Images de page
PDF
ePub

sentence même, qui a, entre les parties, l'autorité d'une transaction régulière. Sous ce rapport les dispositions du droit romain, relatives à la validité des sentences arbitrales, conçues dans un esprit trop étroit, ont fait place aux règles plus larges du droit moderne. C'est ce qu'il faut dire notamment de la disposition romaine qui, dans le cas où une clause pénale avait été stipulée, affranchissait la partie défaillante des effets de la sentence, lorsqu'elle payait la somme promise.1

La décision arbitrale est susceptible d'être attaquée dans les cas suivants:

1° Si elle a été rendue sans compromis valable ou hors des termes du compromis;

2o si elle l'a été par des arbitres absolument incapables; 3° si l'arbitre ou l'autre partie n'a pas agi de bonne foi; 4° si les parties ou l'une d'elles n'ont pas été entendues; 5° s'il a été prononcé sur choses non demandées; 6° si ses dispositions sont contraires d'une manière absolue aux règles de la justice, et ne peuvent par conséquent former l'objet d'une convention (§ 83).

De simples erreurs au contraire qui peuvent être reprochées au contenu de la sentence, lorsqu'elles ne sont pas le résultat d'un esprit partial, ne constituent point une cause de nullité.2 Néanmoins une erreur de calcul et, dans l'engagement décrit ci-dessus et connu sous le nom d',, arbitratio", la preuve d'une erreur de fait donneront lieu à la demande de rectification.3

L'arbitrage se présente sous des formes très-variées dans l'histoire. Chez les Grecs nous le rencontrons sous la forme d'un recours auprès d'une ville tierce ou alliée (óg Ezzhytos).a Chez les Romains de la première époque il porte le nom de ,,reciperatio". Dans les confédérations et les unions d'États,

5

1 V. Grotius III, chap. 20. 46.

2 V. Grotius, loc. cit. Vattel II, chap. 18. § 329. Wildman I, p. 186. 3 C'est ce qui est appelé „, reductio ad boni viri arbitrium" dans les

lois 76. 78. 79. D. pro socio et loi 9. D. qui satisd. coguntur.

4 V. Heffter, Athen. Gerichtsverf. p. 340.

5 Gallus Aelius dans Festus:,,Reciperatio est, cum inter populum et reges, nationesque ac civitates peregrinas lex convenit, quomodo per reciperatorem reddantur res reciperenturque, resque privatas inter se persequantur." V. Carl Sell, Die Recuperatio der Römer. Braunschw. 1837.

2

l'institution de tribunaux fédéraux a reçu un certain caractère fixe et en quelque sorte politique, qu'avaient déjà, dans les confédérations grecques, 1 notamment dans la ligue Achéenne, les réunions amphictyoniques, bien que leur importance ait été sans doute exagérée. Une institution moderne de cette nature était celle dite austrégalienne, chargée de la mission de statuer sur les contestations nées entre les Souverains de la Confédération germanique de 1815 et qui, suivant l'arrêté fédéral du 30 octobre 1834 (article 12), pouvait être remplacée par une cour arbitrale. Ella a cessé depuis 1866. Aujourd'hui les gouvernements réunis du nouvel Empire vident leurs différends particuliers au conseil fédéral.

Actes de fait et représailles.

§ 110. Le droit d'user de voies de fait commence au moment même où les tentatives faites pour arranger un conflit à l'amiable ont échoué, ou lorsque des circonstances urgentes ne permettent pas de recourir à cette mesure préliminaire. En ce cas, s'il s'agit de réclamations liquides, on s'empare de leurs objets partout où ils se trouvent, ou d'un équivalent à la créance, en saisissant des biens appartenant à la partie adverse et qui se trouvent déjà dans le pouvoir de l'État créancier. Dans les autres cas on aura recours à des actes de violence, soit en entrant en état d'hostilités ouvertes (dont nous nous occuperons au paragraphe suivant), soit en usant d'abord de représailles. Par représailles on entend aujourd'hui toutes les mesures de fait dont un gouvernement se sert vis-à-vis d'un autre État, des sujets de ce dernier ou de leurs biens, dans le but de contraindre la puissance étrangère de faire encore droit sur les questions en litige ou d'en obtenir une juste satisfaction, ou de se faire

p. 687.

1 Polybe II, 37. 10. Tittmann, Griechische Staatsverfassung

2 de Leonhardi, Das Austrägalverfahren des deutschen Bundes. Frkf. 1838. Jordan dans Weiske, Rechts - Lexicon I, p. 474. Zachariae, Deutsches Staatsrecht II, p. 719. Zöpfl, Allgemeines und deutsches Staatsrecht I, p. 359.

1

2

au besoin justice lui-même. Anciennement les représailles se faisaient surtout par des lettres de marque délivrées par un gouvernement à ses sujets ou même à des étrangers, par lesquelles il les autorisait à commettre toutes sortes d'exactions et de violences sur la nation ennemie. Il y avait des représailles spéciales, que l'on accordait aux offensés eux-mêmes, et des représailles générales, qui autorisaient tous les sujets à courir. sus à l'ennemi. Celles-ci ne différaient pas à la vérité de la pleine guerre, tandis que celles-là n'étaient autre chose que la faide autorisée par l'État. Des traités ont successivement modifié cet usage, qu'aujourd'hui on rencontre à peine dans le code des nations sous la forme de la course, pratiquée exclusivement sur mer (§ 137). Les moyens usités encore à présent sont les suivants: 4

3

Premièrement, la cessation dans l'accomplissement des engagements pris envers l'autre État ou envers ses sujets; secondement, la suspension de l'intercourse amicale entre les deux États, soit en entier, soit en partie;

troisièmement, la saisie et puis la séquestration de sujets et de biens ennemis.

Simple mesure de précaution, une telle séquestration a exclusivement pour but d'offrir un gage, sans conférer aucun droit quelconque sur la vie des personnes ni sur les biens séquestrés. Ces derniers toutefois, si la satisfaction exigée continuait à être refusée, pourront incontestablement servir à la réparation des intérêts lésés. De même la partie offensée pourra retenir les sujets ennemis comme otages. Car les anciens auteurs

1 Les nombreuses monographies sont indiquées par d'Ompteda § 288. de Kamptz § 270. Le mot représailles dérive de reprendre, en anglosaxon withernam.

2 V. sur les anciennes formes Hüllmann, Städtewesen. t. I, p. 197. Martens, Caperei I, § 4. Pütter, Beiträge zur Völkerrechtsgeschichte I, p. 49. P. Frider., De process. I, cap. 46 suiv. Valin III, 10. p. 414.

3 Oke Manning p. 108. Sur l'abolition ultérieure de cette sorte de représailles v. Ortolan I, p. 396. Wildman I, p. 192.

4 Sur l'usage international moderne voir Grotius III, 2. de Neumann, Jus principum priv. t. VIII, § 35. de Steck, Essais. p. 42. Vattel II, § 342 suiv. Wheaton IV, 1. § 2 et 3. Wurm, Staats- Lexicon XII, p. 124. Halleck, Int. Law, chap. 12, § 11.

et encore Cocceji (sur Grotius) se trompent évidemment lors qu'ils soutiennent qu'il est permis d'attenter à la vie de ces malheureux.1,

Tout refus et tout retard qu'une partie oppose arbitrairement aux justes réclamations de l'autre, donnent à celle-ci le droit incontesté de recourir à des représailles, peu importe d'ailleurs sous quelles formes ce refus et ce retard se manifestent, fût-ce sous celle d'un acte législatif, ou sous celle d'une décision judiciaire ou d'un arrêté administratif. Mais il appartient aux gouvernements seuls d'ordonner l'application de mesures semblables.

Certainement des puissances tierces ne sont tenues en aucune manière de donner suite aux réclamations qui leur sont adressées à ce sujet par la partie lésée ou même par l'État intéressé. Elles ne peuvent faire usage d'actes de représailles dans l'intérêt d'une autre puissance, qu'autant que les traités leur imposent un devoir d'intervention. Ce devoir se manifeste surtout avec une certaine force dans le sein des États fédératifs, et l'article 37 de l'Acte final de Vienne l'a consacré en 1828 expressément au profit de la Diète germanique. Aussi en Suisse il avait été reconnu également qu'un Canton pourrait exercer des représailles dans l'intérêt d'un autre Canton. Du reste une tierce puissance pourrait participer aux représailles d'une autre, lorsque sa coopération aurait pour but de mettre un terme aux violations du droit international ou à des procédés contraires à l'humanité et à la justice. En ce cas les États ne font que remplir une mission commune qui leur est tracée naturellement. Organes suprêmes et multiples de l'huma

3

Schilter, De jure obsidum, considérait déjà des sujets arrêtés par mesure de représailles comme des otages. V. aussi Vattel II, § 351.

2 Des exemples sont cités par Ch. de Martens, Causes célèbres II, p. 1. 151 suiv. Pour le principe v. Grotius III, 2. § 4. 5. Bynkershoek, Quaest. jur. I, 24. Oke Manning, Law of nations p. 107. Wurm à l'endroit cité p. 125. Wildman p. 195.

3 de Martens, Völkerr. § 256 (261). Bynkershoek (de foro legator. chap. 22) admet la faculté d'un gouvernement d'exercer des actes de représailles dans l'intérêt d'un autre; contra Oke Manning p. 111 et Wildman t. I, p. 193. Halleck XII, § 28.

nité, ils sont appelés à en faire respecter les lois partout où elles sont violées.

L'embargo, le blocus et les menaces de guerre
effectives.

§ 111. Pour exercer des représailles, les états maritimes se servent parfois de simples mesures d'embargo et de blocus.

L'embargo (,,embargar" en espagnol, arrêter) est un acte conservatoire ou préparatoire qui consiste à faire arrêter provisoirement les navires trouvés dans les ports ou dans les mers intérieures d'un territoire, dans le but d'en empêcher la sortie. Invention d'origine britannique, elle a passé successivement dans les lois et coutumes des autres nations.1

Appliquée après le commencement d'un état de guerre, ou suivie d'une déclaration de guerre, cette mesure va produire les effets que nous retracerons au chapitre suivant. Quelquefois encore l'embargo est un simple acte de sûreté intérieure ordonné par un gouvernement, notamment dans le but d'empêcher que certaines nouvelles sur la situation du pays ne soient portées au dehors; ou bien encore pour faciliter des recherches de police ou judiciaires. Un gouvernement peut en outre, en cas de nécessité urgente, user de l'embargo pour exercer le droit d'angarie ($150). Enfin des représailles peuvent se produire sous la forme d'un embargo. Il est constant toutefois que, cet acte ayant manqué de but et n'étant pas suivi d'une déclaration de guerre, tout préjudice résultant de la détention arbitraire doit être réparé.3

1 Les ouvrages relatifs à cette matière sont indiqués par de Kamptz § 276. V. notamment de Réal, Science du gouvern. V. p. 630. Jouffroy, Droit maritime p. 31. Nau, Völkerseerecht (1802). § 258 suiv. M. Poehls, Seerecht IV, § 526. Massé, Droit commercial § 321 suiv. Karseboom, De navium detentione, quae vulgo dicitur Embargo. Amsterd. 1840. Halleck XII, § 25.

2 Wheaton IV, 1. § 4. Phillimore III, § 21. Halleck § 27.

9 de Steck, Essais. 1794. p. 7. Jacobsen, Seerecht p. 531. M. Poehls, loc. cit. p. 1170. Plusieurs traités, tels que ceux conclus le 11 juillet 1799 entre la Prusse et les États-Unis (art. 16), le 30 mai (11 juin) 1801 entre

« PrécédentContinuer »