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Forteresses, par les Commissaires nommés des deux Parts, à l'équité & la discrétion desquels on remettra la décision; & encore avec la Condition, que l'ancienne Forteresse de Taganrhock déjà démolie, ne soit point rétablie, & que la Russie ne pourra ni sur la Mer de Zabache, ni sur la Mer Noire, construire & avoir de flotte & d'autres navires.

IV. Et afin que les Sujets des deux Empires soient plus positivement instruits des limites qui seront déterminées, aussitôt après la Confirmation du présent Traité de Paix, les deux Empires nommeront & expédieront les susdits Commissaires ayant la capacité requise, & munis de Pleins pouvoirs & d'instructions suffisantes, pour que leur commission ne soit sujette à aucune vaine difficulté, & que venant à se rassembler en vertu du présent Traité, ils marquent sans délai les limites entre les deux Empires, & après avoir mis dans les lieux convenables, les bornes & signaux qui doivent servir désormais & toujours, ils confirment avec les Instrumens & Ecritures accoutumées toutes les dites limites, en y spécifiant toutes les particularités concernant les dites limites; lesquels Commissaires devront avoir rempli & parachevé leur Commission dans l'espace de six mois, à compter du jour de l'échange des Ratifications du présent Traité.

V. Les Cosaques & Calmoucks, Sujets de Sa Majesté Impériale & de l'Empire des Russies, ainsi que toute autre Nation sujette du dit Empire, n'entreprendront aucune invasion & ne commettront aucune hostilité contre les Tartares de Crimée, Sujets de l'Empire Ottoman, ainsi que contre les autres Nations & Tartares Sujets du même Empire, & ne leur feront aucun mal ou dommage. Les Sujets s'abstiendront de toute pareille entreprise, & de toute autre contrariété à cette sainte Paix; & si effectivement ils viennent à commettre quelque sorte de témérité, en tel cas ils seront punis rigoureusement. De même les Sujets de l'Empire Ottoman, les Tartares de Crimée, & généralement tous les autres Sujets de la Porte Ottomane, de quelque nom & qualité qu'ils puissent être, n'entreprendront aucune invasion & ne commettront aucune hostilité contre les Villes, Bourgs & lieux du Domaine de Sa Majesté Impériale de Toutes les Russies, ainsi que contre ses Sujets, tant de la grande que de la petite Russie, & contre les Villes des Cosaques sujets de Sa Majesté Impériale, & leurs habitations situées sur le Boristhène, le Tanaïs & ailleurs, ni contre les petites Forteresses, Villages, & leurs Habitans, en-deçà des limites de l'Empire de Toutes les Russies, telles qu'elles seront convenues & fixées; ils ne commettront aucune hostilité & éviteront de faire aucun dommage secrètement, comme à découvert, en faisant des Esclaves, en emmenant les bestiaux, ou en les inquiétant de quelque autre manière. Et s'ils osent en quelque manière que ce soit faire tort ou dommage, ou agir hostilement contre les Sujets ou vassaux de Sa Majesté Impériale, ils ne seront point protégés; mais selon les Loix Divines, le droit de la

justice, & l'énormité du délit, ils seront rigoureusement punis. On recherchera tout ce qui pourroit avoir été violemment enlevé de part & d'autre, & on le restituera aux Propriétaires.

VI. Quant aux deux Cabardies grande & petite, & les Nations qui les habitent, il est convenu des deux Parts, que ces deux Cabardies resteront libres, & ne seront soumises à aucun des deux Empires, mais serviront de barrière entr'eux; & que, de la part de la Sublime Porte, ni les Turcs ni les Tartares ne s'ingéreront dans ces pays & ne les inquiéteront, & de même que, de la part de l'Empire des Russies, ils ne seront point molestés, mais que toutefois, selon l'ancienne coutume, l'Empire des Russies prendra des ôtages des deux Cabardies, pour le seul motif de maintenir la tranquillité, étant libre à la Porte Ottomane d'en user de même pour la même fin; & au cas que les susdits peuples des Cabardies donnent sujet de plainte à l'une des deux Puissances, il sera permis à chacune de les châtier & de les punir.

VII. Tous les prisonniers & esclaves faits, soit avant, soit depuis la guerre, en quelque occasion & pour quelque motif que ce soit, détenus jusqu'à présent dans les deux Empires, soit militaires ou de toute autre condition (excepté ceux qui, dans l'Empire des Russies, auroient embrassé la Réligion Chrétienne, & ceux qui, dans l'Empire Ottoman, auroient embrassé le Mahométisme,) sans délai, après la Ratification de ce présent Traité de Paix, sans échange & rançon, tous sans exception aucune, tant qu'il s'en trouvera pour le présent ou à l'avenir dans les deux Empires, seront aussitôt délivrés & renvoyés ; & au sujet de la liberté des dits prisonniers, on publiera les ordres les plus exprès dans toutes les Villes & Provinces des deux Empires, afin que leur affranchissement & congé soit effectivement accordé sans difficulté ou tergiversation aucune. Et tous les Esclaves qui, depuis la conclusion de ce Traité ou durant cette Paix, auront été faits furtivement dans les Etats de Sa Majesté Impériale, conduits en captivité, & se trouveront dans la Crimée, le Budgiack, le Cuban ou ailleurs parmi les Turcs, Tartares & autres Sujets de la Sublime Porte, seront délivrés & rendus sans rançon; & à toutes les personnes qui, avec des Passeports de Sa Majesté Impériale, iront dans ces contrées pour délivrer les Esclaves Russes, pourvu qu'elles se bornent à exécuter tranquillement leur commission, il ne sera fait aucune violence ni à l'aller ni au retour; & tous ceux qui, contre la Loi Divine, leur feront violence, ou leur causeront quelque dommage, seront punis.

VIII. Si après la Conclusion & Ratification du présent Traité de Paix, quelqu'un des Sujets des deux Puissances ayant commis quelque délit, désobéissance, ou trahison, se retire & se réfugie dans un des deux Empires, il ne pourra en aucune manière être reçu ou protégé, mais il sera incontinent rendu, ou du moins chassé hors des terres de l'Empire où il se trouvera; afin que par de tels hommes infâmes il ne

s'excite aucun refroidissement ou contestation entre les deux Empires: excepté seulement ceux qui dans l'Empire des Russies se seront faits Chrétiens, & ceux qui dans l'Empire Ottoman se seront faits Mahométans; & dorénavant si quelque sujet de la Russie s'enfuit dans les Etats de la Porte Ottomane, ou si quelque sujet de la Porte s'enfuit en Russie, lorsqu'il il sera réclamé & demandé d'une part ou de l'autre, il sera réciproquement rendu.

IX. Le Commerce étant le fruit de la paix qui procure aux Etats & aux peuples toute sorte d'abondance, sera permis aux marchands, Sujets de la Sublime Porte, qui pourront l'exercer librement dans toutes les Russies, de la même manière qu'il est permis aux marchands des autres Puissances & en payant les mêmes droits. Et réciproquement il sera permis à tous les marchands, Sujets de l'Empire des Russies, d'exercer aussi librement le Commerce dans les Etats de la Porte Ottomane. Mais pour ce qui regarde le commerce des Russes sur la Mer Noire, il sera fait sur des bâtimens appartenants aux Tures.

X. Si, durant cette Paix, il survient entre les Sujets des deux Empires des différends & dissensions, en ce cas les Gouverneurs & Commandants des frontières feront avec toute sorte de droiture les recherches nécessaires; & ces contestations traitées entre les deux Empires seront terminées par tous moyens convenables, pour mieux assurer la conservation de la paix & de l'amitié ; & à l'occasion de ces disputes entre les Sujets limitrophes il ne s'entreprendra point d'hostitilité d'aucune part; mais on procurera de part & d'autre, avec toute sorte d'attention & d'une manière amiable, le maintien inaltérable de la tranquillité.

XI. Il sera permis, soit aux Séculiers soit aux Ecclésiastiques Russes, d'aller librement visiter, soit la Sainte Cité de Jérusalem, soit les autres lieux qui méritent d'être visités; & il ne sera exigé de ces Passagers ou Pèlerins à Jérusalem ou ailleurs aucun tribut ou payement par les Sujets de l'Empire Ottoman on leur donnera les Passeports nécessaires, comme la Sublime Porte a coutume de les donner aux Nations amies de l'Empire Ottoman. De plus on ne fera aucun tort ou violence, selon la Loi Divine, aux Ecclésiastiques Russes, tout le temps qu'ils seront sur les terres de la domination Ottomane.

XII. Quant au titre Impérial dont il a été fait mention de la part de Sa Majesté de Toutes les Russies, on en traitera incessamment à l'amiable, & on en conviendra à la satisfaction des deux Parties, selon que le requiert la convenance & la suprême dignité & puissance de Sa Majesté Impériale.

XIII. Pour affermir encore davantage la paix entre les deux Empires & la sûreté des Articles du présent Traité & de tout ce qu'exigeront les affaires des Sujets respectifs, la résidence des Ministres

de Sa Majesté Impériale est permise à la Porte, avec le caractère que Sa dite Majesté jugera convenable; & les dits Ministres avec toute leur maison, relativement aux priviléges, franchises, comme en tout le reste, seront maintenus & respectés, comme les Ministres des autres Puissances les plus distinguées.

XIV. Et afin que la présente Paix & bonne Amitié entre les deux Empires soit encore mieux établie & affermie des deux Parts, on enverra des Ambassadeurs Extraordinaires dans le temps qui sera déterminé ci-après, & fixé du consentement des deux Cours; lesquels Ambassadeurs seront avec égalité échangés sur la frontière, reçus, honorés & traités avec les mêmes cérémonies & en la même forme & manière, qui se pratique pour les Ambassadeurs réciproques entre les Puissances les plus distinguées & la Porte Ottomane, & ces Ambassadeurs seront chargés en signe d'amitié de porter des présens mutuels, convenables à la dignité de leurs Majestés Impériales.

XV. Il a été convenu de plus, que dans trois mois, à compter du jour de la signature du présent Traité, les Instrumens de Ratification d'icelui seront échangés par l'entremise de l'illustrissime & excellentissime Seigneur, l'Ambassadeur de Sa Majesté Très-Chrétienne, Médiatrice de la présente paix. Et finalement, pour plus grand éclaircissement des Articles ci-dessus, on déclare, qu'ayant été convenu dans l'Article IV qu'il sera nommé des Commissaires pour le règlement des limites, & pour l'exécution de la Convention qui sera faite concernant les dites limites, les Commissaires nommés par la Sublime Porte seront subordonnés au Kan de Crimée; & si de la part de l'un ou de l'autre Empire, il survenoit des choses non comprises dans les Articles du présent Traité de Paix, qui seroient capables d'altérer la paix, en ce cas il y sera incontinent remédié de part & d'autre avec justice & équité. Et afin que les Conditions de cette Paix contenues dans les quinze Articles ci-dessus, soient des deux côtés exécutées à l'avenir & maintenues inviolables comme elles doivent l'être, on déclare, qu'en vertu de ce présent Traité, tous les Traités antérieurs resteront pour toujours sans aucune force & validité, à la reserve des limites qui sont à déterminer.

Et dans le même temps que l'excellentissime & magnifique suprême Vizir, en vertu de la susdite pleine puissance, a consigné à l'illustrissime & excellentissime Seigneur l'Ambassadeur de Sa Majesté Très-Chrétienne, l'Instrument de la présente Paix écrit en Turc, le susdit illustrissime & excellentissime Seigneur, Ambassadeur de France, en vertu de son Plein-pouvoir ci-devant communiqué, a également consigné au susdit suprême Vizir, le même Instrument écrit en Italien, avec la Condition que ce présent Traité venant à être ratifié, la garantie de Sa Majesté Très-Chrétienne sera donnée.

Le Projet de Traité de Paix ci-dessus ayant été examiné &

approuvé dans différentes Conferences tenues avec les Ministres de la Porte:

Nous, Louis Sauveur, Marquis de Villeneuve, Conseiller d'Etat & Ambassadeur Extraordinaire & Plénipotentiaire de l'Empereur de France à la Porte Ottomane, en vertu des Pleins-pouvoirs, qui Nous ont été donnés par Sa Majesté de Toutes les Russies, que Nous avons communiqués à la Porte, déclarons être convenus, au nom de Sa dite Majesté de Toutes les Russies, avec le Magnifique Elvias Méhémet Pacha, Grand Vizir de l'Empire Ottoman, en vertu du plein & absolu pouvoir que lui donne son Ministère, des Conditions contenues dans les Articles ci-dessus; & en ayant reçu l'Instrument authentique écrit en langue Turque, signé & scellé par le susdit Grand Vizir de l'Empire Ottoman, Nous lui avons remis le présent Instrument écrit en Italien & souscrit par Nous en François & scellé du Cachet de Nos armes, Nous réservant néanmoins la Ratification de Sa Majesté de Toutes les Russies, & au cas qu'elle soit donnée, nous promettons de garantir le dit Traité pour & au Nom de l'Empereur de France, saufs & réservés néanmoins ses droits & prééminences, auxquels Nous n'entendons déroger.

Fait au Camp de Belgrade, sous les Tentes du Congrès, le 18 Septembre, 1739.

(L.S.) VILLENEUVE.

No. 9.-Convention. (Limits). Nissa, October 3, 1739.*

Convention entre Sa Majesté de Toutes les Russies & l' Empire Ottoman. (Traduite de l'Italien.)

AYANT été convenu par le Traité de Paix conclu entre Sa Majesté Impériale de Toutes les Russies & l'Empire Ottoman, par le médiation de Sa Majesté Très-Chrétienne, le 18 Septembre, 1739, des limites des deux Empires du côté d'Azoph vers le Cuban, & ayant été stipulé dans l'Article II du susdit Traité, que le reste des limites des deux Empires seroit réglé & fixé par une Convention séparée, qui seroit faite en conséquence du dit Traité, après diverses conférences tenues entre l'illustrissime & excellentissime Seigneur, Marquis de Villeneuve, Ambassadeur extraordinaire & Plénipotentiaire de Sa Majesté TrèsChrétienne, & les excellentissimes Ministres de la Sublime Porte, on est convenu des trois Articles suivants concernant les limites, pour servir de règle aux Commissaires, qui, conformément au susdit Traité, Wenck, Vol. 1. Page 388.

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