L'Automne, aussi avantageusement vêtu, représenté par le sieur La Thorillière, venoit après, monté sur un chameau. L'Hiver, représenté par le sieur Béjart, suivoit sur un ours. Leur suite étoit composée de quarante-huit personnes qui portoient sur leurs têtes de grands bassins pour la collation. Les douze premiers, couverts de fleurs, portoient, comme des jardiniers, des corbeilles peintes de vert et d'argent, garnies d'un grand nombre de porcelaines, si remplies de confitures et d'autres choses délicieuses de la saison, qu'ils étoient courbés sous cet agréable faix. Douze autres, comme moissonneurs, vêtus d'habits conformes à cette profession, mais fort riches, portoient des bassins de cette couleur incarnate qu'on remarque au soleil levant, et suivoient l'Été. Douze, vêtus en vendangeurs, étoient couverts de feuilles de vigne et de grappes de raisins, et portoient dans des paniers feuille-morte, remplis de petits bassins de cette même couleur, divers autres fruits et confitures, à la suite de l'Automne. Les douze derniers étoient des vieillards gelés, dont les fourrures et la démarche marquoient la froidure et la foiblesse, portant dans des bassins couverts d'une glace et d'une neige si bien contrefaites, qu'on les eût prises pour la chose même, ce qu'ils devoient contribuer à la collation, et suivoient l'Hiver. Quatorze concertants de Pan et de Diane précédoient ces deux divinités, avec une agréable harmonie de flûtes et de musettes. Elles venoient ensuite sur une machine fort ingénieuse, en forme d'une petite montagne ou roche ombragée de plusieurs arbres; mais ce qui étoit plus surprenant, c'est qu'on la voyoit portée en l'air, sans que l'artifice qui la faisoit mouvoir se pût découvrir à la vue. Vingt autres personnes les suivoient, portant des viandes de la ménagerie de Pan et de la chasse de Diane. Dix-huit pages du roi fort richement vêtus , qui devoient servir les dames à table, faisoient les derniers de cette troupe : laquelle étant rangée, Pan, Diane et les Saisons se présentant devant la reine, le Printemps lui adressa le premier ces vers : LE PRINTEMPS, à la reine. Dont mes jardins sont embellis, L’ÉTÉ. Mais, avant que ma saison passe, L'AUTOMNE. Qui lui tombèrent en partage, Et qui croît dans votre maison, L'hiver. Sont les mets les moins précieux; Mais ils sont des plus nécessaires De leurs willades meurtrières, DIANE. Nos bois, nos rochers, nos montagnes, Tous nos chasseurs et mes compagnes, Qui m'ont toujours rendu des honneurs souverains, Depuis que parmi nous ils vous ont vu paroître, Ne veulent plus me reconnoître; Et, chargés de présents, viennent avecque moi Vous porter ce tribut pour marque de leur foi. Les habitants légers de cet heureux bocage De tomber dans vos rets font leur sort le plus doux, Et n'estiment rien davantage Que l'heur de périr de vos coups. Amour, dont vous avez la grace et le visage, A le même secret que vous. PAN. Jeune divinité, ne vous étonnez pas, Lorsque nous vous offrons en ce fameux repas L'élite de nos bergeries; Les herbages de nos prairies, Ces récits achevés, une grande table, en forme de croissant, ronde du côté où l'on devoit couvrir, et garnie de fleurs de celui où elle étoit creuse, vint à se découvrir. Trente-six violons, très-bien vêtus, parurent derrière sur un petit théâtre, pendant que messieurs de La Marche et Parfaits père, frère et fils, contrôleurs généraux , sous les noms de l'Abondance, de la Joie, de la Propreté et de la Bonne-Chère, la firent couvrir par les Plaisirs, par les Jeux, par les Ris, et par les Délices. Leurs majestés, s'y mirent en cet ordre, qui prévint tous les embarras qui eussent pu naître pour les rangs. La reine-mère étoit assise au milieu de la table, et avoit à sa main droite: LE ROI. MONSIEUR. Madame de Gourdon. De l'autre côté étoient assises : LA REINE. MADAME. |