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tion librement consentis, par lesquels un État se met sous la protection d'un autre, avec les effets expliqués au § 22 cidessus;

ensuite ceux de garantie, par lesquels une partie promet à l'autre la conservation ou l'acquisition de certains droits ou choses, ou bien d'une universalité de biens et de choses. Ils ont pour effet de mettre à la disposition de l'allié, sur sa réquisition, toutes les forces de la partie obligée, autant que l'exige la défense des droits garantis contre des prétentions et des attaques injustes. Néanmoins l'État garant ne répond pas du préjudice souffert par un allié malgré ses efforts, à moins qu'il n'ait promis également de le garantir en cas d'éviction.2

L'alliance la plus intime s'établit par un traité d'union fédérale, dont nous allons traiter au paragraphe suivant.

Suite. Traités d'union fédérale.

§ 93. Les traités d'union fédérale de plusieurs États offrent cette particularité qu'ils se proposent un but commun, qui doit être atteint par des institutions communes et permanentes. Leur efficacité pourra s'étendre aux affaires extérieures comme aux intérieures dans le domaine tout entier des intérêts moraux et internationaux. Leur légitimité repose sur la nature sociale de l'espèce humaine, sur l'obligation de l'État de favoriser le bien-être de ses membres par le développement et l'association la plus complète des forces physiques et morales.3 Aussi ces unions, pour être valables, n'ont-elles nullement besoin d'être reconnues par les États étrangers: l'union fédérale, qui n'est pour ainsi dire qu'une extension des États reconnus déjà dont elle se compose, existe par elle-même de tierces puissances ne peuvent refuser de recevoir ses représentants communs, ses déclarations communes sans commettre d'offenses,

1 Neyron, Essai historique et politique sur les garanties. Göttingen 1777. Moser, Vers. V, p. 455, et surtout Günther II, p. 243 suiv.

2 Wheaton, Intern. Law. § 10. de Neumann § 259.

3 Suivant l'ancien proverbe:,,Ubi societas ibi et jus est." V. Cocceji

ad Proleg. Grotius § VIII.

et le droit international regarderait un refus de ce genre comme

non avenu.

A cette catégorie appartiennent les confédérations d'États proprement dites, plus ou moins étendues (§ 21), l'union douanière allemande et toute autre union fondée en vue de l'adoption d'un système commercial et industriel commun, soutenu par des mesures communes. La volonté expresse des souverains contractants forme la loi fondamentale de ces unions: à son défaut on a recours aux principes généraux du droit international, notamment au principe suprême de la justice, à savoir d'une juste égalité, ainsi qu'aux règles sociales qui en découlent, Ce sont surtout les suivantes :

Les droits et les obligations des membres fédéraux sont égaux. La part de chacun dans les profits et les charges de l'union se détermine à raison des ressources et des forces par lui apportées.

La majorité ne peut introduire aucun changement dans la constitution fédérale dès qu'un seul membre s'y oppose. Mais aucun ne peut empêcher non plus par son opposition l'exécution constitutionnelle des principes fédéraux, tant que l'union subsiste. Plusieurs membres de l'union peuvent aussi, sans violation de leurs devoirs, concerter entre eux et mettre à exécution des mesures qui ne sont pas contraires à la constitution fédérale et ne portent aucun préjudice aux autres membres. Tel est le sens de la maxime applicable également aux associations politiques: „, in re pari potiorem esse prohibentis causam."1

Dans les cas mêmes où l'on applique le principe de la majorité des voix, les résolutions par elle décrétées ne peuvent obliger les membres qu'autant qu'elles sont comprises dans les devoirs fédéraux. A plus forte raison elle ne peut, sans le consentement libre des co-intéressés, prendre des résolutions

1 L. 28. D. communi divid. V. Ludolph. Hugo, De statu regionum German. (Fritsch, Exercit. juris. t. III, p. 1 suiv.) chap. 6 § 17. Il dit toutefois, avec l'opinion commune, ce qui suit: Quando aliquid commune est ut universis, id ratum est, quod major pars statuerit; quando vero commune est ut singulis tunc potior est causa prohibentis. Gail, De pignor. chap. 20; Anton Faber in Cod. III, 26, defin. I, n. 7.

relatives aux rapports internationaux et indépendants de l'union. Ces derniers sont compris sous la dénomination de „jura singulorum," dont la définition, depuis la paix de Westphalie (Instr. Osnabr. V, 52) surtout, a toujours présenté des difficultés sérieuses.1

$ 94.

Effets généraux des traités.2

Tous les traités internationaux sont des contrats „, bonae fidei.“ Ils obligent non- seulement à tout ce qui a été stipulé expressément, mais aussi à ce qui convient le mieux à la matière du contrat et à la commune intention des parties contractantes. C'est là l'esprit des conventions.3 Les engagements contractés par le souverain au nom de l'État, dans l'exercice de ses fonctions, même ceux d'une nature mixte, obligent ce dernier en entier et sont d'une nature réelle. Ils continuent à être valables tant que l'État subsiste, même sous une forme et sous une constitution différentes (§ 24), sauf les modifications qui résultent du changement des rapports: la cessation complète de ces rapports entraîne leur abrogation (§ 98). Les engagements contractés par le chef de l'État et relatifs à ses droits souverains, se transmettent régulièrement à tous ses successeurs, car ils grèvent l'État lui-même: ses engagements privés se transmettent à ses successeurs privés seulement, moins que, dans l'un comme dans l'autre cas, il n'ait promis qu'un fait purement personnel. Les traités publics réels qui concernent les sujets et leurs rapports individuels, ont la même

1 Ab Ickstadt, Opusc. t. II, 1-5. Une définition semblable a été faite pour la Confédération germanique par l'Acte final de 1830, art. 15. V. Klüber, Oeffentliches Recht des deutschen Bundes. § 129.

2 Neyron, De vi foederum inter gentes. Goetting. 1778.

3 V. Code Nap. art. 1156–1158.

4 Les anciens auteurs, tels que Grotius et Pufendorf (VIII, 9, 6), et leurs disciples se sont livrés à ce sujet à de longues recherches. Depuis lors les rapports entre le souverain et l'État ont été beaucoup éclaircis. Vattel déjà (II, 12, § 183 suiv.) professe des notions exactes. La simple mention du souverain, sans celle de l'État, ne change rien à l'affaire. On pouvait demander avec raison si la sainte Alliance était un traité réel ou personnel? D'après les explications données dès le commencement par

autorité que les lois de l'État, s'ils ont été contractés et publiés régulièrement.1

Un traité public ne peut jamais avoir pour effet d'imposer aux États ou aux souverains, représentants ou organes de la justice, des obligations illicites (§ 83). Lors de son exécution il faut procéder avec modération et avec équité, d'après la maxime qu'on doit traiter les autres comme on voudrait être traité soi-même. Il faut en conséquence accorder des délais convenables, afin que la partie obligée subisse le moins de préjudice possible. A moins qu'il ne s'agisse de prestations assujetties à certains termes fixes, l'exécution doit être précédée d'une sommation préalable: c'est à partir de ce moment que la partie obligée est mise en demeure et qu'elle est tenue à des dommages-intérêts qui, en matière internationale, ont un caractère semblable à celui qu'ils ont en matière civile.

Dans le livre II, qui traite du droit des actions, nous expliquerons quels sont les effets de la non-exécution des contrats internationaux.

Décidément un traité ne peut par lui-même ni profiter ni nuire à de tierces puissances. Celles-ci, s'il leur fait éprouver un préjudice direct ou indirect, peuvent prendre des mesures conservatoires et réserver provisoirement leurs droits par une protestation, laquelle toutefois ne préjudiciera ni à la validité ni à l'exécution d'un traité régulièrement conclu entre les parties intéressées.2

plusieurs gouvernements, l'idée d'un traité public devait en être exclue. V. Wiener Jahrbücher de 1822. t. IV. p. 93. Aujourd'hui il n'en est plus question.

1 Grotius II, 14. 9; II, 22. 5. de Neumann § 333. Pufendorf VII, 4. 1. Hert, Opusc. II, 3, p. 82.

2 L'Église romaine et ses membres ont quelquefois protesté contre les traités qui lui étaient nuisibles; p. ex. l'évêque d'Augsbourg contre la paix de religion de 1555, Rome contre le traité de Westphalie, et plus tard. Les États n'y ont pas toujours eu égard; l'Église aussi est assujettie aux nécessités de ce monde.

Interprétation et application des traités
par voie d'analogie.

§ 95. En cas de doute, les traités s'interprètent d'après l'intention conforme des parties:1 ultérieurement d'après ce que, aux termes de la convention, l'une est présumée avoir promis à l'autre, selon les règles de la bonne foi et de la logique. Ainsi celui qui a stipulé n'a pas le droit d'exiger ce qui ne lui a pas été promis distinctement:2 ce qui n'a pas été rédigé clairement, ne peut pas s'interpréter contre le souverain et la nation obligés. Lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit l'entendre dans le sens le moins onéreux. Lorsqu'on a stipulé une chose générique (genus), on ne prendra dans le doute qu'une qualité ordinaire et moyenne, ainsi qu'il a été généralement établi en matière civile d'après les dispositions du droit romain. Ce qui découle des termes précis de l'engagement comme une conséquence nécessaire, peut être exigé comme y étant compris tacitement. Pareillement un traité s'applique par voie d'analogie à des rapports nouveaux essentiellement identiques, à moins que les parties, en contractant, n'aient eu exclusivement en vue ceux précédemment établis, ou que, ces rapports ayant été changés, le traité n'ait perdu son efficacité légale ou physique.5 Les parties intéressées seules ou l'arbitre par eux choisi peuvent naturellement donner aux traitės publics une interprétation forcément obligatoire: toutes

1 V. Grotius II, 16 et le commentaire de Cocceji; Pufendorf V, 12, surtout Vattel II, 17, qui s'étend longuement sur l'interprétation des conventions. V. aussi de Neumann, Jus princ. loc. cit. tit. 6. § 221. Rutherford, Instit. II, 7. Crome et Jaup, Germanien. II, 2. 161. Pando p. 230 suiv, Riquelme I, p. 192. Wildman I, p. 177. Phillimore II, 79. Les propositions développées dans le texte du présent paragraphe s'expliquent par ce qui a été dit au paragraphe précédent.

2 Mably, Droit public. I, p. 59.

3 de Neumann § 225. Vattel § 277.

4 L. 37. D. de legatis I.

5 Grotius II, 16, § 20. 25. Pufendorf V, 12. 17. 20. Vattel II, 17, § 290. 296. 304. 305. H. Cocceji, De clausula: Rebus sic stantibus. La règle ci-dessus expliquée s'appuie surtout sur la Loi 40 in fin. Dig. de pactis.

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