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Comme il eft vrai qu'un Corps ne fçauroit avancer Sans qu'un autre en fon lieu ne se vienne placer, Il fe doit faire en cercle une foudaine trace. Le Corps premier preffé preffe jufqu'au dernier Qui ne fe meut qu'au temps où ce premier Se difpofe à quitter la place; Ainfi tout presse ensemble, & quel que foit l'Espace Décrit par ce prompt Mouvement,

Cette Action, fans que rien s'embarasse, Se commence en un point, finit en un moment. ရာ

Pour juger comme à l'œil du Reffort circulaire
Dont fe fait cet enchaînement,

Empruntons de la Danfe une Image legere,

Figurons-nous à l'ombrage d'un Bois,

Des Bergeres en rond qu'anime une Bergere
Des aimables Sons de fa Voix;

Si-tôt

que la Chanfon commence, Toutes en même temps à l'ordre de la Danse Obéiffent fi promptement,

Que notre œil attentif à fuivre la Cadence,

Trouvant par tout un égal Mouvement N'en discerne la fin, ni le commencement.

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Les Etres fucceffifs ont ainsi leur Naissance,
Leur uniforme difference.

Il fuffit pour conftruire, & mouvoir l'Univers

D

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D'avoir de petits Corps, & plus, & moins legers
Qui fe cedent, qui fe mélangent,

Qui mobiles toujours, en differens Degrez,
Et diversement figurez,

Avec des Nœuds fecrets fe joignent, & s'arrangent,
Dont les Tours & Retours inceffament se changent;
Ils formeront ce Tout harmonieux >

Toujours égal, toujours diffemblable à nos yeux,

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DES LOIX DU MOUVEMENT.

MAIS comme la Matiere, en tout si variable,
A des Loix dont jamais elle ne peut fortir,
Le Mouvement de même a fon Ordre immuable,
Auquel on doit l'affujettir.

Son Idée en un mot précisément tracée ;
Notre Axiome general,

Nous ne reconnoîtrons qu'un Mouvement local
Nul autre Mouvement n'eft clair à la Penfée.

ពួ

Le Mouvement eft le transport

D'un Corps qui s'ébranle, & qui fort
D'auprès des Corps qui l'environnent,

,

Et qui comme en repos paroiffent le toucher
Pour joindre d'autres Corps qui cedent, & lui donnent
Le Lieu nouveau qu'il vient chercher,

Ce Principe nous frape avec pleine évidence; De lui-même nul Corps ne fçauroit fe mouvoir. Si par un autre Corps fon Mouvement commence, De degrez en degrez il s'agit de fçavoir D'où celui qui le donne a pû le recevoir,

Ainfi donc la Raifon toujours nous détermine

A recourir à ce premier Moteur,

Dont tout dépend, tout prend fon Origine,
L'Auteur de la Nature, & le Confervateur.
Så Puiffance immortelle, immuable & feconde,
Quand par le Mouvement elle anima le Monde,
Laiffa le Mouvement dans le Monde imprimé,
Et l'y maintient toujours tel qu'elle l'a formé.

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Dieu mit dans la Matiere, à certaine mefure,
Le Repos & le Mouvement t;

Et fon puiffant Concours fait que dans la Nature
La même quantité demeure conftament.
Mais il eft aifé de comprendre

Que les Etres divers changeant à tout moment,
Le Mouvement de l'un à l'autre doit s'étendre ;
Un Corps à d'autres Corps le tranfmet aisément ̧
Et de même peut le reprendre.

Autant qu'il en donne, il en perd;
Et par ce merveilleux Concert,

Toujours le même Etat subsiste en la Nature,

Et l'on void

que tout change, & l'on void que

ရာ

tout dure.

Dans chaque Corps Repos, & Mouvement
Sont deux Modes divers qu'il garde également.
Comme un Corps en repos dans ce repos perfiste,
S'il n'a pour le mouvoir un externe Secours;

De même s'il fe meut il fe mouvra toujours

A moins qu'il ne trouve en fon Cours
Quelque autre Corps qui lui refifte.

Mais nous qui de nos Sens reglons mal les Rapports,
Accoutumez ici bas dès l'Enfance

A voir ceffer le Mouvement des Corps,
Nous avons decidé, fur cette experience,
Que chacun de foi-même arrête ses efforts,
Et que c'est au Repos que tend leur Violence.
Nous aurions dû plûtôt penser,

Que dans le même Etat leur course continue;
Et qu'on ne la void point s'affoiblir, ou ceffer
Si rien ne l'interompt, ni'ne la diminue.
On peut ici confiderer

Qu'en fon Etat prefent chaque Etre doit durer,
Et s'y maintient toujours fi l'on ne l'en retire ;-
La Nature l'ordonne, & ne peut obliger

Rien par

foi-même à fe détruire.

Il faut pour ce Mobile un obftacle étranger
Qui le traverse, & le false changer.

C'est ce que par l'épreuve il faut que l'on confeffe. L'Air nous environnant d'imperceptibles Flots, Les humides Vapeurs, & l'Onde plus épaisse Font que des Corps lancez tout le Mouvement ceffe, Et qu'après certain temps on les void en Repos,

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