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Le pays de Ha-mi, quoiqu'environné de déferts, paffe pour une des plus délicieufes contrées de l'Univers. La terre y produit en abondance des grains, des fruits, des légumes, des herbages de toute efpece. Le riz qu'on y recueille est finguliérement eftimé des Chinois. Les grenades, les oranges, les pêches, les raifins, les prunes y ont une faveur exquife; les jujubes même y font juteuses & d'un goût fi ambré, que les Chinois leur ont donné le furnom de jujubes parfumées. Rien de plus délicat, de plus avidement recherché que les melons de Ha-mi, qu'on transporte à Pe-king pour la table de l'Empereur. Ces melons, qui font beaucoup plus fains que ceux d'Europe, ont la finguliere propriété de pouvoir être confervés frais pendant une grande partie de l'hiver (*).

Mais la production la plus utile & la plus eftimée du pays de Ha-mi font fes raifins, qu'on fait fécher, Ces raisins fecs font de deux efpeces. La premiere, qui

eft fort eftimée dans la Médecine Chi

(*) Il est arrivé à Paris, en 1978, des graines de ces melons, qui ont été femées en 1779, & qui ont affez bien réussi.

Du pays

de Ha-mi,

noife, paroît parfaitement femblable à

que

Du pays celle que nous connciffons fous le nom de Ha-mi, de corinthe. La feconde, qui eft plus recherchée pour les tables, eft plus petite & plus délicate que nos paffevilles de Provence. Les Livres Chinois font parfaitement d'accord avec MM. Lemeri & Geoffroi, fur les vertus & les qualités des raifins fecs ou paffés; mais ils attribuent plus de force à ceux de Ha-mi qu'à ceux de la Chine, jufqu'à prévenir la dose en doit être plus petite. Ils obfervent que l'infufion des premiers est un excellent remede, 1°. pour faciliter l'éruption de la petite vérole, vers le quatrieme jour, lorfque le malade eft ou paroît être trop affoibli; 2o. pour exciter une douce fueur dans certaines pleuréfies ou fievres malignes. La dofe doit varier felon l'âge, l'état & la force du malade, & ce remede doit être fur-tout adminiftré à propos & avec difcernement.

L'Empereur a fait tranfporter à Peking des plants de Ha-mi, qui ont été plantés auffi-tôt dans fes jardins. Comme ces plants ont été, en quelque forte cultivés fous fes yeux, c'est-à-dire, avec un foin extraordinaire, ils ont parfaite

ment réuffi. On a trouvé un fucre & un parfum admirables aux raisins qui en font provenus.

Au refte, quoique le pays de Ha-mi. dont la latitude eft de 42° 53' 20", foit moins méridional que plufieurs de nos Provinces de France, on peut cependant affurer que fon climat eft plus favorable à la culture de la vigne, & bien plus propre à donner au raifin un degré supérieur de bonté. Il ne pleut jamais à Ha-mi, on n'y voit même prefque jamais ni brouillard ni rofée; la terre y eft uniquement arrofée par la neige qui tombe en hiver, & par l'eau de cette neige fondue qu'on recueille au pied des montagnes, & qu'on économife avec beaucoup de foin & d'induftrie. La deffication des raisins se fait d'une maniere plus fimple à Ha-mi que dans les Provinces de la Chine. Dans le Chen-fi, on fait paffer ceux qu'on veut fécher à la vapeur du vin bouillant, ou même on lui fait effuyer deux ou trois bouillons dans du vin où l'on a répandu un peu de miel blanc purifié. Dans le Royaume de Hami, on fe contente d'attendre que les raifins foient bien mûrs; enfuite, après les avoir expofés en grappe à un foleil

Du pays de Ha-mi.

ardent, on les égraine, & l'on acheve Du pays de les faire fécher. Quelque fecs qu'ils foient, ils fe rident fans fe vider ni s'applatir; les bons raifins doivent être prefque auffi croquans que le fucre candi.

de Ha-mi.

Le Royaume de Ha-mi contient un grand nombre de villages & de hameaux; mais il n'a proprement de ville que fa capitale, qui a pris fon nom. Sa circonférence eft d'environ une petite demilieue; elle est environnée de hautes murailles, & s'annonce de loin par la beauté de fes deux portes, dont l'une eft à l'orient & l'autre au nord. Les rues font alignées & bien diftribuées; mais les maifons, qui n'ont qu'un rez de chauffée & qui font prefque toutes construites en terre, ont peu d'apparence. Cependant, comme cette ville eft fous un beau ciel, placée dans une jolie plaine arrofée d'une riviere, & environnée de montagnes qui la défendent des vents du nord, le féjour n'en eft pas moins riant & agréable. De quelque côté qu'on y arrive, on n'apperçoit que des jardins qui réuniffent tout ce qu'une terre fertile & cultivée peut offrir dans le plus doux des climats. Tous les environs de cette ville font charmans, mais ils ne

s'étendent pas loin, & aboutiffent de plufieurs côtés à des plaines prefque arides, où l'on nourrit de beaux chevaux, & d'excellens moutons de l'efpece de ceux dont la queue eft plate, large, & pese jusqu'à trois livres. Il paroît que le pays de Ha-mi abonde en foffiles & en minéraux précieux; les Chinois en ont tiré long-temps beaucoup d'or & de diamans: aujourd'hui il leur fournit l'efpece d'agate qu'ils eftiment le plus. Quant aux habitans de ce petit Etat, ils font bons foldats, braves, endurcis à la fatigue, & très-adroits dans tous les exercices du corps; mais ils font inconftans, prennent feu aifément, & deviennent féroces & fanguinaires dans leur colere.

Dupays de Ha-mi.

ARTICLE V I.

Des Ifles de Lieou-kieou.

}

Des ifles

CES ES ifles, peu connues jufqu'ici de nos Géographes, qui fe font contentés d'en marquer l'existence & la latitude de Lieou dans leurs Cartes, forment un Empire puiffant, étendu, civilifé, dont on ne

kicou.

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