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malgré une signification en tous points conforme aux prescriptions de l'art 1690 du C. civ. faite aux notaires, débiteurs présumés de l'indemnité, le 7 oct. 1890, ces mêmes cessionnaires s'empressaient dix jours après le décret de suppression, c'est-à-dire le 24 nov. 1891, de la renouveler ; Attendu que le décret de suppression du 14 nov. 1891 n'a donc pas seulement remplacé le décret de transmission, comme l'indique le Tribunal d'Apt, dans son jugement du 8 déc. 1897, et, après lui, la Cour de Nîmes, dans son arrêt confirmatif du 30 nov. 1898, (Rev. du Notariat, 1899, p. 636) mais a créé de toutes pièces, au profit de Rouchaud, une créance au sujet de laquelle il ne pouvait être fait, jusqu'à ladite date, aucun acte valable; que les cessions consenties à D... et Gauthier, près d'un an avant la date du décret supprimant l'étude de Saint-Sulpice-de-Roumagnac, doivent donc être considérées comme nulles et non avenues;

Attendu, en ce qui a trait à la deuxième question, que les sieurs D... et Gauthier, et encore moins les notaires, ne sauraient sérieusement soutenir que Mme Enou, bénéficiaire du privilège de cession d'office à elle concédé médiatement par Grenon à l'encontre de Rouchaud, n'est pas recevable à demander aux notaires d'exécuter le décret du 14 nov. 1891; que, s'il n'est pas douteux qu'il incombait surtout au ministère public que les dispositions du décret ne restassent pas lettre morte, il est non moins certain que le soin de poursuivre l'exécution de ce même décret appartient au bénéficiaire de l'indemnité qui peut obtenir, contre les titulaires débiteurs, un jugement de condamnation ; c'est ce qui résulte, au surplus, d'une circulaire ministérielle du 1er mars 1890, d'un jugement du tribunal de Saint-Brieuc du 12 mai 1861 et enfin d'un arrêt de la Cour d'Orléans du 10 janv. 1863; Attendu qu'il en est de même en ce qui concerne le bien fondé de ladite demande, la nullité des cessions D... et Gauthier faisant disparaître tout prétexte à critiquer, quant à présent, le privilège de cession d'office invoqué par Mme Enou vis-à-vis d'une indemnité que la décision du tribunal a pour conséquence de faire rentrer dans le patrimoine du débiteur du privilège, le sieur Rouchaud; que, vainement, les notaires soulèvent à l'encontre des prétentions de Mme Enou, une fin de non-recevoir tirée de ce qu'ils auraient payé valablement en vidant leurs mains en celles des sieurs D... et Gauthier, possesseurs apparents de la créance Rouchaud; que, pour que des débiteurs puissent, en effet, invoquer à leur décharge l'art. 1240 du C. civ., il est indispensable qu'ils aient été de bonne foi, ce qui ne se rencontre point dans l'affaire actuelle ; Attendu qu'ayant, en effet, presque tous colla

boré, soit comme notaires instrumentaires, soit comme donneurs de renseignements, à la confection de la quittance subrogative dont se prévaut Mme Enou, ils ne peuvent sérieusement soutenir qu'ils ont ignoré ledit acte, et qu'ils n'ont pas songé à se prémunir contre les éventualités d'un paiement douteux en se faisant remettre par D... et Gauthier, au moment du versement des fonds, un écrit qui les mit à l'abri de toute revendication; qu'il y a donc lieu d'obliger les notaires à exécuter un décret aux prescriptions duquel ils ont eu le tort grave de ne pas se conformer;

Par ces motifs; — Annule les cessions faites par Rouchaud à D......., le 30 sept. 1890, et à Gauthier, le 6 oct. de la même année ; Dit, en conséquence, que les sieurs Pradel, André Léonardon et Gauthier, notaires du canton de Ribérac. seront tenus, en conformité du décret de suppression de l'étude de notaire de Saint-Sulpice-de-Roumagnac, en date à Paris du 14 nov. 1891, de verser, le jour même de la signification du présent jugement à la Caisse des dépôts et consignations de Riberac les sommes mises à leur charge par le décret précité ;

Dit aussi que les intérêts desdites sommes demeurent à la charge des mêmes notaires à partir des dates suivantes : André Léonardon, du 24 déc. 1891; Pradel, du 28 déc. 1891; Gauthier, du 29 déc, 1891, et Léon Léonardon du 1er janv. 1892; Condamne enfin les sieurs D..., Gauthier, Pradel, André Léonardon et Léon Léonardon en tous les dépens.

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M. Chancel pr. REMARQUE. Voy. dans le même sens que le jugement cidessus reproduit : Montpellier 21 févr. 1895 et Nîmes 30 nov. 1898 (Rev. du notariat, art. 10338, année 1899, p. 636.) Voy. également une dissertation de M. Evariste Lepage, (Revue du notariat, art. 10336, année 1899, p. 625 et suiv).

DOCUMENTS LÉGISLATIFS

ART. 8904.

ACCIDENTS DU TRAVAIL, RESPONSABILITÉ.

Loi modifiant divers articles de la loi du 9 avril 1898, concernant les responsabilités des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail (1).

Le Sénat et la Chambre des députés ont adopté,

(1) J. off. du 27 mars 1902, p. 2202).

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Art. 1er.

Les articles 2, 7, 11, 12, 17, 18, 20 et 22 de la loi du 9

avril 1898 sont modifiés ainsi qu'il suit :

Art. 2. Les ouvriers et employés désignés à l'article précédent ne peuvent se prévaloir, à raison des accidents dont ils sont victimes dans leur travail, d'aucunes dispositions autres que celles de la présente loi.

Ceux dont le salaire annuel dépasse deux mille quatre cents francs (2,400 fr.) ne bénéficient de ces dispositions que jusqu'à concurrence de cette somme. Pour le surplus, ils n'ont droit qu'au quart des rentes stipulées à l'article 3, à moins de conventions contraires élevant le chiffre de la quotité.

Art. 7. Indépendamment de l'action résultant de la présente loi, la victime ou ses représentants conservent contre les auteurs de l'accident, autres que le patron ou ses ouvriers et préposés, le droit de réclamer la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun.

L'indemnité qui leur sera allouée exonérera à due concurrence le chef de l'entreprise des obligations mises à sa charge. Dans le cas où l'accident a entraîné une incapacité permanente ou la mort, cette indemnité devra être attribuée sous forme de rentes servies par la caisse nationale des retraites.

En outre de cette allocation sous forme de rente, le tiers reconnu responsable pourra être condamné, soit envers la victime, soit envers le chef de l'entreprise, si celui ci intervient dans l'instance, au payement des autres indemnités et frais prévus aux articles 3 et 4 ci-dessus. Cette action contre les tiers responsables pourra même être exercée par le chef d'entreprise, à ses risques et périls, au lieu et place de la victime ou de ses ayants droit, si ceux-ci négligent d'en faire usage.

Art. 11. Tout accident ayant occasionné une incapacité de travail doit être déclaré dans les quarante-huit heures non compris les dimanches et jours fériés, par le chef d'entreprise ou ses préposés, au maire de la commune qui en dresse procès-verbal et en délivre immédiatement récépissé.

La déclaration et le procès-verbal doivent indiquer, dans la forme réglée par décret, les nom, qualité et adresse du chef d'entreprise, le lieu précis, l'heure et la nature de l'accident, les circonstances dans lesquelles il s'est produit, la nature des blessures, les noms et adresses des témoins.

Dans les quatre jours qui suivent l'accident, si la victime n'a pas repris son travail le chef d'entreprise doit déposer à la mairie qui lui en délivre immédiatement récépissé, un certificat de médecin indiquant l'état de la victime, les suites probables de l'accident, et l'époque à laquelle il sera possible d'en connaître le résultat définitif.

La déclaration d'accident pourra être faite dans les mêmes conditions par la victime ou ses représentants jusqu'à l'expiration de l'année qui suit l'accident.

Avis de l'accident, dans les formes réglées par décret, est donné immédiatement par le maire à l'inspecteur départemental du travail ou à l'ingénieur ordinaire des mines chargé de la surveillance de l'entreprise.

L'article 15 de la loi du 2 novembre 1892 et l'article 11 de la loj du 12 juin 1893 cessent d'être applicables dans les cas visés par la présente loi.

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Art. 12. Dans les vingt-quatre heures qui suivent le dépôt du certificat, et au plus tard dans les cinq jours qui suivent la déclaration de l'accident, le maire transmet au juge de paix du canton où l'accident s'est produit la déclaration et soit le certificat médical, soit l'attestation qu'il n'a pas été produit de certificat.

Lorsque, d'après le certificat médical, produit en exécution du paragraphe précédent ou transmis ultérieurement par la victime à la justice de paix, la blessure paraît devoir entraîner la mort ou une incapacité permanente, absolue ou partielle de travail, ou lorsque la victime est décédée, le juge de paix, dans les vingt-quatre heures, procède à une enquête à l'effet de rechercher :

1o La cause, la nature et les circonstances de l'accident;

2o Les personnes victimes et le lieu où elles se trouvent, le lieu et la date de leur naissance;

3o La nature des lésions;

4o Les ayants droit pouvant, le cas échéant, prétendre à une indemnité, le lieu et la date de leur naissance;

5o Le salaire quotidien et le salaire annuel des victimes;

6o La société d'assurance à laquelle de chef d'entreprise était assuré ou le syndicat de garantie auquel il était affilié.

Les allocations tarifées pour le juge de paix et son greffier en exécution de l'article 29 de la présente loi et de l'article 31 de la loi de finances du 13 avril 1900 seront avancées par le Trésor. Art. 17. Les jugements rendus en vertu de la présente loi sont susceptibles d'appel selon les règles du droit commun. Toutefois l'appel, sous réserve des dispositions de l'article 449 du code de pro

cédure civile, devra être interjeté dans les trente jours de la date du jugement s'il est contradictoire, et, s'il est par défaut, dans la quinzaine à partir du jour où l'opposition ne sera plus recevable.

L'opposition ne sera plus recevable en cas de jugement par défaut contre partie, lorsque le jugement aura été signifié à personne, passé le délai de quinze jours à partir de cette signification,

La cour statuera d'urgence dans le mois de l'acte d'appel. Les parties pourront se pourvoir en cassation.

Toutes les fois qu'une expertise médicale sera ordonnée, soit par le juge de paix, soit par le tribunal ou par la cour d'appel, l'expert ne pourra être le médecin qui a soigné le blessé, ni un médecin attaché à l'entreprise ou à la société d'assurance à laquelle le chef d'entreprise est affilié.

Art. 18. L'action en indemnité prévue par la présente loi se prescrit par un an à dater du jour de l'accident, ou de la clôture de l'enquête du juge de paix, ou de la cessation du payement de l'indemnité temporaire.

L'article 55 de la loi du 10 août 1871 et l'article 124 de la loi du 5 avril 1884 ne sont pas applicables aux instances suivies contre les départements ou les communes, en exécution de la présente loi. Aucune des indemnités déterminées par la présente loi ne peut être attribuée à la victime qui a intentionnellement provoqué l'accident.

Art. 20.

Le tribunal a le droit, s'il est prouvé que l'accident est dû à une faute inexcusable de l'ouvrier, de diminuer la pension fixée au titre 1er.

Lorsqu'il est prouvé que l'accident est dû à la faute inexcusable du patron ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, l'indemnité pourra être majorée, mais sans que la rente ou le total des rentes allouées puisse dépasser, soit la réduction, soit le monatnt du salaire annuel.

En cas de poursuites criminelles, les pièces de procédure seront communiquées à la victime ou à ses ayants droit.

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Le même droit appartiendra au patron ou à ses ayants droit. Art. 22. Le bénéfice de l'assistance judiciaire est accordé de plein droit, sur le visa du procureur de la République, à la victime de l'accident ou à ses ayants droit devant le président du tribunal civil et devant le tribunal.

Le procureur de la République procède comme il est prescrit à l'article 13 (§§ 2 et suivants) de la loi du 22 janvier 1851, modifiée par la loi du 10 juillet 1901.

Le bénéfice de l'assistance judiciaire s'applique de plein droit à

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