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«La ville de Senlis s'est toujours distinguée par des actes de modération et d'humanité. On sait qu'elle reçut des ordres exprès de la cour, de faire main basse sur les Huguenots, la nuit de la Saint-Barthélemi, 1572. Elle se contenta de les faire avertir de se retirer. M. de Thou fait honneur de cette clémence à M. de Montmorency. Quominùs tamen Sylvanecti quidquàm à seditiosi moveretur, prudentia Francisci Momorantii insula Franciæ præsidis, qui Cantilia haud hinc longè erat, prohibitum est. D'Aubigné dit la même chose que M. de Thou. Cependant M. Mallet, témoin oculaire, se contente de dire : « Le 24 août 1572, en la journée de Saint-Barthélemi, furent faits grandes inhumanités et massacre des Huguenots, excepté en Picardie et à Senlis, où il ne se fit aucun remuement ni outrage, les Huguenots y demeurant paisibles. Seulement furent avertis de se retirer hors la ville, sans bruit, ainsi qu'ils firent. »

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Rappelons cette phrase d'Anquetil : M. DE THOU liv. 52, fait HONNEUR de cette retenue, au milieu du délire général, aux MontMORENCYS. N'y a-t-il pas ressemblance avec ces mots écrits par M. Rouyer: M. DE THOU FAIT HONNEUR de cette clémence à M. DE MONTMORENCY. Rapprochons encore ces expressions d'Anquetil, mais MALLET et VAULTIER, deux habitans de la ville, TÉMOINS OCULAIRES, des expressions suivantes qui sont de M. Rouyer: Cependant M. MALLET, TÉMOIN OCULAIRE. La similitude ne frappet-elle pas encore nos yeux?

Il est aisé d'en montrer l'origine.

Anquetil ayant été envoyé à Senlis vers 1766, pour surveiller et ranimer les études du collége de cette ville, y composa à cette époque, avons-nous dit, son ouvrage de l'Esprit de la ligue. Tout nous porte à croire qu'il fit connaissance avec le chanoine Rouyer qui lui communiqua son essai historique, ou, du moins, qu'il eut cette communication d'une manière quelconque. Alors il prit

erite de M. Afforty, intitulée Collectanea Sylvanectensia, qui forme vingtcinq volumes in-folio, d'une écriture très-serrée, et appartenant aussi à la bibliothèque publique de Senlis.

la note que nous avons rappelée, et l'ajouta à son texte, en la modifiant à sa manière.

La différence qu'il est aisé d'apercevoir, c'est que cette citation d'Anquetil mentionne, Vaultier, sur lequel les observations de M. Rouyer, telles que nous les avons rapportées, gardent le silence. Cela s'explique. En marge de son texte même, et à propos d'événemens autres que la Saint-Barthélemi, M. Rouyer cite le nom de cet autre écrivain. Ce nom aura frappé Anquetil qui, par mégarde, et sans faire attention à l'opposition des dates, l'aura joint au nom de Mallet.

Nous avons cru nécessaire d'entrer dans cette espèce de discussion. Maintenant prenons à part chaque auteur et d'abord informons les lecteurs des manuscrits de Mallet; que nous avons eus à notre disposition.

Le plus complet et le meilleur dans son ensemble, est un volume petit in-4o, de 125 pages de texte, qui a été acquis par nous, il y a plusieurs années, à la vente des livres de M. Tremblay, imprimeur.

Voici le titre :

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Copie d'un manuscrit qui a pour titre :

<«< Extrait en bref de ce qui s'est passé en la ville de Seulis et ès >> environs d'icelle, depuis l'an 1400 que Charles VI était roi de » France, jusqu'en 1594.

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་་

Copié par moi Antoine de La Ruelle, avocat à Senlis, sur

l'original (écrit en 1621) de la main de M. Mallet, ancien con»seiller au présidial de Senlis, premier échevin de ladite ville, » mon bisayeul paternel. >>

Est-ce vraiment cette copie de M. de La Ruelle que nous possédons? C'est la copie de cette même copic, et faite par M. Plansson, qui, sur le verso de la couverture, a écrit:

» La présente copie appartient à Me Jean-Henri Plansson, » conseiller au bailliage et présidial de Senlis, ancien premier » échevin de ladite ville, et a été par lui écrite au mois d'avril 1742, » sur la copie du sieur de La Ruelle, avocat, tirée de l'original » de M. Mallet, laquelle est présentement entre les mains de,

>>

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M. de Saint-Leu, doyen de Notre-Dame, et conseiller audit. présidial de Senlis. »

L'original de Mallet, ayant appartenu à M. de Saint-Leu, n'existe plus, de même que la copie faite par M. de La Ruelle: du moins, il nous a été impossible de retrouver ces deux manuscrits. Nous n'avons que celui de M. Plansson et quelques extraits des premiers.

Parlons de ces extraits:

Nous les trouvons dans la collection manuscrite de M. Afforty qui les a reproduits deux fois, sans changemens, d'abord parmi les volumes qu'il n'a pas rédigés chronologiquement, et ensuite à la page 585 et suivantes d'un des volumes, qu'il a disposés depuis par ordre chronologique, et à la date de l'année 1589. Ils sont intitulés Discours véritable de la surprise de la ville de Senlis par la ligue, et réduction d'icelle en l'obéissance du roi, le siége ayant été levé le 17 mai 1589. Histoire du siége de Senlis, commencé le 30 avril, l'an 1589.

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Ce titre Discours véritable est presque pareil à celui du Récit véritable de la surprise de Senlis, par un auteur contemporain et admis dans cette collection, mais les textes diffèrent totalement, excepté l'espèce d'introduction ajoutée au premier et qui a quelques rapports avec le préambule du second. Je ne saurais rendre raison de ces ressemblances, du reste peu importantes pour nous. M. Afforty n'a pas soupçonné que Mallet fût l'auteur des passages qu'il a copiés, et qui, quoique assez informes, ont été considérés par lui comme des ouvrages distincts et complets (1).

Nous avons trouvé quelques pages tirées de Mallet, à la suite d'un extrait manuscrit du Récit de la surprise de Senlis, qui,

(1) Plusieurs habitans de Senlis possèdent des copies plus ou moins exactes de ces mêmes passages. Elles nous ont été prêtées : nous en avons tiré un faible parti. Je me souviens que presque tous les manuscrits dont il est ici question, embrassent, du moins en substance, ce que contient mon édition de Mallet, depuis et y compris le second alinéa de la page 66, jusqu'à la fin du dernier alinéa de la page 98, sauf le préambule mis en tête de ces manuscrits, et qui n'est pas de Mallet.

ainsi que nous le disons plus loin, nous a été communiqué par M. Dufay, avocat à Senlis. Malgré l'inexactitude du copiste, elles nous ont offert quelques phrases omises par M. Plansson qui, ayant rencontré sans doute une grande difficulté à déchiffrer plusieurs parties des premiers textes, a été obligé, pour sa part, d'y renoncer décidément et a fait plusieurs et cætera, que nous avons remplacés ordinairement par trois points. Des lacunes ont été laissées en blanc. Nous avons aussi puisé dans M. Afforty quelques expressions supplémentaires et quelques variantes.

Le titre de l'ouvrage de Mallet porte: Depuis l'an 1400 jusqu'en 1594. Le texte de M. Plansson s'arrête peu après le 18 mars 1590. Plusieurs années manquent (1). Néanmoins, nous avons retrouvé une partie du reste de cette année 1590.

Le morceau dont nous parlons comme étant de Mallet, a été copié aussi par M. Plansson, mais séparément et sans l'attribuer à Mallet. Cette copie en outre est très-inexacte. Nous en avons vu d'autres meilleures, que nous avons comparées entr'elles et dont nous nous sommes servis dans ce recueil. Une porte ce titre ::

« Relation de la trahison découverte contre la ville de Senlis » en l'année 1590, le mardi 3 juillet, tirée d'un vieux manuscrit » d'un échevin qui était lors en charge.

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Cette relation, suivant nous, ne peut être que de Mallet. Voici nos raisons.

Mallet fut nommé échevin le premier juillet 1590. L'auteur était échevin en juillet 1590.

A la suite de presque tous les manuscrits de la Relation, se trouve la Liste des pendus vers le tems de l'escalade, qui est reproduite par M. Plansson, immédiatement après le texte de Mal

(1) Le commencement de l'ouvrage, qui nous rend compte de la situation de la ville de Senlis et de ce qu'elle contient, décrit vraiment un état de choses tel qu'il devait être en 1594, puisque le titre porte: Jusqu'en 1594, Aussi avons-nous mis la date de 1594, au haut de la page. Mais à l'égard des faits qui se sont passés cette année, la narration de l'historien en est perdue pour nous.

let. Cette espèce de rapprochement indique assez une commune origine.

M. Afforty, à la page 1236 de son recueil manuscrit (partie non disposée par ordre chronologique), attribue cette relation qu'il transcrit, à Jehan Mallet lui-même.

A la page 112 de Mallet, où il est question de la prise faite de plusieurs prisonniers, amenés à Senlis, entr'autres, du sieur Dezonville, l'auteur ajoute: Frère du seigneur de Vieuxpont, DONT IL SERA PARLÉ CI-APRÈS. Or, à cause de l'interruption du texte de M. Plansson, qui se manifesté quelques pages après, il n'y est plus parlé de ce Dezonville; mais il en est parlé au commencement du morceau que nous voulons restituer à Mallet. Ainsi Mallet lui-même annonce d'avance ce récit : il le revendique en conséquence comme sa propriété.

Enfin il est de la forme et du style adoptés par lui. La date s'en rattache parfaitement à ce qui suit le 18 mars 1590, puisqu'il part du 3 juillet de cette année.

Nous pensons que ces observations sont plus que suffisantes pour justifier la restitution que nous faisons au texte,

Mallet, jusqu'à présent, n'a été mis en œuvre que dans l'ouvrage de M. Rouyer, et par l'auteur de l'histoire de Senlis, gros manuscrit in-folio, appartenant à la bibliothèque de cette ville (1), deux documens qui n'ont jamais été publiés.

A présent, passons en revue les actions privées et politiques de Jehan Mallet, ancien échevin de la ville de Senlis.

C'est en 1568 que pour la première fois il est question de Mallet. Il nous apprend lui-même que, cette année, il alla à Paris avec plusieurs députés porter à Charles IX les papiers secrets du

(1) Će manuscrit est cité, je crois, par le père Lelong, dans sa Bibliothèque des historiens de France. L'auteur renvoie surtout aux premières années racontées par Mallet; et, en marge, il lui donne ce titre: Mémoires de M. Mallet. Voyez les pages 403 r°, 414 vo, et suivantes de cette histoire manuscrite de la ville de Senlis.

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