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faire, je crois qu'il n'est pas honteux à moi d'implorer de son excellence la grace d'être admis à participer aux bienfaits établis par la piété des princes pour de pareils usages. Ils sont destinés pour des cas semblables aux miens, ou ne le sont pour personne.

En conséquence de cet exposé, je supplie très humblement son excellence de vouloir me procurer une pension, telle qu'elle jugera raisonnable, sur la fondation que la piété du roi Victor a établie à Annecy, ou de tel autre endroit qu'il lui semblera bon, pour pouvoir subvenir aux nécessités du reste de ma triste carrière.

De plus, l'impossibilité où je me trouve de faire des voyages, et de traiter aucune affaire civile, m'engage à supplier encore son excellence qu'il lui plaise de faire régler la chose de manière que ladite pension puisse être payée ici en droiture, et remise entre mes mains, ou celles de madame la baronne de Warens, qui voudra bien, à ma très humble sollicitation, se charger de l'employer à mes besoins. Ainsi jouissant, pour le peu de jours qu'il me reste, des secours nécessaires pour le temporel, je recueillerai mon esprit et mes forces pour mettre mon ame et ma conscience en paix avec Dieu; pour me préparer à commencer, avec courage et résignation, le voyage de l'éternité, et pour prier Dieu sincère

ment et sans distraction pour la parfaite prospérité et la très précieuse conservation de son excellence.

J. J. ROUSSEAU.

TRADUCTION

DE L'ODE DE JEAN PUTHOD.

IN NUPTIAS

CAROLI EMMANUELIS,

INVICTISSIMI SARDINLE REGIS, DUCIS SABAUDIE, ETC.,

ET REGINE AUGUSTISSIMÆ

ELISABETHÆ A LOTHARINGIA '.

Ergo nunc vatem, mea musa, regi
Plectra jussisti nova dedicare?
Ergo da magnum celebrare digno
Carmine regem.

Inter Europæ populos furorem
Impius belli deus excitârat;

Omnis armorum strepitu fremebat
Itala tellus.

Interim cæco latitans sub antro

Mosta Pax diros hominum tumultus
Audit, undantesque videt recenti

Sanguine campos.

Cernit heroem procul æstuantem;
Carolum agnoscit spoliis onustum;

· Charles-Emmanuel épousa, en troisièmes noces, Élisabeth-Therèse, fille de Léopold, duc de Lorraine, née à Lunéville le 15 octobre 1711. Le mariage fut célébré le 1 avril 1737. Elle mourut le 3 juillet 1741. Jean Puthod, chanoine d'Annecy, composa cette ode pour les noces du prince. (Note de M. Musset-Pathay.)

SUR LE MARIAGE

DE CHARLES-EMMANUEL,

ROI DE SARDAigne, et duc DE SAVOIE,

AVEC LA PRINCESSE

ÉLISABETH DE LORRAINE.

Muse, vous exigez de moi que je consacre au roi de nouveaux chants; inspirez-moi donc des vers dignes d'un si grand monarque.

Le terrible dieu des combats avoit semé la discorde entre les peuples de l'Europe : toute l'Italie retentissoit du bruit des armes, pendant que la triste Paix entendoit du fond d'un antre obscur les tumultes furieux excités par les humains, et voyoit les campagnes inondées de nouveaux flots de sang. Elle distingue de loin un héros enflammé par sa valeur ; c'est Charles qu'elle reconnoît,

N. B. Nous avons réuni dans ce volume ce que J. J. Rousseau avoit traduit de Tacite, de Sénéque, de Lucrèce, et du Tasse. Quelques éditeurs précédents ont fait imprimer en regard de la traduction le texte traduit. Nous avons cru pouvoir nous dispenser de les imiter en cela, parceque les auteurs sur lesquels Rousseau s'étoit essayé, sont entre les mains de tout le monde. L'Ode de Jean Puthod seroit au contraire depuis long-temps oubliée, si Jean-Jacques n'eût pas eu l'idée de la traduire; il étoit donc nécessaire que le lecteur fût à même de lire l'original.

MÉLANGES.

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