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Le comte du Lude, représentant Astolphe, ayant pour devise un chiffre en forme de nœud, avec ces mots:

Non sia mai sciolto.

Le prince de Marsillac, représentant Brandimart, ayant pour devise une montre en relief, dont on voit tous les ressorts, avec ces mots:

Quieto fuor, commodo dentro.

Le marquis de Villequier, représentant Richardet, ayant pour devise un aigle qui plane devant le soleil,

avec ces mots:

Uni militat astro.

Le marquis de Soyecourt, représentant Olivier, ayant pour devise la massue d'Hercule, avec ces mots:

Vix æquat fama labores.

Le marquis d'Humières, représentant Ariodant, ayant pour devise toutes sortes de couronnes, avec ces mots: No quiero menos.

Le marquis de La Vallière, représentant Zerbin, ayant pour devise un phénix sur un bûcher allumé par le soleil, avec ces mots :

Hoc juvat uri.

Monsieur le duc, représentant Roland, ayant pour devise un dard entortillé de lauriers, avec ces mots:

Certè ferit.

Vingt pasteurs, chargés de diverses pièces de la barrière qui devoit être dressée pour la course de bague,

formoient la dernière troupe qui entra dans la lice. Ils portoient des vestes couleur de feu, enrichies d'argent, et des coiffures de même.

Aussitôt que ces troupes furent entrées dans le camp, elles en firent le tour, et, après avoir salué les reines, elles se séparèrent, prirent chacune leur poste. Les pages à la tête, les trompettes et les timbaliers se croisant, s'allèrent poster sur les ailes. Le roi, s'avançant au milieu, prit sa place vis-à-vis du haut dais; M. le duc proche de sa majesté, les ducs de Saint-Aignan et de Noailles à droite et à gauche, les dix chevaliers en haie aux deux côtés du char; leurs pages, au même ordre, derrière eux; les Signes et les Heures, comme ils étoient entrés.

Lorsqu'on eut fait halte en cet état, un profond silence, causé tout ensemble par l'attention et par le respect, donna le moyen à mademoiselle de Brie, qui représentoit le siècle d'Airain, de commencer ces vers à la louange de la reine, adressés à Apollon, représenté par le sieur La Grange.

LE SIÈCLE D'AIRAIN, à Apollon.

Brillant père du jour, toi de qui la puissance
Par ses divers aspects nous donna la naissance;
Toi, l'espoir de la terre et l'ornement des cieux;
Toi, le plus nécessaire et le plus beau des dieux;
Toi, dont l'activité, dont la bonté suprême

Se fait voir et sentir en tous lieux par

soi-même:

Dis-nous par quel destin, ou par quel nouveau choix,
Tu célèbres tes jeux aux rivages françois.

APOLLON.

Si ces lieux fortunés ont tout ce qu'eut la Grèce

De gloire, de valeur, de mérite et d'adresse,

Ce n'est pas sans raison qu'on y voit transférés
Ces jeux qu'à mon honneur la terre a consacrés.
J'ai toujours pris plaisir à verser sur la France
De mes plus doux rayons la bénigne influence;
Mais le charmant objet qu'hymen y fait régner
Pour elle maintenant une fait tout dédaigner.

Depuis un si long temps que pour le bien du monde
Je fais l'immense tour de la terre et de l'onde,
Jamais je n'ai rien vu si digne de mes feux,
Jamais un sang si noble, un cœur si généreux,
Jamais tant de lumière avec tant d'innocence,
Jamais tant de jeunesse avec tant de prudence,
Jamais tant de grandeur avec tant de bonté,
Jamais tant de sagesse avec tant de beauté.

Mille climats divers qu'on vit sous la puissance
De tous les demi-dieux dont elle prit naissance,
Cédant à son mérite autant qu'à leur devoir,
Se trouveront un jour unis sous son pouvoir.

Ce qu'eurent de grandeur et la France et l'Espagne, Les droits de Charles-Quint, les droits de Charlemagne, En elle avec leur sang heureusement transmis, Rendront tout l'univers à son trône soumis.

Mais un titre plus grand, un plus noble partage,
Qui l'élève plus haut, qui lui plaît davantage,
Un nom qui tient en soi les plus grands noms unis,
C'est le nom glorieux d'épouse de Louis.

LE SIÈCLE D'ARGENT.

Quel destin fait briller, avec tant d'injustice,
Dans le siècle de fer, un astre si propice?

LE SIÈCLE D'OR.

Ah! ne murmure point contre l'ordre des dieux.
Loin de s'enorgueillir d'un don si précieux,
Ce siècle, qui du ciel a mérité la haine,
En devroit augurer sa ruine prochaine,
Et voir qu'une vertu qu'il ne peut suborner
Vient moins pour l'ennoblir que pour l'exterminer.
Sitôt qu'elle paroît dans cette heureuse terre,
Vois comme elle en bannit les fureurs de la guerre;
Comme, depuis ce jour, d'infatigables mains
Travaillent sans relâche au bonheur des humains:
Par quels secrets ressorts un héros se prépare
A chasser les horreurs d'un siècle si barbare,
Et me faire revivre avec tous les plaisirs
Qui peuvent contenter les innocents desirs.

LE SIÈCLE DE FER.

Je sais quels ennemis ont entrepris ma perte;
Leurs desseins sont connus, leur trame est découverte:
Mais mon cœur n'en est pas à tel point abattu...

APOLLON.

Contre tant de grandeur, contre tant de vertu,
Tous les monstres d'enfer, unis pour ta défense,
Ne feroient qu'une foible et vaine résistance.
L'univers, opprimé de ton joug rigoureux,
Va goûter, par ta fuite, un destin plus heureux.
Il est temps de céder à la loi souveraine
Que t'imposent les vœux de cette auguste reine:
Il est temps de céder aux travaux glorieux
D'un roi favorisé de la terre et des cieux.
Mais ici trop long-temps ce différend m'arrête:

A de plus doux combats cette lice s'apprête,

Allons la faire ouvrir, et ployons des lauriers

Pour couronner le front de nos fameux guerriers.

Tous ces récits achevés, la course de bague commença, en laquelle, après que le roi eut fait admirer l'adresse et la grace qu'il a en cet exercice comme en tous les autres, et après plusieurs belles courses de tous les chevaliers, le duc de Guise, les marquis de Soyecourt et de La Vallière demeurèrent à la dispute, dont ce dernier emporta le prix, qui fut une épée d'or enrichie de diamants, avec des boucles de baudrier de grande valeur, que donna la reine mère, et dont elle l'honora de sa main.

La nuit vint cependant à la fin des courses, par la justesse qu'on avoit eue à les commencer; et un nombre infini de lumières ayant éclairé tout ce beau lieu, l'on vit entrer dans la même place trente-quatre concertants fort bien vêtus, qui devoient précéder les Saisons, et faisoient le plus agréable concert du monde.

Pendant que les Saisons se chargeoient de mets délicieux qu'elles devoient porter, pour servir devant leurs majestés la magnifique collation qui étoit préparée, les douze Signes du Zodiaque et les quatre Saisons dansèrent dans le rond une des plus belles entrées de ballet qu'on eût encore vues. Le Printemps, représenté par mademoiselle du Parc, parut ensuite sur un cheval d'Espagne : avec le sexe et les avantages d'une femme, elle faisoit voir l'adresse d'un homme. Son habit étoit vert, en broderie d'argent et en fleurs au naturel.

L'Été le suivoit, représenté par le sieur du Parc, sur un éléphant couvert d'une riche housse.

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