus foncé ; le nouveau au vieux ; celui du printemps & de l'été, à celui de l'automne; celui qui écume peu en bouillant, à celui qui écume beaucoup; l'acre-doux, à celui qui n'a que de la douceur; enfin le Miel d'une

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