Images de page
PDF
ePub

murmurent et se plaignent dès qu'on en dérange l'économie. Attachez-vous spécialement à la pratique des vertus, faites tout avec ferveur, et sachez, s'il le faut, quitter Dieu pour Dieu.

ADEL. Que ces maximes sont sages! heureuse l'ame qui les observe! elles font aimer la dévotion.

EUPHR. Voici ma bonne qui vient de la part de maman. O Ciel! elle me fait trembler! je cours avec elle.

CLOTILDE. Je vous avertis, ma fille, que demain nous nous entretiendrons sur la Persévérance.

ADEL. O le beau sujet ! je voudrois déjà être à demain.

XXIX.e ENTRETIEN.

Sur la Persévérance.

CLOTILDE, CHRISTINE, ADELAÏDE, EUPHRASIE.

CLOTILDE. (à Euphrasie.) Je suis, ma fille, on ne peut plus inquiète. Je voulois vous suivre hier au soir, maman ma re

tenue; ce matin encore je n'ai pu sortir.

EUPHR. Ah! ma petite mère, j'avois bien raison d'être effrayée, maman se trouvoit mal entre les bras de ma tante, lorsque ma bonne est venue me chercher; cette foiblesse a duré près d'une heure, j'étois désolée; mais aujourd'hui, grâces à Dieu, maman va beaucoup mieux; c'est elle qui m'a engagée à venir ici, ne voulant pas me priver de l'entretien intéressant que vous nous promîtes hier.

CLOT. Je suis ravie que madame votre mère soit en meilleur état; je souhaite que le Seigneur prolonge ses jours, ils sont bien précieux.

EUPHR. Ah! si je perdois maman, que deviendrois-je ?

ADEL. Ecartez cette idée, ma petite sœur ; toujours Dieu sera votre force, si toujours vous lui êtes fidèle.

EUPHR. Puissé-je mériter cette grâce de la persévérance ! apprenez nous en les moyens, ô ma petite mère.

CLOT. Vous êtes, mes chères amies, rentrées en grâces avec Dieu pour gage de votre réconciliation, il vous a nourries de sa chair adorable; que vous reste-t-il à dé

sirer sur la terre, sinon de persévérer dans Jon amour? Le divin Epoux vous a introduites dans son jardin, il vous a couronnées de fleurs et présenté ses fruits délicieux. Tant de faveurs signalées ne feroient-elles sur vos cœurs qu'une impression passagère? N'aurez-vous goûté combien le Seigneur est doux que pour oublier ses délices?

[ocr errors]

EUPHR. Non, assurément ma petite mère; non, je vous l'ai dit et je le répète, je suis toute à mon Dieu, je me donne à lui pour toujours.

CLOT. J'en suis persuadée, ma fille; et vous, ma chère Adelaïde, aimeriez-vous mieux mourir que d'abandonner le Seigneur?

ADEL. Comment pourrions - nous lui échapper? Il nous enchaîne par des liens si aimables !

CLOT. Oui, mes chères compagnes, cette vie nouvelle que vous venez de recevoir, ces généreux sentimens que vous avez conçus, ces nobles résolutions que vous avez prises, vous devez les garder constamment. L'excellence même du bienfait est le premier motif qui nous oblige à le conserver avec soin. Qu'elles sont précieuses, en effet, les grâces que vous avez reçues !

faites-en vous-même le détail, je veux vous laisser le plaisir de raconter les merveilles de votre Dieu.

ADEL. Depuis ma conversion il me prévenoit de ses dons ineffables; cependant un trouble secret et que je ne pouvois dissiper, changeoit souvent ma joie en tristesse. Depuis qu'une confession générale a purifié mes souillures; ah! quel changement heureux! je l'aime davantage, le feu de son amour me pénètre, je cours avec légèreté dans la voie des commandemens. O chastes délices! voluptés pures et célestes, qui inondez mon cœur vous sont-elles comparables, les fausses douceurs que le siècle nous offre ?

EUPHR. Que ne puis-je, mes chères compagnes, vous faire connoître ce que j'éprouve ! Que de consolations! que de douceurs que de tendres sollicitations! ! que d'invitations pressantes! que d'inspirations délicieuses! Que vos dons sont admirables, ô mon Dieu ! le cœur peut bien les sentir, la bouche ne peut les exprimer.

CLOT. C'est peu d'avoir bien commencé, il faut bien finir. C'est de la fin de la vie que dépend notre salut éternel, Vérité ef

frayante! quand nous aurions vécu dans les travaux d'une austère pénitence, dans la pratique de ces œuvres de charité, dans les ardeurs du céleste amour; si nous nous relâchons', si notre dernier soupir n'est pas animé de la vie de la grâce, nous sommes perdues sans ressource.

ADEL. Ah! chère amie, quelles terribles paroles !

CHRIST. Ma fille, pensez-y et ne l'oubliez jamais. Il ne faut qu'un moment pour faire d'un saint un réprouvé.

EUPHR. O justice de mon Dieu, que vous êtes incompréhensible !

CLOT. Nous aurons combattu, mes chères amies, mille fois nous aurons triomphé, les lauriers et les palmes sont dans nos mains. Elle brille à nos yeux, la couronne immortelle qui doit ceindre nos fronts pendant l'éternité; nous croyons que rien ne peut nous la ravir, et dans cette pensée présomptueuse, fatiguées de tant de travaux, nous mettons bas les armes et nous nous reposons: l'ennemi, toujours attentif, profite de ce temps d'inaction pour nous assaillir, nous chancelons: fort de notre faiblesse, il redouble ses attaques, nous

« PrécédentContinuer »