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litique, il ne voulait pas pousser à bout les réformés ni les forcer à fuir le royaume; heureux si Louis XIV avait pu entendre et retenir les instructions données par Richelieu au comte de Sault, chargé de faire appliquer en Dauphiné les Édits de pacification : « J'estime que comme il ne faut étendre en faveur de ceux de la religion prétendue réformée ce qui est porté par les édits, aussi ne doit-on pas leur retrancher les grâces qui leur y sont accordées; même à présent que, par la grâce de Dieu, la paix est si bien établie dans tout le royaume, l'on ne saurait apporter trop de précaution pour empêcher tous ces mécontentements des peuples. Je vous assure que la véritable intention du roi est de faire vivre paisiblement sous l'observation de ses édits tous ses sujets, et que ceux qui ont l'autorité dans les provinces lui feront service de s'y conformer. » Le temps de la liberté était passé avec Henri IV; celui de la tolérance commençait pour les réformés avec Richelieu, en attendant avec Louis XIV le jour de la persécution.

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LOUIS XIII, LE CARDINAL DE RICHELIEU ET LES AFFAIRES ETRANGERES

La France était soumise; six années de pouvoir avaient suffi à Richelieu pour s'en rendre maitre; il tourna dès lors vers l'Europe son incessante activité. «Il craignait le repos de la paix, écrivait à Venise l'ambassadeur Nani, et, s'estimant plus en sûreté dans l'agitation des armes, il fut l'auteur de tant de guerres et de si longues et pesantes calamités, il fit couler tant de sang et de larmes au dedans et au dehors du royaume, qu'il n'y a pas lieu de s'étonner si beaucoup de gens l'ont représenté comme sans foi, atroce dans ses haincs, inflexible dans sa vengeance. Mais on ne saurait cependant lui refuser les dons que ce monde a coutume d'attribuer aux plus grands hommes, et ses ennemis les plus acharnés sont contraints d'avouer qu'il en possédait tant et de si grands, qu'il eût porté la puissance et la prospérité partout où il eût dirigé les affaires. On peut dire qu'ayant réuni la France divisée, secouru l'Italie, bouleversé l'Empire, troublé l'Angleterre et

affaibli l'Espagne, il a été l'instrument choisi par la Providence céleste pour diriger les grands événements de l'Europe. »

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L'esprit libre et pénétrant du Vénitien ne s'y était pas trompé; partout, en Europe, se retrouvait la main de Richelieu. « Il faut toujours négocier de près et de loin, » disait-il; les négociations en France lui avaient réussi; il porta plus loin ses vues; déjà de nombreux traités avaient signalé les premières années du pouvoir du cardinal; depuis 1650, son activité extérieure redoubla. De 1625 à 1642, soixante-quatorze traités furent conclus par Richelieu quatre avec l'Angleterre, douze avec les Provinces-Unies, quinze avec les princes allemands, six avec la Suède, douze avec la Savoie, six avec la République de Venise, trois avec le pape, trois avec l'empereur, deux avec l'Espagne, quatre avec la Lorraine, un avec les Ligues grises de la Suisse, un avec le Portugal, deux avec les révoltés de Catalogne et de Roussillon, un avec la Russie, deux avec l'empereur du Maroc; tel fut l'immense réseau de négociations diplomatiques dont le cardinal tint les fils pendant dix

neuf ans.

L'énumération des alliances suffirait à le prouver sans autre commentaire la politique extérieure de Richelieu continua celle de Henri IV; ce fut aux alliances protestantes qu'il demanda leur appui pour soutenir sa lutte contre la maison d'Autriche allemande ou espagnole. Pour donner un libre essor à ses vues, il attendit d'avoir vaincu les huguenots à l'intérieur; presque tous ses traités avec les puissances protestantes sont postérieurs à 1630. Dès qu'il se fut assuré que les dissensions politiques de la France elle-même ne viendraient plus entraver ses desseins à l'extérieur, il marcha d'un pas ferme à cet affai blissement de l'Espagne et à ce bouleversement de l'Empire dont parle Nani; Henri IV et la reine Élisabeth, poursuivant le même but, avaient cherché et trouvé les mêmes alliés; Richelieu eut de plus qu'eux la fortune de rencontrer, pour exécuter ses desseins, le roi de Suède Gustave-Adolphe.

Richelieu n'était pas encore rentré dans le conseil du roi (1624), lorsque la rupture des longues négociations entre l'Angleterre et l'Espagne, au sujet du mariage du prince de Galles avec l'infante, fut officiellement déclarée au parlement. Au moment même où le prince Charles, avec le duc de Buckingham, courait en poste jusqu'à Madrid pour voir l'infante Marie-Anne d'Espagne, on pensait déjà à Paris à le marier avec Henriette de France, jeune sœur du roi, àgée de quatorze

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