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quelque chose dans ce concours inusité; mais il faut se féliciter de voir se répandre le goût de ces solennités dont l'Académie a eu raison d'augmenter le nombre. Est-ce trop de deux ou trois soirées par an consacrées à entendre la lecture d'une œuvre originale ou le compte-rendu d'un concours? N'y a-t-il pas à Lyon comme à Paris une société qui s'intéresse aux choses intellectuelles, et pour tout dire, un public littéraire ?

L'empressement des auditeurs à la dernière séance répond suffisamment à une telle question, et nul doute qu'il eût été plus grand si l'Académie s'était montrée plus prodigue de ses lettres d'invitation. Décidément la salle actuelle n'est plus suffisante; la ville de Lyon qui renouvelle tous ses monuments ne peut laisser ses établissements littéraires dans l'état précaire et peu digne où ils se trouvent.

On a écouté avec recueillement le discours de M. Bonnet sur l'oisiveté des jeunes gens riches. Le sujet est vaste, et M. Bonnet n'a pas eu de peine à montrer que c'était là une des grandes plaics de notre temps, que l'instabilité actuelle des fortunes n'avait pas de cause plus active. Nos lecteurs ont lu ce morceau dans la Revue; mais ce dont nous ne pouvons donner qu'une idée, c'est de cet accent d'honnêteté sympathique et persuasive qui a provoqué les applaudissements ainsi que l'adhésion sans réserve de l'auditoire.

M. Gunet lisait une traduction en vers de l'OEdipe roi, de Sophocle. Ce que nous pouvons dire de mieux de cet essai, c'est qu'il n'a pas été jugé inférieur à la traduction d'Electre. Nous avons retrouvé le même style, les mêmes traditions de la bonne école tragique, le même succès dans la lutte contre des difficultés extrêmes. On a su gré à M. Gunet d'interpréter et de faire comprendre de cette manière un des chefs-d'œuvre du théâtre grec.

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- Nous devons signaler, pour son importance, un travail qu'exécutent en ce moment MM. de Dignoscyo, ingénieur civil à Lyon, et Rembielinski, ingénieur géographe, graveur à Paris le plan de la ville de Lyon, à l'échelle de. Du moment où nos vieilles rues étroites et malsaines ont fait place' à de magnifiques avenues qui laissent circuler à flot l'air et la santé sur notre population; alors que, sur la rive gauche du Rhône, de nouveaux quartiers se tracent et s'élèvent avec une rapidité merveilleuse, l'Administration municipale a senti le besoin de plans nouveaux en rapport avec les transformations effectuées. Le beau travail, qu'on poursuit par ses ordres, formera aux archives de la ville, une série d'atlas, comprenant au moins 200 feuilles, format grand aigle, où l'Administration des ponts-etchaussées, et celle de la voierie trouveront indiqués les plus petits détails de la grande cité.

Une opération géodésique plus vaste encore, et qui n'intéresse pas moins l'agglomération lyonnaise, est confiée aux mêmes ingénieurs nous voulons parler des levés du cours général du Rhône et de la Saône, exécutés comme point de départ de travaux ultérieurs, en vue d'opposer, suivant la pensée du Gouvernement, une barrière au fléau des inondations.

Comme rudiment à ces deux opérations capitales, on sait que les habiles entrepreneurs qui en sont chargés avaient publié, dès les premiers mois de 1857, un plan complet de la ville de Lyon au un dix millième, ainsi qu'une carte du bassin du Rhône, de Genève à la mer, seuls travaux de cette nature capables de répondre aux besoins des ingénieurs hydrographes et des touristes. Un personnel nombreux d'employés capables est attaché à ces deux opérations capitales, et les fait marcher de front avec une activité qui permet de croire que les résultats définitifs en seront livrés

bien avant l'époque fixée pour leur achèvement; nous serons en mesure alors de les mieux faire connaître à nos lecteurs.

-MM.Martin-Daussigny et Allmer, ont découvert ces jours-ci, au-dessous du pont de Nemours, une inscription romaine qu'ils ont reconnue et lue, en se mettant à moitié dans l'eau, par un vent glacial; ils l'ont fait enlever, le 2 février, dans la matinée, avec l'aide et l'appui de l'autorité, pour lui rendre sa place naturelle dans notre riche musée lapidaire. Nous devons des remerciements à notre nouveau Conservateur, pour sa vigilance et son activité.

Le 19 janvier, un jeune violoniste, M. Antoine Arnstein a donné à l'hôtel de Provence une soirée musicale où il a fait preuve d'un véritable talent comme compositeur et comme exécutant.

Le 30, M. Penavaire, avec le concours de Mlle Auclair, de MM. Ferdinand de Croze, Warnots, Viereck, Laussel, etc., se faisait entendre pour la première fois devant le public réuni dans la salle de la Société philharmonique et y gagnait noblement ses éperons.

Pendant ce temps notre habile chef d'orchestre se faisait entendre au profit des pauvres de la ville de Bourg, et laissait dans cette ville un double souvenir aux dilettanti et aux malheureux. Quant à son concert annuel, si vivement attendu chaque année, M. George Hain le donnera au Grand-Théâtre, le 27 février. On entendra les œuvres de nos vieux et grands maîtres, et les amis du bénéficiaire, comme les amateurs de la musique sérieuse se trouveront assez nombreux pour être trop à l'étroit dans la vaste salle.

En attendant, le 9 de ce mois, à l'hôtel de Provence, M. Ferdinand de Croze, pianiste et maître de chapelle de la cour Parme, donnera un concert où nous aurons le plaisir d'entendre, outre l'éminent artiste, Mile Auclair, MM. Marc Burty, Penavaire, Gilbert, Arnstein, et la Société chorale du 3e arrondissement, dirigée par M. Chapolard.

La reprisc de Norma a eu licu le 1er février, avec un éclat et un succès inaccoutumés; des salves d'applaudissements répétés ont témoigné de tout l'enthousiasme des spectateurs.

Le vendredi, 29 janvier, un convoi d'essai, parti de Seyssel, à 11 heures du matin, est arrivé quelques heures après, sain et sauf à Genève, au milieu d'une grande affluence de curieux saluant l'inauguration d'un service qui va relier si intimement Paris, Lyon et Genève. Dès les premiers jours du printemps, les Lyonnais iront visiter la plus jolie ville et le plus beau lac de la Suisse, et le voyage se fera en quelques heures, à travers les rochers les plus tourmentés, les sites les plus accidentés, la nature la plus pittoresque et la plus sauvage qu'un peintre puisse rêver.

Si nous avions la plume de M. Joseph Bard, nous parlerions, à ce sujet, des aimables et doux villages qui s'épanouissent dans la plaine, du phare de Meximieux qui éclaire la navigation du Rhône, des fortunés hameaux qui dressent à l'air libre leur tête mêlée de verdure et de murailles, et des châteaux qui mettent une robe nouvelle pour voir passer les voyageurs; mais nous ne sommes pas à la hauteur du noble écrivain et nous renvoyons tout simplement nos lecteurs au livre curieux de l'historiographe des chemins de fer.

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L'espace nous a manqué pour rendre compte d'un livre d'une haute moralité qui vient de paraître. Le Guide des Adultes, par M. le docteur Chardon, sera l'objet d'une sérieuse appréciation dans notre prochain nu

méro.

A. V.

Aimé VINGTRINIER, directeur-gérant.

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Lancé des Apennins un vent fougueux du nord,
Ce soir en tourbillons roule la vague au port:
Il siffle, et bondissant du creux de la vallée,
Jusqu'aux sommets déserts de ces rocs escarpés,
Des rameaux de verdure, en doux berceaux groupes,
Tourmente et fait ployer la tête échevelée !

La nuit à l'occident étend son noir manteau;

Et l'ombre, envahissant la Grande Sentinelle (1),
Promène tristement le silence avec elle.

Quelques points lumineux scintillent au hameau,

Firmament de la terre, étoiles prolifiques,
Qu'allume le labeur aux foyers domestiques.

(1, otel sito mi-cotezu, sur les bords de la mer

La lune s'est voilée : un nuage gris-bleu
Dérobe le Vésuve et son fleuve de feu.
Chacun, paisible, écoute, au logis qui l'abrite,
La rafale assaillir son toit de stalactite.

Moi je lutte! battu par les flots et les vents,

Je livre mon front pâle à tous leurs chocs mouvants.
Mon cœur, comme ces monts agités par l'orage,
Subit des éléments le passager outrage........

Mais à l'aube, demain, le soleil de retour
Versera ses flots d'or, et l'ivresse et l'amour;
Les zéphirs, caressant le sein des eaux tranquilles,
Joueront du cap Misène au golfe de Baïa
Sous un ciel diapré, les deux vapeurs mobiles (1)
Reviendront jeter l'ancre aux rives d'Ischia.
L'orage, le bonheur, ici bas n'ont qu'une heure,
A ces volcans éteints rien ne reste attaché;

Et des volcans du cœur rien même ne demeure :

Tendresse, espoir et jours..... tout nous est arraché !
Jules FOREST.

(1) Chaque jour, deux bateaux à vapeur font le trajet de Naples à Ischia,

Ischia, 26 août 1857.

NOTE SUR LE DANGER

DE

L'ACCROISSEMENT DES VILLES

PAR LA DÉPOPULATION DES CAMPAGNES

ET SUR LA NÉCESSITÉ D'AVISER AUX MOYENS DE PRÉVENIR L'ÉMIGRATION

DES POPULATIONS RURALES,

lue

PAR M. VALENTIN-SMITH,

à l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon,

dans la séance du 19 janvier 1858.

I.

Le recensement de 1856 nous apprend que, dans cinquante-quatre départements (1), par un déplacement exté

(1) Cinquante-quatre départements ont vu leur population diminuer au lieu de s'accroître, depuis 1851; trente-deux seulement se sont accrus, et, sur ces trente-deux, il en est douze environ où l'accumulation a été considérable. Parmi les départements qui ont perdu, les plus frappés sont ceux de la Haute-Saône, de l'Isère, de la Meurthe, du Bas-Rhin, de la Meuse, des Vosges, de l'Ariège, etc.; celui de la Haute-Saône a perdu à lui seul le dixième de son effectif. Parmi les départements qui ont le plus gagné, figure au premier rang celui de la Seine, qui s'est accru de 305,000 âmes en cinq ans. Un accroissement aussi gigantesque était tout à fait sans exemple. (Léonce de Lavergne. Population et agriculture. Paris, 1857, p. 314).

<«< Les quarante-trois départements de l'est, du sud-ouest et du centre, déjà beaucoup moins peuplés que les autres, ont perdu ensemble 350,000 habitants, dont moitié par la mortalité et moitié par l'émigration. (Ibid, p. 328.)

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