Images de page
PDF
ePub

d'une ordonnance de non-lieu; mais il faut être partie civile formellement déclarée. Si de l'examen de la procédure, il ressort que le plaignant ne s'est porté partie civile ni dans sa plainte, ni dans un acte subséquent, ni dans des conclusions en dommages-intérêts, il est déchu du droit de s'opposer à l'exécution de l'ordonnance. Cass. 7 oct. 1872. 45 La Chambre du Conseil est instituée pour statuer sur les crimes et délits dont l'instruction aura été faite par le Juge d'instruction. La loi a soin de séparer l'action civile de l'action criminelle et d'en attribuer la connaissance à des tribunaux différents. La Chambre du Conseil méconnait sa mission lorsque, statuant sur le crime ou délit soumis à son appréciation, elle prononce sur une question de propriété. Il résulte des considérations ci-dessus que la Chambre du Conseil du tribunal civil, tout en statuant sur le délit, par son ordonnance de non-lieu, a usurpé les attributions des tribunaux spécialement chargés de décider des contestations des citoyens sur leurs droits de propriété, en décidant que le bien, objet du litige, sera remis au réclamant.— Cass. 25 nov. 1872.

46 Lorsque par la déposition des témoins, la Chambre du Conseil a reconnu qu'il était inutile d'entendre les autres témoins puisque leurs dépositions ne pouvaient faire changer les faits sous le rapport de la complicité, les aggraver ou leur donner un tout autre caractère que celui qu'ils ont déjà acquis par le témoignage de divers autres qui ont été entendus et qui ont donné sur l'affaire tous les détails nécessaires, il s'ensuit qu'en déclarant qu'il n'y a ni crime ni délit, et en ordonnant la mise en liberté du prévenu, la Chambre du Conseil a fait une juste application de l'art. 115 du C. d'Inst. crim. Cass. 2 juillet 1873.

47

Doit être rejeté le pourvoi du substitut du Commissaire du Gouvernement contre une ordonnance de non-lieu régulière en la forme et juste au fond, lorsque ce fonctionnaire n'articule aucun grief contre cette ordonnance. Cass. 15 sept. 1873.

48

[ocr errors]

Lorsque des neuf habitants d'une commune, qui avaient formulé des plaintes contre le commandant de la section, huit n'ont été ni entendus, ni confrontés avec le prévenu, qu'un seul, le neuvième, a été entendu et confronté avec lui et s'est constitué partie civile au procès, par acte d'huissier signifié tant au Commissaire du Gouvernement qu'au Juge d'instruction, l'ordonnance de la Chambre du Conseil prononçant qu'il n'y a lieu à suivre contre le prévenu, a acquis l'autorité de la chose jugée pour ce qui concerne les huit plaignants restants, et elle n'est susceptible d'aucun recours de leur part, sauf ce qui est prescrit aux art. 121 et 122 du C. d'Inst. crim. touchant la survenance de nouvelles charges. Mais le neuvième témoin ayant agi dans le délai de l'art. 115 du C. d'Inst. crim., demeure par conséquent seul habile à s'opposer à l'exécution de ladite or donnance. Cass. 5 nov. 1873.

49

- En matière de soustraction frauduleuse, de complicité, de recel, comme dans tous les cas où il peut être question de renvoi d'un prévenu

devant le Juge compétent, il ne suffit point qu'une personne ait été l'objet d'une dénonciation pour être renvoyée devant un tribunal de répression; il est nécessaire que cette dénonciation offre un caractère suffisamment sérieux et réunisse les conditions de crédibilité voulues. Il est donc du devoir de la Chambre du Conseil, comme des fonctionnaires chargés de la recherche et de la poursuite des crimes et des délits de peser la valeur de la dénonciation soit en raison de sa nature, de la moralité de ses auteurs, et des circonstances qui l'accompagnent. S'il n'est pas nécessaire, pour ordonner le renvoi d'un prévenu devant un tribunal de répression, que sa culpabilité soit établie par des preuves, il importe néanmoins qu'il existe contre lui des présomptions d'une certaine gravité et des indices suffisants. Ainsi, en refusant d'admettre comme des présomptions suffisamment graves et des indices suffisants la dénonciation faite contre un particulier, la Chambre du Conseil a usé du droit que lui accorde la loi d'apprécier les faits et de puiser dans l'instruction de la cause les éléments de sa conviction. Cass. 15 déc. 1873.

[ocr errors]

[ocr errors]

50 Ou ne peut se faire un moyen de nullité contre l'ordonnance de non-lieu, de ce que contrairement aux 2e et 3° alinéa de l'art. 115 du C. d'inst. crim., le prévenu ait été mis en liberté avant l'expiration du délai de 24 heures accordé par cet article soit au Ministère public, soit à la partie civile, pour former opposition à l'ordonnance de la Chambre du Conseil. La formalité dont il s'agit, par sa nature même, n'est point de celles exigées par la loi à peine de nullité, pour la validité des ordonnances de la Chambre du Conseil. Son inaccomplissement ne saurait vicier l'ordonnance, mais tout au plus donner ouverture à une prise à partie contre les fonctionnaires qui y auraient concouru. Cass. 15 déc.

1873.

[ocr errors]

51 - Pour bien juger une décision de le Chambre du Conseil, il importe de déterminer le pouvoir de toute Chambre du Conseil, en matière de crimes et délits. Il demeure constant que les Chambres du Conseil, lorsqu'elles sont saisies de la connaissance d'un fait qualifié crime par la loi, peuvent apprécier les circonstances qui ôtent à ce fait tout caractère de crime ou de délit, et prononcer la mise en liberté du prévenu; mais elles ne peuvent pas, ayant égard à des faits d'excuse qui ont seulement pour effet de réduire la peine, renvoyer le prévenu devant un tribunal correctionnel ou un tribunal de police. C'est au tribunal criminel, jugeant avec assistance du jury, seul qu'il appartient de prononcer sur l'existence du fait principal et sur les circonstances qui peuvent rendre ce fait excusable. D'où il suit que l'erdonnance d'une Chambre du Conseil est en contradiction avec elle-même lorsqu'elle n'a pas basé sa décision sur les faits criminels qu'elle a cependant consignés dans ses motifs. Ainsi, lorsque le prévenu s'est présenté armé à la porte du plaignant et lui a dit qu'il venait l'attaquer et lui a immédiatement tiré un coup de feu, qui ne l'a pas atteint, l'intention du prévenu ainsi manifestée par des actes extérieurs,

avec commencement d'exécution, constitue une tentative de meurtre accompagnée de la circonstance aggravante de la préméditation, tentative punissable par l'art. 2 du C. Pén. Dans l'état de la cause, la Chambre du Conseil est sortie de ses attributions en considérant ce crime comme une contravention de police au moyen de certains faits d'excuse qu'il ne lui appartenait pas d'apprécier. Par cette marche contraire aux principes de la matière, elle a faussement appliqué les art. 390, 2o alinéa, et 402 du C. Pén., et violé les règles de la compétence établies par la loi.-Cass. 9 mars 1874.

52

Il résulte de la lettre et de l'esprit de l'art. 115 du C. d'Inst. crim. que l'opposition formée dans le délai voulu, suspend l'exécution de l'ordonnance de non-lieu jusqu'à ce que le tribunal de cassation ait prononcé sur l'opposition. D'où il suit qu'est prématurée la mise en liberté du prévenu ordonnée par le substitut du Commissaire du Gouvernement en vertu d'une ordonnance de non-lieu contre laquelle la partie civile s'était pourvue dans le délai utile. Cass. 27 avril 1874.

53

Le certificat délivré le 1er janvier, par le greffier du tribunal civil, constate bien qu'il était seul chargé du greffe dudit tribunal, et qu'à cette date il n'y a eu aucune opposition à la mise en liberté du prévenu ; mais s'il résulte du certificat contraire délivré par le greffier titulaire, qu'il a été fait au greffe la déclaration d'opposition à la mise en liberté, la veille de la date ci-dessus, c'est-à-dire le même jour que l'ordonnance a été signifiée à la partie civile; en présence de ces deux certificats qui laissent percer un doute regrettable sur leur véracité, il faut, en principe, décider, par la hiérarchie qui doit exister entre ces deux fonctionnaires, en l'absence surtout d'une inscription de faux, seul cas qui pourrait faire arriver à la véracité. Ainsi, le certificat postérieur émané du greffier titulaire a nécessairement infirmé celui de son commis qui relève de lui. — Cass. 27 avril 1874.

54

Il y a des cas où l'action de la partie civile provoque celle de la partie publique et se confond avec elle. La loi attache à l'opposition de la partie civile les mêmes effets qu'à l'opposition formée par le Ministère public. Ainsi, en exerçant son droit, la partie civile n'a point usurpé les attributions la loi accorde au Juge d'instruction. que Cass. 27 avril

1874.

55 - Aux termes de l'art. 115 du C. d'Inst. crim., la seule voie ouverte pour attaquer les ordonnances de non-lieu rendues par les Chambres du Conseil, est celle de l'opposition, laquelle doit être déférée au tribunal de cassation qui prononce toutes affaires restantes. On ne saurait confondre ce droit établi par l'art. 115, avec celui des art. 205 et 206 du même code, en ce sens que le premier n'a lieu que lorsqu'on s'oppose à la mise en liberté d'un prévenu, tandis que le second ne peut être dirigé que contre une ordonnance qui renvoie par devant un tribunal criminel un individu prévenu d'un crime. Ce qui vient fortifier la distinction qu'il

faut faire de ces deux cas, c'est que pour l'opposition, le législateur n'accorde à l'opposant qu'un délai de 24 heures, et pour le pourvoyant un délai de trois jours francs. Il donne à la première procédure une marche toute différente de la seconde, en permettant au tribunal de cassation de réviser entièrement le procès, d'entrer dans le fond, tandis que le tribunal est circonscrit par l'art. 205 précité, lui donne la faculté de n'examiner le mérite de l'ordonnance que dans les trois cas qu'il spécifie. D'où il suit que le demandeur, en faisant un pourvoi en cassation, s'est écarté des prescriptions impératives de l'art. 115 qui n'exige, dans l'espèce, qu'un acte d'opposition, en l'absence duquel le tribunal ne se trouve pas légalement saisi de la demande formée contre l'ordonnance de non-lieu. Cass. 3 juin 1874.

56

Aux termes de l'art. 115 du C. d'Inst. crim. modifié, la partie civile n'a que 24 heures pour s'opposer à l'exécution d'une ordonnance de non-lieu. Or, si l'ordonnance attaquée a été signifiée le 14 mars, et que ce n'est que le 16 que la partie civile a, par acte d'huissier, déclaré au Commissaire du Gouvernement qu'elle s'oppose à ladite ordonnance, elle s'est rendue inhabile à faire apprécier ses moyens d'opposition, et l'opposition doit être rejetée. Vainement la partie civile dit-elle, dans une pièce trouvée au dossier, que le 15 étant un dimanche, jour férié, la déclaration d'opposition a pu être valablement faite le 16, car la loi ne distingue pas entre les jours fériés et les jours non fériés. Cass. 15 juillet 1874.

[ocr errors]

57 - Lorsque de cinq témoins entendus, quatre ont dénié les faits avancés contre les prévenus, et qu'un seul a confirmé ces faits, c'est avec raison que l'ordonnance attaquée a déclaré n'avoir lieu à suivre contre les prévenus, un seul témoin, en droit, n'étant pas considéré comme témoin : unus testis, nullus testis. Cass. 25 oct. 1874.

58 C'est sans raison que la Chambre du Conseil du tribunal civil a déclaré, pour rendre son ordonnance de non-lieu, que le prévenu était dans le cas de la légitime défense, lorsque nulle part dans l'instruction on ne voit que l'accusé ait eu ses jours menacés, bien qu'il résulte du certificat du médecin que la victime ait succombé aux coups que lui a donnés l'accusé. Cass. 23 nov. 1874.

59Lorsque l'ordonnance relève que l'une des parties est depuis longtemps fermière et qu'elle paye régulièrement à la bailleresse le prix de sa ferme, si plus tard il s'élève contestation entre cette bailleresse et une tierce personne à l'occasion du droit de propriété de la terre occupée par la fermière, cette contestation ne peut donner lieu qu'à une action civile et non à une action criminelle. D'où il suit que la Chambre du Conseil du tribunal civil a bien fait de déclarer qu'il n'y avait pas lieu à suivre contre la bailleresse et sa fermière. - Cass. 30 nov. 1874.

[ocr errors]

60 De ce que l'avocat de la demanderesse en cassation ne se soit pas servi du mot technique de la matière en déclarant se pourvoir en cassation, au lieu de déclarer, s'opposer à l'exécution de l'ordonnance de non

lieu, il ne s'ensuit pas que sa déclaration doive être repoussée n'étant entachée d'aucune nullité substantielle, mais contenant une irrégularité qui a été réparée, puisque loin de suivre les cinq jours fixés par le code pour attaquer les ordonnances de renvoi au tribunal criminel, il a fait, au contraire, sa déclaration dans les 24 heures, tel que le prescrit l'art. 115 du C. d'Inst. crim. qui détermine les formalités qu'on doit observer dans l'opposition faite contre l'exécution des ordonnances de non-lieu. D'où il suit qu'un pareil pourvoi est recevable en la forme. Cass. 24 mai 1875.

61 Lorsqu'il résulte de la déposition des témoins entendus dans la cause, qu'il y a eu de nombreuses et grandes variations, de tels faits ne sauraient établir une conviction unanime dans les juges de la Chambre du Conseil. Ces variations mêmes faisaient soulever des indices graves et suffisants d'inculpation que l'audience publique en ses débats solennels est seule habile à examiner, concorder et éclaircir: le tribunal de cassation dit la prévention de culpabilité suffisamment établie et les art. 115 et 119 du code d'Inst. crim. violés. En conséquence, casse et annule l'ordonnance de non-lieu dénoncée, dit qu'il y a lieu d'accuser, et renvoie le prévenu en état d'accusation, etc. Cass. 2 août 1875.

62 La prévention préjuge l'existence du délit, mais elle ne l'établit pas. Elle prend naissance dans la dénonciation, dans les indices, dans la présomption, toutes choses que l'instruction seule est habile à éclaircir, concorder et asseoir en faits irrécusables, sinon rejeter. Mais si ces préliminaires ne suffisent pas pour asseoir la conviction, ils ne doivent pas être négligés. Agir autrement, c'est ne pas tenir compte de la vindicte publique, c'est faire violence à l'action publique. Ainsi, une importation illicite d'armes, de munitions de guerre, à l'aide de faux connaissements, au mépris des lois de la matière, étaient de graves préventions. Dès lors, les auteurs ou complices, devaient être présumés se trouver dans le capitaine du navire introducteur, et dans l'importateur, surtout quand il ne s'était pas présenté d'autres réclamants consignataires que ce dernier. C'est un excès de pouvoir que de les renvoyer absous, sans instruction préalable. Cass. 18 août 1875.

63 La présomption ne peut être invoquée, en droit criminel, si elle n'est appuyée de faits qui concourent à la rendre probante et à la faire servir comme commencement de preuve. Une prévention uniquement basée sur la présomption est infirme et insuffisante pour amener une mise en accusation. Cass. 6 oct. 1875.

[ocr errors]

64 L'opposant qui ne s'est, d'aucune manière, constitué partie civile dans la cause, ne peut, ni ne doit se targuer de la notification qui lui a été faite illégalement par le Ministère public de l'ordonnance de nonlieu de la Chambre du Conseil. Cette notification, loin de lui profiter, est nulle et non avenue. Cass. 29 nov. 1875.

65 Lorsqu'aucun acte au dossier ne prouve que le demandeur en

« PrécédentContinuer »