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divine quiddité (1), ni quoi que ce soit d'intrinsèque à Dieu, ni quoi que ce soit de la réalité de Dieu... La loi de la nature est que l'homme ne connaisse rien en soi, si ce n'est ce qu'il connaît par intuition. Or, quand il fait emploi des seules forces de la nature, il ne peut, au moyen de l'intuition, s'élever à la connaissance de Dieu..... L'essence divine, la quiddité divine peuvent, toutefois, nous être connues par quelque concept qui leur est propre, concept non pas simple, mais composé; que nous formons avec d'autres concepts abstraits des choses... Cependant, on ne connaît pas Dieu en soi; ce qu'on connaît ici-bas, c'est un autre que Dieu, car tous les termes de cette proposition: aliquod est ens sapientia, justitia, charitas, sout certains concepts dont aucun n'est réellement Dieu. Or, les objets de la connaissance, ce sont tous ces termes; donc on connaît par eux autre chose que l'essence même de Dieu. OKKAM. Sentent. diss., III, quæst. 11.

GERSON.

Gerson, né à Reims, en 1363, disciple et successeur de l'ardent nominaliste Pierre d'Ailly, comme chancelier de l'Université, fut exilé ou s'exila volontairement à Lyon, où il se fit maître d'école pour les petits enfants, comme on le voit dans son traité De parvulis ad Deum ducendis. Il mourut en 1429. On lui attribue à tort l'Imitation de Jésus-Christ.

Les degrés de la connaissance.

Supposons que l'âme ait été, suivant ses mérites, emprisonnée dans un cachot sombre, affreux, qui se divise en trois étages, l'étage inférieur, le moyen et le supérieur. Le nom du premier étage est sensibilité; celui du second, raison; celui du troisième, intelligence simple. Les fenêtres de l'étage inférieur ne laissent arriver jusqu'à l'âme aucune lumière, si ce n'est la lumière corporelle, celle que contemplert les brutes ellesmêmes. Par les ouvertures de l'étage intermédiaire pénètre quelque lumière plus spirituelle, que l'âme reçoit lorsqu'elle s'élève jusque-là. Enfin, au faîte de la prison, à l'étage supérieur, elle peut voir la lumière divine qui, resplendissant aux lieux hauts, s'introduit à travers les étroites fissures de la mu

1. Quiddité, ce qu'une chose est réellement.

raille, comme ces feux de l'éclair qui traversent rapidement les nuages et disparaissent aussitôt.

GERSON. Contrà vanam curiositatem, I.

L'auteur de l'Imitation.

Puissance de l'amour.

L'amour est une grande chose; c'est un bien tout à fait grand. Lui seul rend léger tout ce qu'il y a de pesant, et supporte avec égalité les inégalités de la vie : car il porte un poids sans être chargé, et il rend doux et agréable ce qui est amer.

Il n'y a rien au ciel et sur la terre de plus doux que l'amour, rien de plus fort, de plus élevé, de plus étendu, de plus agréable, de plus rempli ni de meilleur.

Celui qui aime, court, vole et est dans la joie; il est libre et rien ne le retient.

Il donne le tout pour le tout, et possède tout dans le tout, parce qu'il se repose au-dessus de toutes choses dans le seul et souverain bien, d'où découlent et procèdent tous les autres biens.

Souvent l'amour ne garde point de mesure; mais son ardeur l'emporte au delà de toute mesure.

L'amour ne sent point sa charge; il ne compte point le travail; il veut faire plus qu'il ne peut et ne s'excuse point sur l'impossibilité, parce qu'il croit que tout lui est permis et possible. Ainsi, il est capable de tout; et, pendant que celui qui n'aime point s'abat et se décourage, celui-là exécute bien des choses et les achève.

L'amour veille et ne dort pas, même pendant le sommeil. Il n'est pas las, quoiqu'il se fatigue; pressé par l'affliction, il ne laisse pas que d'être au large ; il est troublé et n'est point dans le trouble; mais comme une vive flamme et un flambeau ardent, il se fait un passage en haut et y monte sans obstacle.

Celui qui aime connaît seul la force de ce mot d'amour.

EXT. GR. PHILOS.

Imitation de Jésus-Christ.

11

une cause efficiente première, et c'est cette cause que tout le monde appelle Dieu.

SAINT THOMAS. Somme de théologie, part. II, qu. 11.

Preuvė platonicienne de l'existence de Dieu
par les idées.

La quatrième preuve de l'existence de Dieu est celle des degrés de perfection. On trouve du plus et du moins et des degrés dans la bonté, la vérité, la noblesse et toutes les autres qualités des choses. Mais le plus et le moins ne s'appliquent qu'à des êtres divers qui se rapprochent diversement d'un type souverain : comme, par exemple, le chaud est ce qui participe plus ou moins de la chaleur absolue. Il y a donc aussi un être qui est souverainement vrai, souverainement noble, et qui dès lors est l'être souverain...

Ce qui est souverainement doué de perfection, en quelque genre que ce soit, est cause de tous les degrés de perfection du même genre, comme le feu est cause de toute chaleur. Il y a donc un être cause de l'être, de la bonté, de la perfection de tout être, et cet être est appelé Dieu (1)...

Le mot idée, en grec idia, en latin forma, signifie les formes des choses qui existent en dehors des choses elles-mêmes. Or la forme, ainsi conçue, peut être considérée sous un double rapport. On peut l'envisager, ou comme l'exemplaire de la chose même dont elle est la forme, ou comme le principe de la connaissance qu'on a de cette chose, puisque les formes des objets que l'on connaît existent dans l'esprit qui les connaît. Suivant cette double acception du mot, il est nécessaire d'admettre l'existence des Idées ; ce qui peut se démontrer ainsi. Dans tout ce qui n'est pas l'œuvre du hasard, la forme est nécessairement la fin de la génération de l'être. Or, nul agent ne peut agir en vue d'une forme qu'autant qu'il a cette forme ou son image en lui-même. Et il peut l'avoir de deux manières. Certains agents trouvent dans leur constitution propre la forme de leurs actes, tous les êtres, par exemple, qui agissent d'après les lois de la nature physique: c'est ainsi que l'homme engendre l'homme, que le feu produit le feu. Pour d'autres agents qui agissent avec connaissance, la forme existe dans leur entendement : c'est ainsi que l'image

1. Saint Thomas s'efforce de concilier ici Aristote et Platon.

d'une maison préexiste dans l'esprit de l'architecte. Et on dit avec raison que cette image est l'idée de la maison, parce que l'architecte a l'intention de faire une maison semblable à la forme qu'il a conçue. Or, le monde n'étant pas l'effet du hasard, mais l'œuvre d'une cause intelligente qui est Dieu, il s'ensuit nécessairement que la forme qui a servi de modèle au monde se retrouve dans l'entendement divin, c'est-à-dire que les Idées existent, puisque c'est dans cette forme que consiste la nature de l'Idée. SAINT THOMAS. lbid., I, qu. II, art. 3; qu. xv, art. 1.

DUNS SCOT.

Duns Scot, né en 1275, en Ecosse ou en Irlande, étudia à Oxford, entra dans l'ordre des Franciscains, puis se livra à l'enseignement public. Envoyé par ses supérieurs à Paris en 1304, il y prit le doctorat. Il mourut à Cologne en 1308.

La création, œuvre de volonté libre.

Il faut chercher la première contingence dans la volonté divine... parce que la volonté de Dieu est sa volonté.

Les créatures sont produites par Dieu immédiatement par le moyen d'une volonté gratuite,qui n'est affectée par rien d'extérieur, soit moyen, soit fin.... et par le moyen d'un art effectif et expressif, qui n'est formé par rien d'extérieur, mais qui se forme lui-même par la variété des idées, qui, sans différer de lui-même, représente plusieurs choses différentes et contraires, si bien qu'en lui « tout est un ». DUNS SCOT. In sententiarum librum, liber II, disc. xxxix, quæst. 1. De rerum principiis, quæst. 1, art. 3.

OKKAM.

Okkam, né en Angleterre, professa à Paris sous Philippe le Bel. Il ecrivit pour Philippe contre les prétentions du Saint-Siége et de Boniface VIII. Il écrivit aussi pour l'empereur Louis de Bavière, auquel il disait « Défends-moi avec l'épée, je te défendrai avec ma plume. » Persécuté, il se réfugia à la cour de l'empereur et mourut à Munich, en 1345. On l'avait surnommé le docteur invincible, doctor invincibilis.

Nous ne pouvons connaître l'essence de Dieu.

L'homme ne peut connaître ici-bas ni la divine essence, ni la

divine quiddité (1), ni quoi que ce soit d'intrinsèque à Dieu, ni quoi que ce soit de la réalité de Dieu... La loi de la nature est que l'homme ne connaisse rien en soi, si ce n'est ce qu'il connaît par intuition. Or, quand il fait emploi des seules forcés de la nature, il ne peut, au moyen de l'intuition, s'élever à la connaissance de Dieu..... L'essence divine, la quiddité divìne peuvent, toutefois, nous être connues par quelque concept qui leur est propre, concept non pas simple, mais composé; que nous formons avec d'autres concepts abstraits des choses... Cependant, on ne connaît pas Dieu en soi; ce qu'on connaît ici-bas, c'est un autre que Dieu, car tous les termes de cette proposition: aliquod est ens sapientia, justitia, charitas, sont certains concepts dont aucun n'est réellement Dieu. Or, les objets de la connaissance, ce sont tous ces termes; donc on connaît par eux autre chose que l'essence même de Dieu. OKKAM. Sentent. diss., III, quæst. n.

GERSON.

Gerson, né à Reims, en 1363, disciple et successeur de l'ardent nominaliste Pierre d'Ailly, comme chancelier de l'Université, fut exilé ou s'exila volontairement à Lyon, où il se fit maître d'école pour les petits enfants, comme on le voit dans son traité De parvulis ad Deum ducendis. Il mourut en 1429. On lui attribue à tort l'Imitation de Jésus-Christ.

Les degrés de la connaissance.

Supposons que l'âme ait été, suivant ses mérites, emprisonnée dans un cachot sombre, affreux, qui se divise en trois étages, l'étage inférieur, le moyen et le supérieur. Le nom du premier étage est sensibilité; celui du second, raison; celui du troisième, intelligence simple. Les fenêtres de l'étage inférieur ne laissent arriver jusqu'à l'âme aucune lumière, si ce n'est la lumière corporelle, celle que contemplert les brutes ellesmêmes. Par les ouvertures de l'étage intermédiaire pénètre quelque lumière plus spirituelle, que l'âme reçoit lorsqu'elle s'élève jusque-là. Enfin, au faîte de la prison, à l'étage supérieur, elle peut voir la lumière divine qui, resplendissant aux lieux hauts, s'introduit à travers les étroites fissures de la mu

1. Quiddité, ce qu'une chose est réellement.

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