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De vous depuis longtemps je fais un cas extrême
Mais laissez-moi toujours vous estimer de même,
Et souffrez que mon cœur, dans ses troubles divers,
Ne se présente point à l'honneur de vos fers;
Je m'en sens trop indigne, et commence à connaître
Que le ciel pour ce nœud ne m'avait point fait naître;
Que ce serait pour vous un hommage trop bas,
Que le rebut d'un cœur qui ne vous valait pas;
Et qu'enfin...

ÉLIANTE.

Vous pouvez suivre cette pensée :
Ma main de se donner n'est pas embarrassée;
Et voilà votre ami, sans trop m'inquiéter,
Qui, si je l'en priais, la pourrait accepter.

PHILINTE.

Ah! cet honneur, madame, est toute mon envie,
Et j'y sacrifierais et mon sang et ma vie.

ALCESTE.

Puissiez-vous, pour goûter de vrais contentements,
L'un pour l'autre à jamais garder ces sentiments!
Trahi de toutes parts, accablé d'injustices,

Je vais sortir d'un gouffre où triomphent les vices,
Et chercher sur la terre un endroit écarté
Où d'être homme d'honneur on ait la liberté.
PHILINTE.

Allons, madame, allons employer toute chose
Pour rompre le dessein que son cœur se propose.

FIN DU MISANTHROPE.

LE

MARIAGE FORCÉ.

Sganarelle.

Géronimo.

PERSONNAGES.

Dorimène, jeune coquette, promise à Sganarelle.

Alcantor, père de Dorimène.

Alcidas, frère de Dorimène.

Lycaste, amant de Dorimène.

Pancrace, docteur aristotélicien.

Marphurius, docteur pyrrhonien.
Deux Égyptiennes.

La scène est dans une place publique.

LE MARIAGE FORCÉ.

SCÈNE PREMIÈRE.

SGANARELLE, parlant à ceux qui sont dans sa maison.

Je suis de retour dans un moment. Que l'on ait bien soin du logis, et que tout aille comme il faut. Si l'on m'apporte de l'argent, que l'on me vienne querir vite chez le seigneur Géronimo; et si l'on vient m'en demander, qu'on dise que je suis sorti, et que je ne dois revenir de toute la journée.

SCÈNE II.

SGANARELLE, GERONIMO.

Géronimo, ayant entendu les dernières paroles de Sganarelle. Voilà un ordre fort prudent.

હૈ

Sganarelle. Ah! seigneur Géronimo, je vous trouve propos; et j'allais chez vous vous chercher.

Géronimo. Et pour quel sujet, s'il vous plaît ?

Sganarelle. Pour vous communiquer une affaire que j'ai en tête, et vous prier de m'en dire votre avis. Géronimo. Très-volontiers. Je suis bien aise de cette rencontre, et nous pouvons parler ici en toute liberté.

Sganarelle. Mettez donc dessus1, s'il vous plaît. Il s'agit d'une chose de conséquence, que l'on m'a proposée; et il est bon de ne rien faire sans le conseil de ses amis.

Géronimo. Je vous suis obligé de m'avoir choisi pour cela. Vous n'avez qu'à me dire ce que c'est. Sganarelle. Mais, auparavant, je vous conjure de ne me point flatter du tout, et de me dire nettement votre pensée.

Géronimo. Je le ferai, puisque vous le voulez. Sganarelle. Je ne vois rien de plus condamnable qu'un ami qui ne nous parle pas franchement. Géronimo. Vous avez raison.

Sganarelle. Et, dans ce siècle, on trouve peu d'amis sincères.

Géronimo. Cela est vrai.

Sganarelle. Promettez-moi donc, seigneur Géronimo, de me parler avec toute sorte de franchise. Géronimo. Je vous le promets.

Sganarelle. Jurez-en votre foi.

Géronimo. Oui, foi d'ami. Dites-moi seulement votre affaire.

Sganarelle. C'est que je veux savoir de vous si je ferai bien de me marier.

Géronimo. Qui, vous?

Sganarelle. Oui, moi-même, en propre personne. Quel est votre avis là-dessus?

Géronimo. Je vous prie auparavant de me dire une chose.

Sganarelle. Et quoi?

1 Mettez donc dessus, pour mettez donc votre chapeau. Locution elliptique qui n'est plus d'usage.

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