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vous ne le vouliez ainsi? ce que vous n'avez point appelé, comment se conservera-t-il?

Et non-seulement Dieu conserve et gouverne toutes choses par sa providence; mais il dirige encore les mouvements et les actions des êtres, qui ont en eux-mêmes un principe d'action et de mouvement, prévenant, mais toutefois n'empêchant point l'influence des choses secondes. Son action secrète s'étend à tout; elle agit fortement partout, dit le Sage, et ordonne toutes choses comme il convient. Et c'est ce qui fit dire à l'Apôtre, lorsqu'il annonçoit aux Athéniens le Dieu qu'ils adoroient sans le connoître : il n'est pas éloigné de chacun de nous; nous avons en lui la vie, le mouvement et l'étre (e).

En voilà assez sur l'explication du premier article. Ajoutons cependant encore que l'œuvre de la création est commune aux trois personnes de la sainte et indivisible Trinité. Car si dans le symbole des apôtres nous apprenons que le Père a créé le ciel et la terre, nous lisons du Fils, dans l'Ecriture, que toutes choses ont été faites par lui; et du SaintEsprit l'esprit du Seigneur étoit porté sur les eaux. Les cieux ont été affermis par la parole du Seigneur, dit le psalmiste, et toute leur beauté est l'effet du souffle de sa bouche.

posset aliquid permanere, nisi tu voluisses; aut quod à te vocatum non esset, conservaretur 1?

Non solum autem Deus universa quæ sunt, providentia sua tuetur atque administrat, verum etiam quæ moventur, et agunt aliquid, intima virtute, ad motum atque actionem ita impellit, ut quamvis secundarum causarum efficientiam non impediat, præveniat tamen, cum ejus occultissima vis ad singula pertineat, et quemadmodum Sapiens testatur : Attingat a fine usque ad finem fortiter, et disponat omnia suaviter 2. Quare ab Apostolo dictum est, cum apud Athenienses annuntiaret Deum quem ignorantes colebant : non longe est ab unoquoque nostrum 3. In ipso enim vivimus et movemur, et sumus.

Atque hæc de primi articuli explicatione satis fuerint, si tamen illud etiam admonuerimus, creationis opus omnibus sanctæ et individuæ Trinitatis personis commune esse. Nam hoc loco, ex apostolorum doctrina, Patrem creatorem cœli et terræ confitemur: in Scripturis sacris legimus. de Filio: omnia per ipsum facta sunt: et de Spiritu sancto, Spiritus Domini ferebatur super aquas: et alibi, Verbo Domini cœli firmati sunt, Spiritu oris ejus omnis virtus eorum o ̧

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Sap. 11. 26. — Sap. 8. 1. -3 Act. 17. 27, 28. —4 Joan. I. 3 – 5 Gen. 2.

Ps. 52 6.

NOTES

SUR LE PREMIER ARTICLE

PAGE 30.

(a) IL est nécessaire à l'homme, dit saint Thomas, de croire et de recevoir par manière de foi, per modum fidei, non-sculement les choses qui sont au-dessus de sa raison, mais encore celles que la raison peut connoître; et cela, premièrement, afin que l'homme parvienne plus tôt à la connoissance de la vérité divine; secondement, afin que la connoissance de Dieu soit à la portée de tout le monde; troisièmement, afin qu'on ait la certitude. La raison humaine est en effet bien fautive dans les choses divines: témoin les philosophes qui, même dans les choses humaines, sont tombés avec leur raison dans des erreurs et des contradictions. Pour que l'on puisse donc avoir de Dieu une connoissance certaine et hors de tout doute, il a fallu que les vérités divines fussent transmisès par le moyen de la foi, comme parole de Dieu, qui ne peut mentir. 2. 2. quæst. 2. art. 25.

Les progrès de la vraie philosophie nous permettent d'aller aujourd'hui plus loin que l'ange de l'Ecole, et de soutenir que l'homme ne peut rien connoître certainement, dans les choses de la religion, que par la révélation divine, par la foi. L'homme n'a pas été fait pour chercher et pour découvrir la vérité; mais la vérité lui a été donnée dès le commencement parce qu'il en avoit besoin; et tout son pouvoir, comme tous ses devoirs, se bornent à l'accepter, à la recevoir de la tradition, de l'enseignement commun, de l'autorité, en un mot. L'histoire du genre humain prouve qu'il n'a jamais fondé la certitude de ses croyances sur un autre motif.

La raison peut bien montrer le rapport des vérités qu'elle connoît par la foi avec les premiers principes, qui sont la loi de tous les raisonnements; mais si elle ne les connoissoit pas auparavant, elle seroit incapable de les découvrir.

PAGE 39.

(b) DIRE de Dieu qu'il est tout-puissant, c'est dire qu'il a toutes les perfections. Et effet on ne conçoit pas une perfection infinie, comme la puissance, unie à d'autres perfections, qui ne seroient pas infinies. Supposons que l'intelligence, ou la sagesse, ou la bonté, soient bornées et limitées en Dieu : comment sa puissance alors pourra-t-elle être souveraine? comment Dieu pourroit-il exercer sa puissance par rapport aux choses qu'il ignoreroit ou qu'il ne pourroit régler par sa sagesse et par sa bonté? D'ailleurs les œuvres de la puissance divine sont tout à la fois ce qui frappe davantage nos sens et surtout les sens du peuple, et ce qui porte l'empreinte la plus sensible de toutes ses perfections. C'est aussi l'idée de cette puissance souveraine qui est la plus propre à retenir les hommes dans la crainte, dans le respect et dans la soumission à toutes les volontés de Dieu.

PAGE 43.

(c) LES incrédules ont demandé où Dieu avoit pris l'idée de la matière, pour la créer, et par-là ils ont montré ou leur mauvaise foi ou leur ignorance. Leur mauvaise foi, s'ils avoient quelque connoissance de l'être de Dieu et de sa puissance; puisque l'essence divine, dit saint Augustin, est le modèle immuable de toutes les choses variables et changeantes du monde, et que sa puissance infinie consiste essentiellement à pouvoir donner l'existence à tout ce dont il trouve en lui-même le modèle et l'image. Leur ignorance, s'ils ne savent pas que l'être spirituel et nécessaire est, par sa nature, la source de tous les possibles, et que la matière n'est rien qu'une sorte de manifestation de ses perfections et de ses pensées.

Au reste, toutes les difficultés contre la création du monde viennent échouer contre ces deux grands faits : le genre humain tout entier a toujours cru à la création du monde; et s'il y a eu à cet égard quelques erreurs, elles ont été celles de quelques philosophes curieux ou infidèles aux traditions antiques, plutôt. que celles du genre humain lui-même. L'autre fait est que la matière est évidemment imparfaite, bornée, sans action et sans intelligence donc elle n'a pas précédé les êtres intelligents et parfaits; et elle ne tient son existence que d'une cause au-dessus d'elle.

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Qu'importe après cela qu'on ignore ou qu'on ne puisse comprendre de quelle manière a pu s'opérer la création? tous les jours nous sommes à même de reconnoître l'ignorance profonde où nous sommes sur la nature et l'essence des choses et de leurs propriétés; et cependant nous ne cessons pas pour cela d'en croire sincèrement l'existence. Pourquoi agirions-nous différemment quand il s'agit des opérations de Dieu? nous ne comprenons rien de ce qui nous environne, pas même le mouvement de notre langue, quand elle exprime les pensées de notre esprit, ni le feu, ni la lumière, ni la santé, ni la maladie, ni la guérison, ni la mort, toutes choses que nous avons sans cesse sous les yeux : comment oserions-nous exiger de Dieu qu'il nous fasse comprendre la création? croyons-la fermement, puisque la foi nous l'enseigne, et que la raison s'élève jusqu'à en concevoir la nécessité; mais ne cherchons pas à comprendre ce qui sera à jamais au-dessus de toute intelligence créée, comment et par quels moyens l'œuvre de la création s'est opérée.

PAGE 44.

(d) De savoir en quel lieu de l'univers est situé l'enfer, dit Bergier, c'est une question tout au moins inutile. La révélation ne nous l'apprend point. Les conjectures des philosophes et des théologiens sur ce sujet sont également frivoles. Les uns ont trouvé bon de placer l'enfer au centre de la terre, sans doute à cause du feu central; les autres dans le soleil, qui est le centre du système planétaire, etc.

Il nous paroît mieux de nous en tenir à la sage réflexion de saint Augustin lorsqu'on dispute sur une chose très-obscure, sans avoir des enseignements clairs et certains, tirés de l'Ecriture, la présomption humaine doit s'arrêter et ne pencher pas plus d'un côté que d'un autre.

Le saint docteur a suivi lui-même cette règle touchant la question présente. Il avoit dit dans son ouvrage sur la Genèse que l'enfer n'est pas sous terre; mais dans ses Rétractations il reconnoît qu'il auroit dû plutôt dire le contraire, sans néanmoins l'affirmer; ct dans la Cité de Dieu, il dit que personne n'en sait rien, à moins que Dieu ne l'ait révélé. Bergier, dictionn. artic. Enfer. Rien de plus sage que de ne rien prononcer sur des choses difficiles, dont la foi ne parle pas. Ce devroit être la règle de conduite de tout honnête homme... Rien n'empêche au reste qu'on

ne regarde comme très-problable l'opinion qui met l'enfer au centre de la terre. La philosophie ne peut ni la contredire ni la combattre; et la théosophie, si répandue depuis un demi siècle et plus, en fait presque un de ses dogmes favoris. Mais l'Ecriture semble l'indiquer très-positivement.

PAGE 47.

(e) LA providence, qui n'est autre chose que le gouvernement du monde, par la bonté, la sagesse et la puissance divine, ne s'exerce pas de la même manière à l'égard de tous les êtres. Ceux qui n'ont point de volonté et d'action, sont soumis à des lois né-cessitantes, et ils ne peuvent rien de leur propre fonds, ni pour y correspondre, ni pour s'y opposer. Mais ceux qui sont doués d'intelligence, de liberté et d'action, sont soumis à des lois obligeantes, et ils peuvent ou s'y soumettre ou les enfreindre à volonté : en sorte néanmoins qu'en désobéissant ils font une chose qui tourne à leur désavantage, et qu'ils deviennent ainsi, dans un sens, les propres auteurs des maux où ils tombent. Ainsi la créature intelligente ne peut en aucun cas se plaindre que la Providence lui ait manqué; au contraire, la Providence elle-même a droit de lui reprocher d'avoir manqué aux lois de sa sagesse et de sa bonté. Tel est le caractère le plus certain et le plus évident de la loi; c'est de laisser libres les volontés qu'elle oblige, mais de lier leurs actions avec le bonheur ou le malheur, la récompense ou le châtiment, sans qu'elles aient ni la puissance ni la force de rompre cette liaison nécessaire. Dès-lors l'obligation imposée par Dieu de pratiquer la vertu, n'est que l'ordre donné à l'homme de chercher le bonheur.

Au reste la providence de Dieu ne se borne pas à cette vie misérable; et si quelques-uns des événements de ce monde semblent l'accuser de négliger ses créatures, la foi nous apprend qu'un jour l'équilibre sera rétabli partout, et que nous verrons combien tout étoit dans l'ordre, même en ce monde, lorsqu'il lui plaira de nous manifester les raisons générales et particulières de la conduite qu'elle a observée envers chacun sur la terre. Voyez, pour plus de développement sur cette importante matière, les soirées de Saint-Pétersbourg, du Comte de Maistre. On n'a jamais mieux parlé de la Providence. Quand on a lu cet ouvrage, on doit être catholique dans le fond de l'âme. On ne croit plus seulement, mais on aime.

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