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brave, et d'un seul et même appartement, qui est en même temps grand et beau. Il n'y a qu'un substantif, un seul déterminatif suffit.

CHAPITRE IV.

DE L'ADJECTIF QUALIFICATIF.

363 I. Tour qualificatif, soit adjectif, soit participe passé ou présent, doit toujours se rapporter à un mot exprimé dans la phrase, et son rapport avec ce mot ne doit donner lieu à aucune équivoque. Ainsi l'on ne dira pas : LOUX des droits de sa couronne, son unique ambition était de la transmettre à ses successeurs.

Endormi sur le trône, au seine de la mollesse,

Le poids de sa couroure accablait sa faiblesse.

JA

Les qualificatifs jaloux et endormi ne se rapportant à aucun des mots énoncés dans la phrase.

On ne dira pas non plus: AIMANT l'étude par-dessus toute chose, votre père vous fournira les moyens de vous y livrer. Le rapport du qualificatif aimant est équivoque : est-ce votre père, ou est-ce vous qui êtes aimant ? On fait disparaître cette faute en disant: comme votre père aime l'étude par-dessus toute chose, il vous fournira, etc.; ou comme vous aimez l'étude, etc.

364 II. L'adjectif s'accorde en genre et en nombre avec le substantif ou le pronom qu'il qualifie un homme VERTUEUX, une femme VERTUEUSE, des enfants DOCILES. 365 S'il y a deux ou plusieurs substantifs ou pronoms, l'adjectif se met au pluriel et prend le genre masculin, si les substantifs ou les pronoms sont de différents genres.

Le riche et le pauvre sont egaux devant Dieu.

Une application et un travail continuels font surmonter bien des obstacles.

366 Remarque. Lorsque deux substantifs qualifiés par un adjectif n'ont pas le même genre, l'oreille exige qu'on énonce le substantif masculin le dernier, si l'adjectif a une terminaison particulière pour chaque genre, comme: bon, bonne; entier, entière; épais, épaisse, etc.; et qu'on dise: il a montré une prudence et un courage étonnants, et non pas: un courage et une prudence étonnants.

EXCEPTIONS.

367 Première exception. L'adjectif placé après deux ou plusieurs substantifs s'accorde avec le dernier.

368 1° Lorsque les substantifs sont synonymes, c'est-àdire, quand ils ont à-peu-près la même signification: Il a montré une réserve, une retenue DIGNE d'éloges.Toute sa vie n'a été qu'un travail, qu'une occupation CONTINUELLE (Massillon).-Dans ce cas, il n'y a proprement qu'un seul mot à qualifier, puisqu'il n'y a qu'une seule et même idée d'exprimée, et c'est avec le dernier substantif que l'accord a lieu, comme frappant le plus l'esprit.

369 20 Lorsque les substantifs sont unis par la conjonction ou: Un courage ou une prudence ÉTONNANTE. -Cette

conjonction donne l'exclusion à un des substantifs, et c'est sur le dernier, comme fixant le plus l'attention, que tombe la qualification.

370 Seconde exception. Les adjectifs nu, demi, excepté, composé, sont invariables, quand ils précèdent le substantif: NU-téte, DEMI-heure, EXCEPTÉ ces personnes, SUPPOSÉ ces faits; mais on dirait avec accord: téte NUE, une heure et DEMIE, ces personnes EXCEPTÉES, ces faits SUPPOSÉS, l'adjectif étant placé après le substantif.

Remarque. L'adjectif demi ne s'accorde jamais en nombre avec le substantif énoncé auparavant. Ainsi on dira: 3 heures et demie, et non: 3 heures et demies. Dans ces sortes de phrases, demi s'accorde avec un substantif sous-entendu; c'est comme s'il y avait: 3 heures et (une heure) demie. Cet adjectif ne prend la marque du pluriel que lorsqu'il est employé substantivement: cette horloge sonne les DEMIE. Acad. 371 Troisième exception. L'adjectif feu ne s'accorde que lorsqu'il précède immédiatement le substantif: la FEUE reine, votre FEUE mère; mais on dirait sans accord: feu la reine, feu votre mère, attendu que l'adjectif feu est séparé de son substantif par la, votre.

372 III. L'adjectif employé adverbialement, c'est-à-dire pour qualifier un verbe, est toujours invariable: Ces livres coûtent CHER, ces fleurs sentent BON, ils marchent

VITE.

373 IV. L'adjectif reçoit la loi du substantif, mais il ne la lui fait jamais. Conséquemment on ne dira pas le premier et le second ÉTAGES, les HISTOIRES ancienne et

moderne. Ces phrases sont elliptiques; des deux adjectifs que chacune d'elles renferme, l'un qualifie un substantif sous-entendu, et l'autre un substantif exprimé. C'est comme s'il y avait : le premier ÉTAGE et le second étage, l'histoire ancienne et l'HISTOIRE moderne. Puisque le substantif énoncé dans la phrase exprime l'unité, il est évident que les adjectifs qui l'accompagnent, quel qu'en soit le nombre, ne sauraient lui faire prendre la marque du pluriel. Il faut dire conséquemment: Le premier` et le second ÉTAGE; l'HISTOIRE ancienne et la moderne. 374 V. Deux adjectifs dont le premier est qualifié par le second, restent tous les deux invariables: des cheveux CHATAIN CLAIR, des étoffes ROSE TENDRE. La raison en est que le premier adjectif est pris substantivement: c'est comme s'il y avait; d'un châtain clair, d'un rose tendre. 375 VI. Il ne faut pas appliquer aux personnes les adjectifs qui ne conviennent qu'aux choses; tels sont: pardonnable, impardonnable, déplorable, contestable, inestimable, etc.; ni aux choses ceux qui ne conviennent qu'aux personnes; tel sont consolable, inconsolable, etc. l'on ne dira pas avec Racine :

Vous voyez devant vous un prince déplorable.

Ainsi

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ni avec un auteur moderne: sa douleur était INCONSOLABLE. Mais on dirait bien : Un prince dont le sort est DÉPLORABLE, une personne INCONSOLABLE dans sa douleur.*

376 VII. Il y a des adjectifs qui se mettent avant le substantif: beau jardin, grand arbre, etc.; d'autres qui ne se placent qu'après: habit rouge, table ovale, maison neuve, etc. Enfin un grand nombre précèdent ou suivent le substantif, selon que l'oreille et le goût l'exigent: véritable ami, ami véritable; charmante maison, maison charmante.

Les adjectifs qui dériveut des verbes, comme pardonnable, consolable, formés de pardonner et de consoler, se disent des personnes et des choses, selon que les verbes d'ou ils dérivent ont pour régime direct un nom de personne ou un nom de chose. Comme on ne dit pas pardonner quelqu'un, consoler quelque chose, il en résulte qu'on ne saurait dire que quelqu'un est pardonnable, ni que quelque chose est consolable,

Il y a aussi des adjectifs qui changent la signification du substantif, selon qu'ils sont placés auparavant ou auprès; par exemple:

Un brave homme signifie un homme qui a de la bonhomie et de la probité.

Un homme brave désigne un homme qui a de la bra

voure.

Un honnéte homme est un homme qui a de la probité.
Un homme honnéte signifie un homme poli.
Un pauvre homme est un homme sans capacité.

Un homme pauvre désigne un homme dépourvu de fortune.

La différence n'est pas moins sensible entre sage-femme et femme sage, grand-homme et homme grand, galanthomme et homme galant, etc.

Il n'y a guère que l'usage et la lecture des bons auteurs qui puissent servir de guide à cet égard.

CHAPITRE V.

DES ADJECTIFS DÉTERMINATIFS.

377 I. VINGT et cent sont les seuls adjectifs numéraux cardinaux susceptibles de prendre la marque du pluriel.

Vingt et cent prennent une s, lorsqu'ils sont multipliés par un autre nombre: quatre-VINGTS soldats; trois CENTS chevaux; ils sont quatre-vINGTS; il y en a deux

CENTS.

378 Exception. Vingt et cent, quoique multipliés, rejettent la marque du pluriel, quand ils sont suivis d'un autre nombre quatre-VINGT-cinq soldats, trois CENT dix che

vaux.

379 Remarque.

Vingt et cent, employés pour vingtième, centième, restent toujours invariables, parce qu'alors ils qualifient un substantif singulier, exprimé ou sous-entendu chapitre quatre-vingt, page deux cent, en l'an mil sept cent quatre-vingt, en mil huit cent; c'est-à-dire, chapitre quatre-vingtième, page deux centième, en l'an mil sept cent quatre vingtième, en (l'an) mil huit centième.

380 II. MILLE s'écrit de trois manières :

Mil, dans la supputation des années; c'est une abréviation de mille: L'Amérique a été découverte en l'an MIL quatre cent quatre-vingt-douze.

Mille pour exprimer le nombre dix fois cent : nos troupes firent cinq MILLE prisonniers.

Dans ces deux cas il rejette toujours la marque du pluriel.

Mille, avec une s au pluriel, pour représenter une mesure de chemin, et alors il est substantif commun : trois MILLES d'Angleterre font un peu plus d'une lieue de France.

381 III. Les adjectifs possessifs doivent être remplacés par l'article, quand le sens indique clairement quel est l'objet possesseur: J'AI mal à LA téte, Pierre s'est cassé LA jambe, etc. Il est évident qu'il s'agit ici de ma téte, et de la jambe de Pierre; les adjectifs possessifs ma, sa n'ajouteraient rien au sens.

Il n'en est pas de même quand je dis: je vois que LA jambe enfle; Pierre a perdu L'argent; le sens est équivoque, on ne sait si c'est ma jambe ou celle d'un autre que je vois enfler; si c'est son argent ou celui de Paul que Pierre a perdu. L'équivoque disparaît si l'on dit : Je vois que MA jambe enfle; Pierre a perdu son argent.

On fait aussi usage de l'adjectif possessif pour désigner une chose habituelle: MA migraine m'a repris; sa goutte le tourmente.

IV. Les adjectifs possessifs notre, votre, leur se mettent au pluriel, lorsqu'ils se rapportent à plusieurs unités prises collectivement, et présentant alors une idée de pluralité :

.....

. D'une égale horreur nos cœurs étaient frappés.

RACINE. Ces festons dans vos mains, et ces fleurs sur vos têtes,, Autrefois convenaient à nos pompeuses fêtes. RACINE. Lorsque d'un saint respect tous les Persans touchés N'osent lever leurs fronts à la terre attachés. Le même.

Dans les exemples qui précèdent, cœurs, têtes et fronts sont des unités prises collectivement: ce sont des unités, parce que chacun des individus dont il est question n'a qu'un cœur, qu'une tête, qu'un front; et ces unités sont prises collectivement, par la raison qu'il s'agit de plusieurs individus, et que conséquemment il y a plusieurs cœurs, plusieurs tétes et plusieurs fronts.

Exception. Malgré l'idée collective, notre, votre, leur se mettent au singulier, quand ils se rapportent à un de

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