OU RECUEIL DE PIECES FUGITIVES DE LITERATURE De Poëfie de Traits d'Hiftoire ancienne & 1 DEDIE AU ROI. JANVIER 1762. NE U C H ATEL, DE L'IMPRIMERIE DES EDITEURS. MDCCLXII Vous ous nous avés doné plufieurs Piéces fur les mifères de l'home. Après l'avoir confideré du côté des maux & de l'adverfité, n'y a-t-il pas quelque douceur à le confiderer du côté des plaifirs inocens & légitimes, dont il eft capable, & auxquels la bonté de Dieu femble l'avoir deftiné? Ses organes & fes fens montrent qu'il peut les goûter fans crime & fans remords, puis que Dieu ne l'a pas doüé de ces précieux avantages, pour n'en faire aucun ufage; il n'y a que l'excès & l'a bus qui foient défendus, parce qu'ils font un mal, & que le Créateur ne veut & ne permet que le bien. Tout nous conduit au bonheur; nos de firs y tendent; tous les objets qui nous environent nous y invitent; nôtre éxistence même eft un plaifir, lors qu'elle eft fans douleur. Il n'eft donc pas furprenant que l'Apôtre nous exhorte à nous réjouir: Soiés en joie. Mais cette joie n'eft pas une forte d'yvreffe, qui tire l'ame de fon état naturel, pour lui faire oublier l'ordre & la vertu ; joïe fauffe & fugitive, acompagnée de regrets, d'ennui & de chagrin, la joie à laquelle l'Apôtre nous exhorte eft douce, fage, raifonable & chrétienne: C'eft le fentiment d'un bonheur pur, légitime & durable. Dans les circonftances où nous fomes, où chacun fait des vœux, où la bienveuillance mutuelle fe dévelope de tout côté, on ne peut rien fouhaiter de meilleur à fes amis, & aux Homes en général, qu'une félicité, fondée fur la vertu; félicité conftante, parce qu'elle eft de tous les états, de tous les âges & au deffus des ateintes de la fortune; qu'elle eft conforme à nôtre nature, à nôtre destination, & qu'elle eft come le gage & le prélude d'une félicité éternelle. 1 નીચો ક ESSAI નવ Sur ces Paroles de l'Apôtre ST. PAUL. Il y a des Perfones mélancoliques, ou des L Fanatiques qui condannent fans aucune diftinction, tous les plaifirs; ils voudroient pouvoir fermer aux Homes toutes les avenües de la joie, & femer de ronces & d'épines la vie humaine. Ce n'eft pas le fentiment de ST. PAUL; cet Apôtre conoiffoit mieux que perfone la fragilité, le danger & le néant des faux plaifirs, mais il favoit auffi qu'il y en a d'innocens & de légitimes, dont le bon ufage ne nous eft pas interdit, & que fous l'Empire d'un Dieu jufte, bon & tout puiffant, les Mortels qui font fes Créatures & fes Sujets, ne font pas condannés à gémir fous le poids de leurs fers, & à maudire leur éxiftence. Il répand à pleines mains fes dons & fes bienfaits (*); il fe déclare nôtre ProtecA 3 (*) La fource la plus féconde du plaifir d'un Home raisonable, c'eft la contemplation de la nature, qui paroit d'autant plus belle, d'autant plus admirable, qu'on l'étudie avec plus d'atention & de |