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onze acteurs de sa troupe à 6 livres chacun par jour, pour deux jours passés à Saint-Germain, pour y représenter les comédies de l'Avare et du Tartuffe au Château neuf.

4° Du 31 août 1669, autre quittance par Molière au trésoriergénéral des Menus-Plaisirs de 500 livres, pour l'impression de la comédie à ballet de la Princesse d'Élide1

La seconde de ces pièces avait été découverte en 1823; les trois autres l'ont été en 1825. Un plus grand nombre, sans doute, ne nous sera pas parvenu.

Nous avons en outre déjà parlé de la pension de 1000 livres qui fut accordée à Molière le 1er janvier 1663. Nous le voyons encore figurer pour 1000 livres sur une liste de gratifications datée du 4 juin 1666, et pour pareille somme sur une autre liste semblable du 7 décembre de la même année 2.

(33) Cette ordonnance du Roi, datée du 9 janvier 1673, « fait défense à toutes sortes de personnes de quelque qualité, condition et profession qu'elles soient, de s'attrouper et de s'assembler audevant et aux environs des lieux où les comédies sont récitées et représentées; d'y porter aucunes armes à feu, de faire effort pour y entrer, d'y tirer l'épée et de commettre aucune violence ou d'exciter aucun tumulte, soit au-dedans ou au-dehors, à peine de la vie, et d'être procédé extraordinairement contre eux, comme perturbateurs de la sûreté et de la tranquillité publique » (Le Théâtre-Français, par Chapuzeau, pag. 253 et suiv.)

(34) L'immense perruque des médecins résista cependant aux traits de Molière, et la génération qui nous a précédés a vu ce ridicule usage dans toute son exigence. Dans son Éloge historique de Corvisart, M. Cuvier, après avoir parlé des brillans débuts de ce savant médecin, ajoute : « Rien ne lui manquait plus, si ce

1. La Princesse d'Élide ayant été imprimée dans la description des Plaisirs de l'Ile enchantée, dont la première édition parut en 1665, Moliere, que cette concurrence eût privé d'un grand nombre d'acheteurs, ne fit pas imprimer sa pièce; ces 500 livres lui furent données sans doute à titre de dédommagement.

2. Documens authentiques et détails curieux sur les dépenses de Louis XIV, par M. Peignot, 1827, p. 103 et 121.

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n'est d'être lui-même à la tête d'un hôpital où il pût suivre en liberté les vues que son expérience naissante lui suggérait : les premiers maîtres de l'art l'en jugeaient digne; il se croyait luimême au moment d'atteindre cet objet de ses vœux, lorsqu'une cause, la plus légère du monde, le repoussa pour plusieurs années. Les habitudes et l'extérieur des médecins n'étaient guère moins antiques que le régime de la Faculté. Si Molière leur avait fait quitter la robe et le bonnet pointu, ils avaient au moins gardé la perruque à marteau que personne ne portait plus, et c'était dès leur entrée en fonctions qu'ils devaient s'en affubler, On assure que M. Corvisart et M. Hallé ont été les premiers à donner le scandale de ne la point prendre, et que cette légèreté, comme on l'appelait, leur nuisit beaucoup. Ce qui est certain, c'est que, dans l'occasion dont nous parlons, elle fut cause du désappointement de M. Corvisart, et cela de la part de la personne dont il aurait dû le moins s'y attendre. Une dame célèbre1, dont le mari a été la cause, au moins occasionelle, des plus grandes innovations qui aient eu lieu en France depuis l'établissement de la monarchie, venait de fonder un hôpital, et M. Corvisart souhaitait ardemment d'en être chargé; mais il se présenta en cheveux naturels, et cette innovation-là, elle n'osa prendre sur elle de la favoriser. Dès le premier mot elle lui déclara que son hôpital n'aurait jamais un médecin sans perruque, et que c'était à lui d'opter entre cette coiffure ou son exclusion. Il aima mieux garder ses cheveux. » (Recueil des Éloges historiques lus dans les séances publiques de l'Institut royal de France, par M. le baron Cuvier, t. III, p. 365.)

(35) Ce second enfant était une fille qui survécut à son père, et dont nous aurons occasion de parler plus tard. Elle fut nommée Esprit Madeleine; elle eut pour parrain le comte Esprit de Modène, et pour marraine Madeleine Béjart sa tante. ( Dissertation sur Molière, par M. Beffara, page 15.)

(36) La maison qu'occupait Molière à Auteuil était à l'entrée du village, du côté de la rivière. Elle a été détruite, et le terrain

1. Madame Necker.

qu'elle occupait fait maintenant partie de la propriété de M. le duc de Praslin. ( OEuvres de Molière, édition de M. Auger, tome I, page 132.)

(37) L'abbé Le Vayer, fils de La Mothe-le-Vayer, fut enlevé en septembre 1664, à l'âge de 35 ans environ, à sa famille et à ses amis. « Il avait, dit un commentateur de Boileau, un attachement singulier pour Molière, dont il était le partisan et l'admirateur. » Molière, à l'occasion de sa mort, adressa à son père un sonnet imprimé pour la première fois dans l'édition des OEuvres de Molière donnée par M. Auger, tome IX, page 503. Boileau lui avait dédié sa quatrième satire.

(38) On lit dans les Mémoires de L. Racine sur son père, Lausanne, 1747, page 32, que lors de son premier ouvrage, il fut pris en amitié par Chapelain, « qui lui offrit ses avis et ses services, et, non content de les lui offrir, parla de lui et de son ode si avantageusement à M. de Colbert, que ce ministre lui envoya cent louis, et peu après le fit mettre sur l'état pour une pension de six cents livres en qualité d'homme de lettres. »

On ne peut justifier Racine en disant qu'il n'attaquait Chapelain que comme auteur, car outre que de semblables distinctions ne sont pas d'un cœur reconnaissant, personne d'ailleurs n'était plus que lui sensible à la critique ; on sait qu'il pardonna difficilement à Chapelle, qu'il sollicitait de se prononcer sur sa Bérénice, de lui avoir répondu en riant: Marion pleure, Marion crie, Marion veut qu'on la marie; et la rime indécente qu’Arlequin mettait à la suite de la reine Bérénice le chagrinait au point de lui faire oublier le concours du public à sa pièce, les larmes et les éloges de la cour. (Mémoires sur Jean Racine, Lausanne, 1747, page 90).

(39) Grimarest rapporte l'anecdote suivante : « En revenant d'Auteuil, à son ordinaire, bien rempli de vin, car il ne voyageait jamais à jeun, il eut querelle au milieu de la petite prairie d'Auteuil avec un valet nommé Godemer qui le servait depuis plus de trente ans. Ce vieux domestique avait l'honneur d'être toujours dans le carrosse de son maitre. Il prit fantaisie à Chapelle en descendant d'Auteuil de lui faire perdre cette prérogative, et de

le faire monter derrière son carrosse. Godemer, accoutumé aux caprices que le vin causait à son maître, ne se mit pas beaucoup en peine d'exécuter ses ordres. Celui-ci se met en colère, l'autre se moque de lui. Ils se gourment dans le carrosse : le cocher descend de son siège pour aller les séparer. Godemer en profite pour se jeter hors du carrosse ; mais Chapelle irrité le poursuit et le prend au collet, le valet se défend, et le cocher ne pouvait les séparer. Heureusement Molière et Baron, qui étaient à leurs fenêtres, aperçurent les combattans. Ils crurent que les domestiques de Chapelle l'assommaient, ils accourent au plus vite. Baron, comme le plus ingambe, arriva le premier, et fit cesser les coups. Mais il fallut Molière pour terminer le différend. « Ah! Molière, disait Chapelle, puisque vous voilà, jugez si j'ai tort. Ce coquin de` Godemer s'est lancé dans mon carrosse, comme si c'était à un valet de figurer avec moi. Vous ne savez ce que vous dites, répondit Godemer; monsieur sait que je suis en possession du devant de votre carrosse depuis plus de trente ans, pourquoi voulez-vous me l'ôter aujourd'hui sans raison ? Vous êtes un insolent qui . perdez le respect, répliqua Chapelle; si j'ai voulu vous permettre de monter dans mon carrosse, je ne le veux plus; je suis le maître, et vous irez derrière ou à pied. Y a-t-il de la justice à cela ? dit Godemer; me faire aller à pied présentement que je suis vieux et que je vous ai si bien servi pendant si long-temps ! Il fallait m'y faire aller pendant que j'étais jeune, j'avais des jambes alors; mais à présent je ne puis plus marcher. En un mot comme en cent, ajouta ce valet, vous m'avez accoutumé au carrosse, je ne puis plus m'en passer, et je serais déshonoré si l'on me voyait aujourd'hui derrière. Jugez-nous, Molière, je vous en prie, dit M. de Chapelle, j'en passerai par tout ce que vous voudrez. Eh bien! puisque vous vous en rapportez à moi, dit Molière, je vais tâcher de mettre d'accord deux si honnêtes gens. Vous avez tort, dit-il à Godemer, de perdre le respect envers votre maitre, qui peut vous faire aller comme il voudra. Il ne faut pas abuser de sa bonté : ainsi je vous condamne à monter derrière son carrosse jusqu'au bout de la prairie, et là vous lui demanderez fort honnêtement la

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permission d'y rentrer: je suis sûr qu'il vous la donnera. — Parbleu, s'écria Chapelle, voilà un jugement qui vous fera honneur dans le monde. Tenez, Molière, vous n'avez jamais donné une marque d'esprit si brillante. Oh bien! ajouta-t-il, je fais grace entière à ce maraud-là en faveur de l'équité avec laquelle vous venez de nous juger. Ma foi, monsieur, dit-il encore, je vous suis obligé, car cette affaire-là m'embarrassait; elle avait sa difficulté. Adieu, mon cher ami, tu juges mieux qu'homme de France. »

(40) Bret, dans son Supplément à la vie de Molière (tome I, pag. 78 de l'édition de 1773), dit qu'en 1667 Lulli eut à soutenir une affaire horrible et criminelle contre l'intendant-général des bâtimens de S. A. Monseigneur. Nous ignorons de quelle affaire Bret voulait parler; mais nous étions porté à croire que, quelle qu'elle fût, elle n'était ni horrible ni criminelle, puisque le 9 septembre de l'année suivante, le Roi et la Reine lui avaient fait l'honneur de tenir son fils sur les fonts de baptême (Dissertation sur Molière, par M. Beffara, page 15), et que Louis XIV déplora sa perte en disant qu'il avait perdu deux hommes qu'il ne recouvrerait jamais, Molière et Lulli. ( Addition à la Vie de Molière, par Grimarest, page 62.) Nous ne nous étions pas trompé. Nous nous sommes assuré que ce procès ne pouvait être honteux ou horrible que pour son adversaire. Voici ce qu'on lit dans l'Histoire du théâtre de l'Académie royale de musique en France, 2e édition, ire partie, pages 46, 47 : « Lulli eut un grand procès en 1675 contre Henri Guichard, intendant des bâtimens de S. A. R. MONSIEUR, frère unique du Roi Louis XIV. Il eut avis que Guichard, qui avait fait les premiers établissemens de l'Opéra, jaloux des grands avantages que Lulli retirait du privilège que le Roi lui avait accordé, avait formé le dessein de l'empoisonner dans du tabac préparé à cet effet. Lulli en porta sa plainte au Roi, qui voulut bien prendre connaissance de cette affaire; elle fut ensuite renvoyée à la justice ordinaire du Châtelet, et fit beaucoup de bruit à la cour et à la ville; il y eut de grandes informations faites à ce sujet; seize témoins furent entendus et confrontés ; des juges pris à parti, des monitoires publiés et affichés dans tous les carrefours et

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