voir cette gloire de vous dire à vous-même, MONSEIGNEUR, avec toute la soumission possible, que je suis, SCÈNE PREMIÈRE. SGANARELLE, ARISTE. SGANARELLE. Mon frère, s'il vous plaît, ne discourons point tant, ARISTE. Mais chacun la condamne. Mon frère. SGANARELLE. Oui, des fous comme vous, ARISTE. Grand merci; le compliment est doux! SGANARELLE. Je voudrois bien savoir, puisqu'il faut tout entendre, Ce que ces beaux censeurs en moi peuvent reprendre. ARISTE. Cette farouche humeur dont la sévérité 4 Deux caractères des comédies de Molière sont restés comme emplois au théâtre, les SGANARELLES et les ARISTE. Le nom de SGANARELLE désigne toujours un homme trompé, ridicule, brusque, jaloux; celui d'ARISTE, au contraire, désigne toujoursun homme sage, plein de politesse et de jugement. Ariste vient du grec, il signifie très bon. Nous n'avons pu découvrir l'origine du nom de Sganarelle. (A. M.) 2 Depuis femme de MOLIÈRE. Fuit toutes les douceurs de la société, De ces petits pourpoints sous les bras se perdants? Je vous plairois, sans doute, équipé de la sorte? ARISTE. Toujours au plus grand nombre on doit s'accommoder, Et jamais il ne faut se faire regarder. L'un et l'autre excès choque, et tout homme bien sage Sornettes, discours frivoles, bagatelles: originairement, contes faits le soir pendant la veillée; du vieux mot sorne, soir. (A. M.) 2 Muguet, gentil, amoureux, amator venustulus. (NIC.) C'est le nom de la fleur même, métaphoriquement transporté à ceux qui s'en parfumoient. (A. M.) Seroient fachés qu'un autre eût été plus loin qu'eux; SGANARELLE. Cela sent son vieillard qui, pour en faire accroire, Et qui me trouve mal, n'a qu'à fermer les yeux. SCÈNE II. LEONOR, ISABELLE, LISETTE; ARISTE ET SGANARELLE, parlant bas ensemble sur le devant du théâtre sans être aperçus. LÉONOR, à Isabelle. Je me charge de tout, en cas que l'on vous gronde, LISETTE, à Isabelle. Toujours dans une chambre à ne point voir le monde? ISABELLE. Il est ainsi bâti. LÉONOR. Je vous en plains, ma sœur. Le pourpoint prenoit depuis le cou jusqu'à la ceinture. On en faisoit des tailladés, dont la mode venoit d'Espagne. Les petits-maitres en avoient de peau de senteur, et très étroits. Ménage fait venir ce mot du latin perpunctum, habit militaire de laine, de coton, ou de soie piquée entre deux étoffes. (B.) - Cette mode et celle des hauts-de-chausses, semblables à des cotillons, remontoit au temps de Henri IV. (Α. Μ.) LISETTE, à Léonor. Bien vous prend que son frère ait toute une autre humeur, En vous faisant tomber aux mains du raisonnable. ISABELLE. C'est un miracle encor qu'il ne m'ait aujourd'hui LISETTE. Ma foi, je l'envoierois au diable avec sa fraise ', SGANARELLE, heurté par Lisette. Où donc allez-vous, qu'il ne vous en déplaise? SGANARELLE, à Léonor. Pour vous, vous pouvez aller où bon vous semble ; Vous n'avez qu'à courir, vous voilà deux ensemble. (A Isabelle.) Mais vous, je vous défends, s'il vous plaît, de sortir. ARISTE. Hé! laissez-les, mon frère, aller se divertir. SGANARELLE. Je suis votre valet, mon frère. Veut... ARISTE. La jeunesse SGANARELLE. La jeunesse est sotte, et parfois la vieillesse. SGANARELLE. Mais ses actions de moi doivent dépendre, Elles sont sans parents, et notre ami leur père Sur elles, par contrat, nous sut, dès leur enfance, • Les Espagnols passent pour être les inventeurs de la fraise, dont ils se sont servis pour cacher une incommodité à laquelle iis étoient la plupart sujets. L'empire des modes avoit appartenu à ce peuple avant de passer à nous. (B.) - Catherine et Marie de Médicis avoient apporté cette mode en France. La fraise fut remplacée, sous Louis XIII, par le collet ou rabat de chemise; mais quelques vieillards la portoient encore à l'époque où l'École des Maris fut jouée. (A.) Et de père et d'époux donner pleine puissance : Et moi je me chargeai du soin de celle-ci; ARISTE. Il me semble... SGANARELLE. Il me semble, et je le dis tout haut, Que sur un tel sujet c'est parler comme il faut. SGANARELLE. Taisez-vous, Je vous apprendrai bien s'il faut sortir sans nous. LEONOR. Quoi done, monsieur? SGANARELLE. Mon Dieu! madame, sans langage, Je ne vous parle pas, car vous êtes trop sage. Et vous m'obligerez de ne nous en plus faire. Et, quoiqu'un même sang nous ait donné naissance, |